Chapitre 12

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Après cet après-midi des plus mémorables au marché de Noël, des illuminations par dizaines ont dansé dans mes rêves. Tristan y est apparu, chevauchant son cheval blanc, venant au secours de la demoiselle en détresse – pour laquelle j'avoue avoir éprouvé une once de jalousie, alors qu'elle n'était que le fruit de ma propre imagination, de mes propres désirs. 

A été décidé ce matin que nous passerions la journée complète au lac. La moitié d'entre nous souhaitait juste du calme, un moment tranquille au bord de l'eau pour nous reposer aussi bien sur le plan physique que mental ; les autres, incluant Ben et Malik, auront largement de quoi s'occuper. Par conséquent, j'ai proposé à Nathan de nous y retrouver, ce qu'il a accepté avec joie. 

C'est ainsi que nous nous rejoignons tous à la barrière de bois ravagée par le temps. Nathan est entouré de ses camarades d'ennuis de l'hôtel, ceux-là même qui saluent chaleureusement Ben en le voyant arriver. De toute évidence, mon ami leur a fait grande impression à la boîte de nuit. Ils connaissent déjà Aya et ont entraperçu Malik, lorsqu'il draguait sa jolie blonde. Les autres se présentent. Tristan fournit un effort immense pour paraître avenant, mais, malgré son sourire qui se transforme vite en une grimace froide, il ne parvient qu'à inspirer un détachement total du moment présent. Je ne m'attendais pas à mieux de sa part, ça me tire un gloussement que je masque derrière un faux bâillement.  

— Je ne me souviens pas tout à fait de ce qu'il s'est passé vers la fin, déclare tout à coup Nathan, s'étant glissé derrière moi sans que je ne le remarque. Ce Tristan, c'est ton petit-ami ou pas ?

Par réflexe, je roule des yeux, le bousculant doucement sous son ricanement.

— Je ne t'aurais pas parlé, ni n'aurais pris ton numéro si j'avais un petit-ami.

— Donc..., j'ai toutes mes chances ?   

J'ai oublié combien il se montre direct et attaque fort. Mes joues rougissent contre mon gré, lui donnant sa réponse. Nathan semble jubilé, mais ne renchérit pas, conscient de mon agitation interne. 

Nous nous avançons vers le lac, emmitouflé dans nos manteaux. La neige recouvre les montagnes décharnées de leurs arbres verdoyants qui ne réapparaîtront qu'au printemps. Aucun d'entre nous n'a besoin de toucher l'eau pour discerner sa température glaciale. Nos doigts gelés protégés par nos gants, ce froid n'est pas désagréable, loin de là. Il revigore, au contraire. Quelques sportifs tenaces se réchauffent en courant, des couples et des personnes âgées surtout défilent avec leurs chiens et une ribambelle d'enfants jouent trop près du bord, grondés gentiment par leurs parents. 

Nous marchons une partie de la matinée sur le chemin bétonné. Aussi étonnant cela soit-il après coup, Nathan et moi restons ensemble tout au long de la balade, nous errons à l'écart, partageant nos vies, des anecdotes. Je manque de tomber par terre sous le joug d'une hilarité incontrôlable à l'une de ses histoires d'enfance. Le feeling passe tellement bien que je ne me soucie pas du temps qui file. Mes amis me jettent parfois des œillades très peu subtiles, des rictus goguenards que j'ignore. Même mes sentiments obsessionnels pour Tristan ont l'air de s'effacer. 

— Si Monsieur voudrait bien mettre en pause ces roucoulades pour nous aider, ce serait apprécié !

Ses potes s'esclaffent à la remarque d'un grand blond, Pierre, et le rouquin écarquille de gros yeux, s'octroyant un air menaçant qui les amusent d'autant plus. 

— Je reviens dans une minute. 

Bien sûr, mes amis n'ont rien loupé de cette plaisanterie. Je me détourne pour ne pas me confronter à leurs mines narquoises et patiente devant l'étendue d'un bleu glacier. Cependant, je ne demeure pas seul très longtemps, puisque trois adolescents gagnent les lourdes pierres qui parsèment le bord du lac, où je me tiens. Pierre, Ludo et...je ne suis pas sûr...Matthieu ? Mathéo ? Peu importe, ils arborent des expressions figées dans leur euphorie, je hausse un sourcil d'instinct, m'interrogeant sur leur idée derrière la tête en m'encerclant de la sorte. Celui dont le prénom m'est incertain lance la conversation :

Sunshine ProtectorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant