XX.

806 61 3
                                    


L'écran de mon téléphone affiche qu'il est 10:07 lorsque j'ouvre les yeux. On s'est couché tard hier car après l'église on a échangé les cadeaux. Rien d'extra, j'ai reçu une très jolie chemise en soie à motif africain ; Raphaël et Lucas des baskets que j'avais commandées avec maman Lou ainsi que des CD de jeux vidéo.



Bref, il y a assez à manger dans le frigo, que chacun se gère. Moi Mayite, je n'ai pas l'intention de quitter mon lit d'aussi tôt. Déjà que dès demain je retourne au boulot, non merci. Grâce matinée pour moi.



Je vais vider ma vessie et j'en profite pour me faire une assiette que j'emporte avec moi dans ma chambre. Les garçons dorment complètement K.O. Ils se sont couchés bien après moi car ils testaient leurs nouveaux jeux. C'est la fête, ce sont les vacances, je les ai laissés faire.



Je me balade sur le net, actuellement tout le monde a posté sa table de Noël. Jolie, pas jolie, nourriture brûlée ou mal présentée, personne ne veut rester derrière. Je me moque de certaines tables lorsque Maurice rentre. Il me dit bonjour du bout des lèvres, je lui réponds normalement et retourne dans mon téléphone.



Au bout de plusieurs allers et venues, il revient demander à me parler. Je pose mon téléphone et lui donne toute mon attention.



- Tu sais Mayite, avant l'accident de mes parents je ne manquais de rien. On ne roulait pas sur l'or, on ne mangeait pas du caviar, mais au moins on avait au minimum les trois repas de la journée. On apprenait dans des écoles supérieures privées pour ma sœur et moi.


- ...


- Je te dis tout ça parce que j'ai mal. Ton comportement, pire celui de tes frères me blessent tu n'imagines pas à quel point. Quand mes parents étaient debout, on n'allait jamais chez les gens. Les histoires d'aller en vacances, on ne connaissait pas. Donc ne pense pas que c'est un plaisir pour moi de vivre chez une femme. Je n'ai pas le choix. Ma sœur qui se retrouve prisonnière d'un foyer où on la bastonne n'a pas le choix. On serre les dents en espérant que ça passe vite. On supporte en espérant que demain sera meilleur, qu'on va s'en sortir.


- ...


- Tu n'as pas idée Mayite du poids que je porte en tant que premier garçon. Quand on m'appelle pour me dire que maman a une ordonnance et que je suis incapable de la payer. Quand mon imbécile de beau-frère décide de ne pas acheter la nourriture et que ma mère se retrouve à dormir faim. J'ai mal. Mais je n'ai pas d'argent. J'ai mon école à payer, je dois participer aux charges ici, moi-même mon taxi. C'est dure pour moi mais je garde espoir qu'à la fin de l'année, avec mon diplôme ça ira mieux.


- ...


- Je viens d'enterrer mon père, voici ma mère aussi qui veut se laisser mourir. Ma sœur ne trouve pas de travail, son petit ami se comporte mal envers elle. Moi aussi je n'ai pas un grand salaire. Mon frère le pauvre entre à peine à la fac. Elle en arrive à penser qu'elle est un fardeau pour nous et préfère suivre son mari. Ça me fait mal tu n'as pas idée à quel point. Comment du jour au lendemain nos vies ont basculé du tout au tout. Mais je suis un homme, je dois continuer à me battre.


- ...


- Je sais Mayite que ce que tu fais pour moi, beaucoup n'aurait même pas fait la moitié. J'en suis conscient. Mais Mayite si je ne te soutiens pas comme tu veux, c'est parce que je n'ai pas. Si j'avais, rien que ma mère n'allait pas penser à se laisser mourir. Si j'avais, j'aurai payer l'école. Je n'ai pas. Et parce que je n'ai pas, tes frères me manquent de respect. Tes frères me méprisent. Je pensais que toi aussi tu me comprenais mais ton attitude hier m'a blessé au point de me poser des questions.


- Des questions sur ?


- Toi, tes sentiments réelles. Est-ce que toi aussi tu ne penses pas comme tes frères mais tu as peur de me le dire ?

MayiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant