Chapitre 6

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Blottis l'un contre l'autre, cette nuit m'a rappelé nos premiers jours d'amitié, quand nous entrions tout juste au lycée, des collégiens encore dans nos têtes, quand nous nous prenions pour des grands, mais que nous regorgions de vulnérabilité. Quelquefois, je suis nostalgique de cette période de ma vie. Ces trois années m'ont permis de m'ouvrir, de me chercher, de me comprendre, de tester et de me trouver. J'ai rencontré des personnes formidables, des amis que je n'oublierai jamais. Malik, Aya et Ben, je les garderai dans mon cœur. 

Il a très mal dormi. Ben n'a pas cessé de s'agiter, de geindre, de me bousculer dans son sommeil. J'ai pris soin à ne pas le laisser seul un instant. Il se calmait un peu en ressentant ma présence. Le voir dans cet état m'est insupportable.

C'est pourquoi je me réveille, tout sourire. Hier soir, Tristan et moi avons tout prévu pour notre Opération No more sadness. J'ai appelé Aya et Malik ; ce dernier a tout de suite accepté, mais les parents de la jeune femme ont été plus difficiles à convaincre. Au final, elle s'est contentée de ne pas les écouter. Évidemment, j'ai insisté pour que Sébastien soit là. 

— Pourquoi ne pas rester en cercle intime ? a suggéré Tristan. Tu penses que Ben aimerait que Sébastien vienne ? 

J'ai fait de mon mieux pour ne pas trahir les sentiments de mon meilleur ami, retenant un rire sarcastique.

— Sébastien fait partie du cercle intime de Ben, je te signale. Envoie-lui un message.

Tristan n'a rien rétorqué. Maintenant que nos invités sont prévenus et tenus au secret pour l'effet de surprise, ne manque plus que l'approvisionnement. Puisque nous nous levons tous deux tôt, à contrario de Ben qui dort en général jusqu'à dix ou onze heures du matin, voire midi en week-end, nous avons décidé de nous éclipser une petite heure de la maison pendant qu'il se repose.

Je termine donc de m'habiller sans bruit, attrape mon téléphone, dépose un bref baiser sur le front de mon meilleur ami et replace correctement la couette sur ses épaules. J'aperçois les traces rougies laissées par ses larmes. Hors de question que son chagrin dure un jour de plus. Nous allons le remettre sur pied en un rien de temps ! 

Une fois apprêté, je descends au rez-de-chaussée. Il est huit heures. Le supermarché ouvre dans une demi-heure. Tristan s'est déjà préparé et me tend un thé goût miel vanille. Je bloque devant la tasse fumante. Habituellement, je débute toujours ma journée par cette saveur-ci, puis je continue sur du menthe intense, du cannelle et je finis sur une tisane à la verveine. 

— Comment tu sais pour le miel vanille ? 

Il lève des yeux surpris sur moi.

— Considère que je sais tout ce que sait Ben. Il me dit tout sur toi. Je suppose qu'il te parle tout le temps de moi. Il est comme ça. Une vraie pie. Et puis, ce n'est pas la première fois que tu dors à la maison. 

Pour appuyer ses propos, il fait glisser un paquet de madeleines sucrées. Mes lèvres tremblotent, alors que j'essaie de ravaler un sourire radieux. En vain. Ni une, ni deux, je saute sur le sachet sous son regard amusé. 

— Vous n'aviez pas un commentaire de je ne sais plus quoi à rédiger, aujourd'hui ? 

— Je m'en occupe ! Les potes arrivent vers dix-huit heures. Je persuaderai Ben de se mettre au travail et de terminer avant. 

C'est ainsi que nous partons pour le supermarché. Tout en haut de la liste de course, trônent tous les ingrédients nécessaires pour un poulet au curry. Le plat préféré de Ben. Il s'agit de notre prétexte au cas où il nous interrogerait à notre retour. Nous nous séparons pour plus d'efficacité. Tristan se charge de la soirée. Il remplit son panier de bières, surtout pour Sébastien et Malik, de sodas, de jus de fruit, d'une bouteille de whisky et une autre de gin. Cacahuètes, biscuits apéritifs, saucisson – c'est la vie – et quelques pizzas surgelées. 

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