Épilogue

5.3K 198 45
                                    

Le vrombissement du moteur pourrait certainement me faire somnoler si la voix de mon père n'était pas présente pour gâcher ce ronronnement régulier. L'entendre me parler et me répéter comment je dois me tenir m'exaspère. De plus, j'ai l'impression que son discours est le même depuis bien trop longtemps.

En réalité, je me sens étrange depuis ce matin. J'ai l'impression d'avoir une sensation de déjà vue sur tout ce qui m'entoure. Ce sentiment refuse de me lâcher, c'est tellement désagréable. Pourtant même si cette journée est importante elle n'est pas non plus décisive. Je n'ai pas de raison d'être particulièrement stressé. Non je ne sais vraiment pas d'où provient cette sensation de malaise qui me tord le ventre.

-Bon sang Zaïn ! Tu auras bientôt 15 ans, soit un peu plus sérieux. Tu n'as pas intérêt à faire la tête devant nos nouveaux alliés. Tu seras bien assez tôt l'alpha de notre meute. Il faut qu'ils comprennent qu'ils pourront avoir confiance en toi. Alors arrête de faire le gosse et lit les documents que je t'ai demandé d'apprendre !

-Ne t'inquiète pas papa, j'ai bien compris que c'était sérieux. Je vais me tenir à carreaux promis.

J'avais déjà lu ces documents à multiples reprises. Et de toute façon il n'y avait rien de vraiment intéressant à en tirer. Nous nous rendions dans une meute minuscule et en plus vieillissante. Je ne comprenais vraiment pas l'intérêt de nous en faire des alliés. Mon père aimait être en bon terme avec toutes les meutes à l'entoure. De mon point de vue s'allier à une meute faible ne pouvait que nous affaiblir à notre tour. Lorsque je serais alpha ce genre de décision inutile n'aurait plus lieu d'être.

Mon regard fut soudain attiré par une forme floue dans les bois. Et pour la première fois depuis le début de la journée cela me sembla enfin nouveau. Oui cette chose ne devrait pas être là, c'était inattendu. La voiture roulait trop vite pour que je puisse distinguer clairement ce que j'avais entraperçu. Mais si j'avais du mettre un mot sur cette vision j'aurais sans doute parler de fantôme.

Mon cœur se mit à battre étonnement vite et j'essuyais mes mains moites contre mon pantalon. Que m'arrivait-il ? Pourquoi suis-je soudain si angoissé ? Ce n'était sûrement qu'un mirage, nous allions vite, j'avais pu m'imaginer n'importe quoi. J'essayais de me calmer et de rester cohérent mais au fond de moi je sentais qu'un mauvais présage flottait autour de cette journée.

Nous finîmes par arriver devant ce petit village qui ne faisait clairement pas rêver. Mon père sortit en premier de la voiture et alla saluer la petite foule qui nous attendait. Je viens rapidement le rejoindre en me forçant à paraître sympathique, laissant de côté l'anxiété qui cherchait à me paralyser. Au fond, la fierté de mon père était tout de même importante pour moi. Je souhaitais tellement l'entendre me dire que j'avais été parfait. Mais cela ne servait certainement à rien de rêver, il n'était du genre à relever que mes erreurs. Selon lui, c'était nos fautes que les personnes retenaient et comméraient le plus, pas nos réussites.

La réunion et les discours qui avaient suivi étaient d'un ennui mortel. De plus, j'étais dans l'incapacité de me concentrer sur ce qui était dit. Je n'étais pas à ma place ici. C'était une certitude. Autre chose m'attendait aujourd'hui. J'en étais de plus en plus certain. Mon destin allait se jouer dans quelques heures.

A-t-on un mauvais pressentiment avant de mourir ? Était-ce cela que je ressentais à présent ? J'espérais que non mais malheureusement il n'y a que l'avenir qui me le dirait.

Quand nous sortîmes enfin de la salle, je me sentais vide et lasse de tout le temps que j'avais perdu, enfermé dans cette petite salle. Nous étions à présent invités à déguster un immense buffet mais je n'avais pas faim. Mon ventre étant déjà rempli par cette boule d'appréhension qui ne cessait de grandir.

Loups Brisés (bxb) [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant