Décidément, on est maudits - Livai A.

Chapitre 11

Cela fait maintenant quelques semaines que les recrues sont arrivées et les journées sont principalement constituées d'entraînements qui préparent l'expédition prochaine. Je suis légèrement ennuyée par ses journées qui se ressemblent mais je ne laisse rien paraître. Aujourd'hui nous avons une pause dans le planning puisque les nouveaux ont été sacrément secoués hier : un orage a éclaté dans la soirée et gros sourcils a eu la bonne idée de tous nous envoyer dans la forêt afin de nous entraîner sur des titans en bois. Naturellement, les soldats expérimentés sont rentrés sans problèmes au bout de quelques heures mais les nouveaux soldats sont, pour la plupart, arrivés au beau milieu de la nuit. Le major a décidé de leur laisser leur matinée afin qu'ils se reposent car le but n'est tout de même pas de les épuiser juste avant l'expédition.

Pour ma part, je suis rentrée pratiquement en même temps que mon supérieur ainsi que Mike, Hanji et d'autres. Je suis directement partie me changer, ayant horreur de porter des habits mouillés, et suis partie me reposer après ça. Je dis bien reposer et non dormir, puisque plus le temps passe et plus mes nuits sont compliquées. On arrive à une période de l'année assez difficile pour moi et je refuse de dormir tant que je ne tombe pas d'épuisement. Mon état se dégrade rapidement mais je n'y prête pas attention et malgré mon épuisement, mes capacités restent miraculeusement intactes, ce qui me permet de ne pas me faire remarquer auprès de mes supérieurs. En plus, de ce que j'ai compris, l'expédition tombe pile sur le jour où, il y a un an, j'ai retrouvé ma liberté mais où je me suis également infligé de nombreux traumatismes. Je sens que cette journée ne va pas être toute rose.

Nous voici donc tôt le matin, quand le soleil se lève à peine et que la rosée humidifie encore l'air, tandis que je décide d'aller me balader à cheval. Yako est plus qu'en forme en ce moment et je dois souvent le sortir pour qu'il ne soit pas tout le temps sur les nerfs. Je selle mon grand bai et lui donne un bout de carotte avant de monter sur son dos et de le guider au pas vers la forêt entourant le QG, qui s'étend par ailleurs sur plusieurs hectares. La nature nous envahit et le silence pesant est brisé par le bruit de ma respiration mêlée à celle de Yako. Je souffle un bon coup, ce qui crée par ailleurs un petit nuage de buée, avant de relâcher la pression que j'exerçais jusqu'ici sur les rênes.

Ayant compris le signal mon cheval part comme une fusée et fait une petite ruade de contentement. Je le recadre bien vite et il continue de galoper à pleine vitesse sur le chemin tout tracé qui nous enfonce dans la forêt. Il me semble apercevoir plusieurs animaux sur le bas-côté tels que des lapins, écureuils ou encore une biche mais, la vision brouillée par le vent qui m'arrive en pleine tête avec la force d'un ouragan, je ne suis sûre de rien. Grisée par la vitesse, je laisse mon cheval nous guider et me contente de l'arrêter quand j'entends derrière moi d'autres claquements de sabots. Yako reprend doucement son souffle tandis que je me retourne pour observer le nouvel arrivant qui se dirige au petit galop vers nous.

Mon grand bai hennit brusquement de joie quand le cheval et son cavalier s'approchent un peu plus près et je reconnais sans peine le bel étalon noir de mon caporal, qui d'ailleurs est sur son dos. Je le salue d'un signe de tête et il fait de même avant d'arrêter sa monture afin de se mettre à notre hauteur. Yako frotte sa tête contre celle de son ami et l'autre fait la même chose.

Je laisse encore quelques instants de récupération à mon cheval avant de le détourner pour le remettre au pas. Il n'est pas mécontent de recommencer à marcher et semble même déjà prêt pour un autre galop sans fin. Je suis vraiment étonnée par sa capacité de récupération ; il y a quelques mois, quand je suis arrivée et qu'on me l'a confié, il avait un manque évident d'endurance et de courage, je l'ai remarqué dès la première expédition. J'ai donc décidé de lui faire des entraînements principalement constitués de longs galops dans la forêt à courts intervalles, des balades au trot sans s'arrêter et j'ai même demandé à Petra de nous aider à inculquer la bravoure à ma monture, ce qu'elle a fait volontiers avec l'aide de sa monture. Ne me demandez pas comment nous avons fait cela car je n'ai aucune envie d'expliquer ce calvaire impliquant des déguisements tous plus farfelus les uns que les autres, des apparitions soudaines au détour d'un arbre, des cris ainsi que des gestes brusques et beaucoup, BEAUCOUP de caresses et de pommes.