Costume-cravate, ce serait un brin exagéré, non ? Faudrait-il avoir un costume sous la main pour en porter un. Et une cravate. De toute façon, je ne vais pas rencontrer les Beaumanoir, pas dans le sens premier de ce mot, puisqu'ils me connaissent déjà depuis longtemps. Et puis, ce n'est pas comme si ma relation avec Tristan devait influencer mes retrouvailles avec ses parents. Nous ne sommes pas ensemble techniquement, puisqu'aucun de nous n'a posé un terme sur ce que nous sommes. Pas de pression. Tout va parfaitement bien se passer.
J'enfile mon jeans le plus uniforme, sans le moindre trou, des converses classiques et un pull tout doux noir. Rien d'extravagant, une tenue banale et qui m'octroie une aura sage. Ça ne m'empêche pas de stresser un peu. Je n'ai pas revu ses parents récemment et à l'époque, Ben m'invitait chez eux pour jouer à la console. J'étais l'ami de la famille. Pas le garçon que leur fils apprécie. Ça change tout et rien, à la fois. Mon portable vibre tout à coup, m'extirpant de ma torpeur. Mon meilleur ami. Je décroche et m'écrie :
— Tu appelles à point nommé !
— Je me doutais que tu paniquerais, ricane-t-il. Détends-toi, Lou. Ils t'adorent. En plus, depuis mon coming-out raté auprès de mes parents, ils me considèrent plus ou moins comme leur propre enfant et ils sont très reconnaissants envers Tristan et toi pour avoir pris soin de moi pendant cette période compliquée. Leur image de toi ne pourrait pas être meilleure.
— À moins qu'ils apprennent que je bave obsessionnellement sur leur fils depuis des années !
Ben éclate de rire.
— N'importe quoi. Ils t'accueilleront à bras ouverts. Je te signale qu'ils ne sont pas mes parents.
Je perçois une pointe de tristesse dans sa voix.
— Tu as raison. Vous avez de la chance de pouvoir compter sur eux, tranché-je. Tout se déroulera bien. J'y vais, je les salue, on fait la discussion, je gratte ses chats et je repars. Rien de plus simple.
— Il te reste combien de temps ?
— Tristan...
Pour répondre à sa question, la sonnerie de mon appartement retentit.
— ...est là.
— Respire, Lou, tu gères !
Et il raccroche sur-le-champ pour m'éviter une tirade affolée. Je récupère mon manteau beige et mes clés. Tristan patiente tranquillement et sourit en voyant ma tenue ; lui ne s'est pas gêné pour mettre un combo gros pull et jogging épais. Je le reluque de haut en bas, sourcils froncés. Il suit mon cheminement de pensées, mais ne commente pas. Il me présente plutôt son bras pour que je glisse une main. Dans la voiture, un silence, calme de son côté et agité du mien, plane au-dessus de nous. Nous roulons dix minutes, une demi-heure, trois quarts d'heure et je ne tiens plus :
— Tu aurais pu faire un effort, quand même. On dirait que tu te rends à ta salle de sport.
— Je n'ai pas envie que mes chats collent leurs poils sur des vêtements que j'aime bien. Qui plus est, j'ai traversé toutes mes phases et mes parents ont vu s'enchaîner tellement de styles différents qu'ils s'en fichent de mon apparence. Tu m'as l'air stressé, non ?
Son ton railleur me fait bêtement lui tirer la langue, geste qui l'amuse.
— Ne t'inquiète pas, ils partiront vite.
J'acquiesce par automatisme, mais m'étrangle avec ma salive. Comment ça ? Pourquoi est-ce qu'ils partiraient au juste ? Je n'ai pas le loisir de lui poser cette question, puisque nous atteignons la demeure des Beaumanoir. Clairement, leur nom de famille leur sied à merveille. Je me retrouve au pied d'une bâtisse en vieilles pierres, sur trois étages, avec une cour à l'avant, composée d'une terrasse et d'un petit jardin, ainsi qu'une autre cour à l'arrière que nous devinons et qui s'étend plus loin, bien plus vaste. Je parie qu'ils ont une piscine.
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Sunshine Protector
RomanceLou Lagarde est un véritable rayon de soleil. Tous ses amis le pensent et ils l'adorent. Il aime les fraises plus que tout et se bat pour défendre la saveur menthe-chocolat. Etudiant en licence d'anglais, sa vie parait idéale. Mais, le sunshine cach...