Je courais.
Un pied après l'autre, le plus vite possible, dans une course effrénée ayant pour seul et unique but de m'éloigner le plus possible de cette réalité qui me cassait en petits morceaux et me piétinait. Mon souffle était court, mes poumons me brûlaient et mes pieds me faisaient souffrir mais ils étaient hors que question que je m'arrête avant de m'être lâchement cachée des regards de pitié, de haine ou de déception.
Je cessais finalement ma course, essoufflée, dans une clairière dont seulement le bruit apaisant du chant des oiseaux se faisait entendre. La forêt était calme, sereine. Tout le contraire de mes pensées qui tournaient sans cesse dans mon esprit, ne me laissant aucun répit. Tout d'un coup, un cri de rage, de honte et de désespoir s'échappa de ma gorge pour résonner dans les bois qui, après cela, redevinrent paisible. Je me trouvais donc là, plantée comme une idiote qui ne savait plus quoi faire, ni où aller. Je tombais à genoux, me laissant aller à une accablante tristesse qui vint posséder tous les muscles de mon corps, les rendant inaptes aux mouvements. Je m'abandonnais à cette affliction que j'avais gardé enfouie depuis la disparition de mes parents. Une larme, puis deux, puis une multitude se mirent à couler sur mes joues brulantes, roulant avec empressement pour rejoindre le sol. Je fus parcouru de soubresauts dû à mes sanglots incontrôlables.
-Père, mère, pardonnez-moi. Je suis désolée, je n'ai pas été à la hauteur... murmurais-je en implorant le ciel de m'envoyer un signe, un indice.
C'était donc ça, perdre pied. Des bruits de pas dans les feuilles mortes, arrêtant leur progression derrière moi, me sortirent de ma désolation. Je ne savais pas qui était là. Je ne voulais pas le savoir. J'étais parfaitement consciente que ce n'était pas mon frère, il m'en voulait bien trop, mais une membre de la fratrie Pevensie. Je me fichais qu'il me voit pleurer comme une madeleine à présent, qu'il me considère comme une faible. Je n'avais plus rien, plus aucune cause viscérale pour lequel me battre. L'image que je renvoyais n'avais plus aucune importance, plus rien n'avait d'importance.
La personne qui était planté en dehors de mon champ de vision, depuis plusieurs minutes, attendant sûrement une réaction de ma part ,qui ne se produisit pas, s'assit prudemment à ma droite. Il soupira et se gratta l'arrière du crâne. Je sus donc immédiatement qu'il s'agissait de Peter. Nous restâmes là, en silence, à écouter nos pensées et nos respirations un long moment. Je ne saurai dire si cela était quelques minutes ou plusieurs heures. Puis, il décida de briser cette bulle de mélancolie et se racla la gorge. Il ne savait pas quoi dire, je le savais. Je lisais en lui comme dans un livre ouvert, nous étions les mêmes. Je me décidais donc à prendre la parole d'une voix éraillée :
-Vous n'avez pas peur ? Que je réessaie de vous tuer ?
-Je sais que vous ne le ferez pas. Vous n'avez plus de raison de le faire, railla-t-il le regard toujours porté sur l'horizon, un sourire au coin des lèvres.
-Ca m'embête de l'admettre mais vous avez raison, ajoutais-je en essayant de mimer un sourire.
Il me regarda enfin et je voyais dans son expression peu convaincu qu'il savait aussi, toutes les pensées qui me traversaient. Il détourna encore lentement le regard.
-Lorsque nous avons fuis la guerre dans notre monde, commença-t-il d'une petite voix après une pause, Ed, Lucy, Susan et moi, j'étais effrayé. Autant qu'eux, même plus je pense, car ils étaient sous ma responsabilité. Je me devais de les protéger mais cette simple pensée me suffisait à garder la tête hors de l'eau. Les mettre hors de danger était mon seul objectif et les efforts que je fournissais pour atteindre ce but étaient tels que j'en oubliais ma peur, ma peine et mon inquiétude. La guerre n'était pas finie lorsque nous sommes partis mais nous étions hors de danger, je n'avais donc plus de protection pour mes sentiments. J'ai alors réussi à guérir. Guérir ma peine et mes blessures. Il faut juste accepter, reconnaitre que tout cela existe, que tu le ressens. Accepter c'est commencer à guérir.
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My Kingdom
Hayran KurguLa protection de mon trône et de mon royaume est la seule chose qui m'importe. La fuite de mon château pour survivre, la rencontre de ce garçon et la reconquête de nos terres seront peut-être les seuls remèdes pouvant me sauver de cette folie de rei...