Le post-vacances est définitivement dur à gérer ; les souvenirs tournoient en boucle dans mon esprit, s'extirpent de ma mémoire pour me hanter en de délicieux rêves parfumés de sapins, décorés de neige et de chalets. Le retour à la réalité heurte de plein fouet. Les devoirs à rendre de fin de semestre, les révisions pour les partiels, l'exposé à préparer pour l'option, tout un tas d'occupations quotidiennes qui dévorent tout mon temps, et surtout toute ma passion.
J'ai beau adorer l'anglais et me plonger volontiers dans des commentaires de texte, apprendre et travailler sur des méthodologies, en découvrir toujours plus sur les histoires des civilisations anglophones, j'ai du mal à me remettre dans le bain, à maîtriser ma motivation qui, elle, est restée au cœur d'une montagne, planant au-dessus d'un lac glacial.
Ben m'a proposé encore et encore de réviser chez lui, d'affronter cette nostalgie ensemble, mais j'ai enchaîné les prétextes. Je ne savais pas que j'étais capable d'inventer autant d'excuses à la minute. Deux jours que j'ai repris en main ma mission prioritaire qui consiste à m'éloigner de Tristan ; si je cède au bout de quarante-huit heures, je serais fichu pour de bon.
Donc, je tiens bon. J'envoie souvent des messages à mon meilleur ami pour le rassurer sur nos partiels, nous nous partageons nos fiches de révision, et ma mère a décide de m'appeler tous les jours au moins une demi-heure durant cette semaine de « vacances » – bien que celle-ci soit essentiellement composée de manuels et de documentaires visant à approfondir mes connaissances, ce qui paraît ridicule, puisque je me mets une pression monstrueuse pour des évaluations somme toute basiques et assez simples en première année. J'aurai de l'avance pour la suite du cursus.
Et puis, un événement inattendu a déboulé dans ma vie et en a changé tout le sens.
Tristan.
En ce mercredi monotone de janvier, le ciel d'Avignon recouvert de nuages blancs, je m'exerce à la linguistique, quand mon portable émet sa sonnerie habituelle de notification. J'achève d'abord mon analyse et tends mollement le bras. En découvrant le message, je ne contrôle rien de mon expression faciale ; regard interrogateur, traits tendus, sourcils froncés, front plissé, tout y est pour démontrer ma confusion. Il me faut une bonne minute pour me ressaisir et le lire.
Tristan, a.k.a the love of my life qui ne sortira jamais avec moi : Salut, Lou, j'espère que tu vas bien. Est-ce que, par hasard, tu refuserais de venir à la maison à cause de moi ? Si tel est le cas, Ben n'y comprend rien et pense que tu traverses une phase difficile, ce qui n'est pas entièrement faux. Il s'inquiète pour toi. Dans l'hypothèse où tu chercherais à m'éviter, dis-moi quand tu viens à la maison et je vous laisserai seuls tous les deux. Je ne voudrais pas que tu t'éloignes de Ben pour me fuir.
Alors... Premièrement, je dois trouver de toute urgence un autre nom pour lui dans ma messagerie ! Deuxièmement, il est un peu trop perspicace à mon goût. D'un côté, j'aime le fait qu'il puisse lire en moi et qu'il soit prêt à s'effacer pour que je retrouve Ben à mon aise ; d'un autre, c'est dangereux qu'il me comprenne à ce point. J'hésite à lui répondre, fixant le message et ne cessant de le relire fiévreusement. Je tape un nombre incalculable de réponses pour toutes les supprimer les unes après les autres, désespéré au possible par mon attitude.
Apparemment, Tristan se montre des plus lucides et devine mon cheminement interne, puisque mon écran se transforme du tout au tout, annonçant un appel. Son appel. La sonnerie, Physical de Dua Lipa, retentit dans mon petit appartement. Trois, cinq, une dizaine de secondes s'écoulent ; je déglutis péniblement, le pouce à deux doigts d'y renoncer. J'inspire d'un coup sec et décroche en rassemblant le peu de courage qui perdure en moi.
Je me redresse et m'allonge sur mes draps, repoussant mes fiches et mon manuel par terre. Cependant, à peine ai-je accompli l'effort immense de lui répondre que le châtain continue à provoquer les battements effrénés de mon palpitant. Au travers de sa caméra, il m'apparaît allongé sur son lit dans une position similaire à la mienne, tourné sur son côté et me faisant face sans une once d'incertitudes. Par réflexe, je passe en appel vidéo à mon tour, offrant mon visage marqué par la fatigue des révisions à son regard perçant.
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Sunshine Protector
RomanceLou Lagarde est un véritable rayon de soleil. Tous ses amis le pensent et ils l'adorent. Il aime les fraises plus que tout et se bat pour défendre la saveur menthe-chocolat. Etudiant en licence d'anglais, sa vie parait idéale. Mais, le sunshine cach...