Chapitre 12

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Nous sommes maintenant à trois jours du départ de l'expédition. Les nouvelles recrues se sont admirablement bien adaptées malgré le rythme des entraînements qui s'intensifie. Le matin, Livai, Hanji et Mike, les chefs d'escouade, nous ordonnent de parcourir le chemin entre l'écurie et le fond de la forêt en courant sans faire de pauses ; l'après-midi, nous devons combattre d'autres soldats afin de nous améliorer ; le soir, nous enfilons nos équipements tridimensionnels afin de traverser la forêt dans un temps record pour abattre le plus de titan en bois. Pas de difficultés de ce côté-là pour moi.

Malheureusement, le jour de l'expédition tombe pile le jour du départ de mes traumatismes. Ce fameux jour où j'ai tout perdu, approche bien plus vite que ce à quoi je m'attendais. Je le redoute car je sais que je serai plus que vulnérable à cet instant. Je suis soudainement prise de fatigue tandis que nous commençons à partir. J'arrête alors mon supérieur qui s'apprêtait à nous suivre en volant avec son équipement.

- Livai je me sens pas très bien, je peux aller me reposer s'il te plaît ?

Celui-ci me sonde du regard comme s'il cherchait à déterminer la source du problème. Mais devant mon teint blafard et mes cernes creusés, il acquiesce non sans méfiance. Je quitte alors rapidement les lieux et me dirige vers ma chambre. J'ai décidé d'aller dormir, peu importe le nombre de cauchemars qui m'envahira. Le sommeil m'ayant quitté depuis un moment, je pense que ça ne fera pas de mal à mon corps de se reposer.

Arrivée dans ma chambre, je m'effondre littéralement sur mon lit. Cela fait plusieurs jours que je n'ai rien avalé, l'appétit me manquant. Les larmes montent mais aucune ne sort, je les retiens bien trop pour ça. Petit à petit, mon esprit s'embrume et mes paupières deviennent lourdes tandis que je plonge dans un sommeil perturbé.

Je me réveille brusquement et complètement déboussolée. Mon corps est recouvert d'une fine pellicule de sueur et mes muscles tremblent violemment sous les cauchemars qui m'ont assaillie durant cette courte nuit. C'est après quelques secondes de flottement que je sens une poigne de fer entourer mon bras droit. Prise de panique, je recule brutalement contre le mur derrière moi et tente d'arracher cette main. Ma respiration se coupe et mes tremblements s'amplifient. Je ferme les yeux de toutes mes forces et prie pour que l'instant qui suivra ne soit pas trop douloureux, même si c'est peine perdue. Je ressens encore une fois l'immonde humidité du sous-sol envahi de sang et je ne vois rien d'autre que mes souvenirs. Mon esprit s'enferme dans cette vision et je me recroqueville. Je ne sais pas comment c'est possible, mais j'y suis à nouveau. Je suis retournée à Shiganshina, dans cette maison abandonnée. Mes bourreaux m'ont enfermée avec mes trois amis et nous sommes torturés de nombreuses fois. Mon corps est parcouru de spasmes et une souffrance sourde envahie ma chair. Mes sens se brouillent sans que je ne le comprenne, le sol tangue violemment et je sens soudainement une légère douleur rencontrer ma joue. Quelqu'un vient de me claquer, probablement dans le but de me sortir de ma panique.

J'ouvre doucement les yeux et observe les alentours avant de me rappeler brusquement de ma situation. Je suis dans ma chambre, au sein du bataillon d'exploration. Tout va bien. Sauf qu'il y a devant moi un homme que je ne connais que trop bien qui m'observe, le regard vide d'émotions. J'essaie de calmer mes tremblements qui ne veulent cesser tandis que je me décolle petit à petit du mur. Livai, car c'est bien lui, reste silencieux et s'approche doucement de moi.

- Calme toi maintenant, me souffle-t-il d'une voix neutre.

Je souffle un coup et me remémore doucement la cause de mon angoisse. Chose complètement stupide puisqu'un autre tremblement parcourt mes muscles et je crains de repartir dans ma panique. Ayant peur de me retrouver seule, je me glisse sans trop réfléchir dans les bras du noiraud afin de chercher un quelconque réconfort. Il se crispe un peu mais finit par m'entourer lui aussi de ses bras. Je mets de l'ordre dans mes pensées et tente de reprendre mon souffle. Livai me lâche quand il me sent calmée avant de se reculer un peu. Je fais de même et l'observe.

- Souvenirs ? il demande.

Je me contente d'hocher lentement la tête.

- Qu'est-ce...qu'est-ce que tu fais là ?

Ma voix se fait hésitante. Les tremblements qui parcourent mes muscles s'estompent petit à petit et je recouvre entièrement mes sens.

- Tu n'avais pas l'air bien aujourd'hui. Je suis venu voir ce qu'il se passe.

- Juste une faiblesse passagère, je réponds, c'est une période de l'année difficile pour moi.

Je ne sais pas pourquoi je lui ai dit ça mais j'en ressentais le besoin. Je ne suis pas encore prête à tout lui exposer maintenant, mais je préfère qu'il sache que je serai moins réactive bien que ça soit contre ma volonté.

- Je suis passé par l'écurie en venant ici, commence-t-il une fois que je suis entièrement calmée, Yako semblait t'attendre et je n'ai pas eu le temps de m'occuper d'Apollon ce matin. Va te rendre utile et occupe toi d'eux. Il se redresse et se dirige vers la porte. Les recrues ont entraînement à seize heures, sois de retour avant. Il sort de la pièce sur ces mots.

Je souris doucement devant sa bienveillance cachée. Il sait que s'occuper des chevaux n'a rien d'une corvée pour moi. Je me lève et m'habille correctement avant de passer au réfectoire pour prendre deux pommes. Je sors du QG et me dirige vers l'écurie. Vu la position du soleil, je dirais qu'il doit être aux alentours de treize heures, ce qui voudrait dire que j'ai dormis environ trois heures.

Arrivée à l'écurie, je câline Yako un bon moment avant de le brosser lui et Apollon. Une fois cette tâche finie, j'enfile une bride à mon cheval et mets un licol à l'étalon de mon supérieur avant de monter sur le dos de mon grand bai. Nous nous dirigeons vers la forêt, moi à cru sur Yako, tenant Apollon par la longe qui semble ravi de nous suivre. Nous partons alors pour une grande balade où les deux chevaux s'amusent à faire la course.

Cette longue balade m'a légèrement revigorée. De leur côté, les deux chevaux ont semblé apprécier puisqu'ils ont galopé quasiment tout du long. 

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Prochain chapitre mercredi 25/01.

Décidément, on est maudits - Livai A.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant