Chapitre 7

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Après m'être occupée de Yako, je suis partis manger. N'ayant pas vraiment faim, je me suis forcé à avaler quelques morceaux de pain puis j'ai laissé tomber en sentant la nausée m'envahir. Ayant passé l'après-midi à nettoyer le QG, la nuit est rapidement tombée et je ne veux pas aller dormir. Cette nuit va être affreuse, je le sais. J'ai ressassé beaucoup de souvenirs ce jour et les cauchemars vont une fois de plus m'envahir cette nuit si jamais je dors. Je n'ai aucune envie d'être réveillée des dizaines de fois dans la nuit donc je retarde mon sommeil au maximum.

Je me balade dans les couloirs silencieux du QG vêtue d'un pantalon de l'uniforme et d'une simple brassière. Je suis légèrement stressée à l'idée d'être vue ainsi non pas à cause de ma pudicité qui ne me dérange pas tant que cela, mais bien à cause de mes trop nombreuses cicatrices. Une grande partie d'entre elles se trouvent sur mon ventre, mais on peut en observer d'autres dans mon dos et sur mes épaules. Différentes marques ornent mon corps : brûlures, coupures, et autres cicatrices du genre... J'ai même cinq ou six trous dans la peau ainsi que des déchirures, la plupart causées par un de mes os qui se déplaçait quand ils me faisaient des fractures... Pas très esthétique si vous voulez mon avis. Généralement quand cela arrivait, ils faisaient en sorte que mon os bouge et vienne déchirer ma peau pour finalement ressortir hors de mon corps. Je ne sais même pas comment c'est possible, mais à l'heure d'aujourd'hui, tous mes os sont consolidés et toute trace de fracture a disparu, ce qui ne doit pas être le cas pour les autres...

Sortant de ces pensées morbides, je me dirige vers la laverie dans l'espoir de dégotter une chemise propre. J'ai mal géré mes vêtements, tous mes hauts sont sales. Tandis que j'avance d'un pas rapide, j'entends une porte s'ouvrir. Je lève les yeux au ciel. C'était OBLIGE que quelqu'un sorte au moment même où je traverse le couloir à moitié dénudée. Et je suis tellement malchanceuse que ça va être mon nain de caporal...

- Qu'est-ce que tu branles ? dis une voix désagréable dans mon dos.

Non mais c'est pas vrai, je rigolais moi au départ... Oh tuez-moi par pitié. Je me retourne vers le possesseur de cette voix tout en priant pour qu'il ne fasse pas de remarque sur mon corps. C'est déjà assez difficile à supporter pour qu'il n'en rajoute et je ne saurais dire pourquoi, mais son avis m'importe plus que les autres. Je ne veux pas me sentir blessée par ses mots. Je reprends vite mes esprits en me sentant divaguer et me mets face à lui, mes bras entourant mon corps.

- J'allais chercher une chemise, les miennes sont sales... je dis d'une petite voix. Il écarquille légèrement les yeux en voyant le grand nombre de cicatrices sur mon corps et reste bloqué quelques instants. Je baisse le regard devant le sien, honteuse pour je ne sais quelle raison. Il me semblait pourtant avoir dépassé le stade de la honte depuis un moment, mais son impitoyable regard me transperce de part en part, me rendant de plus en plus mal à l'aise comme je l'étais à l'époque avec eux.

Il s'avance soudainement vers moi et me saisit le bras avant de me tirer dans son bureau, puis dans sa chambre.

- Tiens, dit-il en me tendant un tissu qu'il venait de prendre dans son armoire.

Je le saisis et l'observe avant de comprendre que c'est en fait une chemise. Mon caporal vient de me donner une chemise. Celui que j'insulte depuis mon arrivée. C'est une blague ? Sentant son regard insistant sur moi, je m'empresse de l'enfiler et de la fermer. Comme nous faisons pratiquement la même taille, elle me va comme un gant. Je le remercie d'une petite voix et sors de ses appartements avant qu'il ne puisse en placer une. Je sors du bâtiment et prends l'escalier qui mène au toit du QG. Je grimpe les marches deux par deux et arrive en haut de celles-ci. Je  continue d'avancer et pars m'asseoir sur un morceau de toit plat situé en face de la forêt qui entoure le QG. Je lève la tête et essaie de retenir mes larmes quelques instants, puis abandonne l'idée en sentant la tristesse me submerger. Je fonds en sanglots le plus silencieusement possible tout en pensant à cette journée. Pour la première fois de ma vie, je suis sortie des murs légalement, j'ai accompli notre rêve... J'espère que vous êtes fiers de moi. Les larmes coulent de plus en plus forts et ne s'arrêtent pas. Je les laisse faire, les ayant bien trop retenues ces derniers temps. Mon corps est fatigué de devoir refouler cette tristesse. Mon esprit est épuisé face aux émotions négatives. Mes cicatrices me démangent mais je refoule cette envie. Gratter, frotter jusqu'au sang n'est pas une bonne idée n'est-ce pas ? Question rhétorique puisque je l'ai déjà fait de nombreuses fois et que cela ne m'a rien apporté de bon. Je continue d'évacuer la tristesse comme je peux, dans le silence le plus parfait.

Décidément, on est maudits - Livai A.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant