Chapitre 22

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Un hurlement strident retentit dans les jardins de l'université. Le mien. J'ai tout de même attendu de sortir des couloirs pour ne pas déranger les classes. Des étudiants se retournent à mon passage, perplexes, et j'attire également l'attention d'un grand mec musclé aux cheveux châtains. Tristan. Il hausse un sourcil en me voyant courir et crier, tout en me battant avec les graviers au sol pour ne pas déraper. Dans une sorte de réflexe, il se prépare à me prendre dans ses bras pour finalement s'apercevoir que je ne le vise pas lui, mais Aya.

Nous nous heurtons violemment et manquons de rouler dans l'herbe. Elle m'enlace par automatisme, bien qu'elle mette un instant pour interpréter mon geste. Aya recueille rapidement les indices : un sourire débile, une joie immense dans la lueur de mes pupilles, mon cri aigu, ma course déjantée jusqu'à eux... Elle a un hoquet de surprise et s'exclame :

— Non ?! Non ! Ne me dis pas que... T'as gagné ton pari ? Non ! Ben, s'il te plaît ?

Ben arrive à ma suite, moins excité, mais tout aussi souriant. 

— J'ai bien peur pour toi qu'il ait remporté votre pari.

Et il pivote vers les autres, nos deux sportifs et Malik, qui essaient de démêler le contexte de cette situation. 

— Lou flippait à l'idée d'avoir raté ses partiels et Aya a voulu le rassurer avec ce pari. S'il obtenait un minimum de treize sur vingt dans toutes les matières ou qu'il devenait le meilleur de notre groupe, elle lui offrait un cadeau de son choix. 

— Et donc ? Tu as eu que des treize ou...? s'enquiert la jeune femme.

— Les deux ! Je suis officiellement, pour ce semestre, celui qui a reçu les meilleures notes dans tout notre groupe, voire dans toute notre promo d'après ce qu'a sous-entendu notre professeure de civi' américaine. 

— Ça va les chevilles ? raille Malik. Ne prends pas trop le melon ! 

— Autorisez-moi une petite crise d'orgueil et d'ego, et peut-être que je retrouverai une certaine humilité plus tard. Je suis trop con-tent !

Je daigne relâcher Aya, non sans sautiller et gigoter dans tous les sens, incapable de maîtriser mon soulagement. Mes parents m'ont bien répété que les professeurs au premier semestre notaient moins sèchement qu'au fil des années, ils m'ont également prévenu que ces notes poseraient une base cruciale, servant notamment à vérifier notre niveau post-lycée et déterminer nos avantages ou nos difficultés, nos aisances ou nos retards. Je suis ravi que mon travail ait payé ! J'ai toujours donné ma vie aux études, je ne vis que pour enseigner ensuite. Voilà plus d'une décennie que j'ai prévu dans les moindres lignes mon plan de carrière, je ne peux plus faire machine arrière en licence. 

— Je suis fier de toi, Lou.

Mon attention se repose sur Tristan. Son sourire attendri me fait louper un ou deux battements de cœur. Il m'ouvre à nouveau ses bras et je m'y plonge cette fois. Malik et Aya bloquent là-dessus, yeux écarquillés, des mines interrogatrices ; même Sébastien semble se demander depuis quand et comment nous avons franchi des étapes dans notre relation qui, pour eux, demeure au stade de l'amical. Seul Ben jubile. 

— Ne t'inquiète pas, glissé-je à Aya, je ne compte pas te ruiner. Que penses-tu d'un...un goûter à la cafet' ? N'importe quand dans l'année.

— Ça m'va ! Par contre, vous allez nous expliquer pour...?

Elle nous pointe d'un doigt inquisiteur. Je me détache de Tristan et m'assois dans l'herbe sans répondre. Comme s'ils étaient pendus à mes lèvres, mes amis s'abaissent chacun leur tour, à la hâte, pour en venir au fait. Je glousse, alors que Malik s'agite, impatient.

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