☼ Chapitre 21 : De l'eau dans le gaz ☼

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Point de vue de Marquinhos

Pendant qu'Ester doit profiter d'un agréable moment en compagnie de son aîné et de sa famille nombreuse, j'accueille chez moi Neymar, mon ami brésilien.

Pour l'occasion, j'ai demandé à ma femme de se promener au parc avec les enfants pour que l'on soit tranquilles tous les deux. Et, bien qu'elle n'ait été guère enchantée, elle a fini par accepter. Je remplis nos verres de quelques millilitres de sirop de cerise auxquels j'ajoute de la limonade. Je les dispose sur un plateau et emmène le tout sur la table de la terrasse. Neymar choisit cet instant pour se garer dans la longue allée de graviers devant la maison. Avec souplesse, il s'extrait de son véhicule et, lunettes de soleil Dolce & Gabbana arborées fièrement sur le nez, me rejoint aussitôt.

Situés près des bâches transparentes qui nous protègent des rafales de vent vivifiantes de l'hiver, les chauffages d'appoint font d'ores et déjà des miracles. On se croirait sous les tropiques.

Comme à son habitude, Neymar me salue d'une accolade fraternelle. Puis, il prend place face à moi à la table de jardin. C'est si bon de pouvoir compter sur quelqu'un qui vient du même pays que nous lorsque nous vivons à l'étranger. Mine de rien, ça rapproche, ça tisse des liens comme une araignée le ferait pour sa toile.

Assoiffé, il avale déjà quelques gorgées du diabolo que j'ai servi.

— Ça fait plaisir de te voir, Ney'. Ailleurs que sur un terrain pour un entraînement ou un match j'entends.

— J'avoue. Plaisir partagé. Et je ne te cache pas que sortir de ma tanière ne me fait pas de mal. Je n'en peux plus. J'ai une période compliquée.

— Oh mince. Je suis heureux de t'aider à t'évader. Un problème avec Ester ?

— Non, du tout. Au contraire, je pense à autre chose quand je suis avec elle. C'est Bruna.

Le silence qu'il laisse planer après avoir révélé son prénom ne me dit rien qui vaille. Ses sourcils froncés qui font apparaître une ridule sur son front et sa mine renfrognée non plus.

J'ai cru comprendre que depuis qu'ils se sont remis ensemble, il y a de l'eau dans le gaz. Neymar regrette d'avoir donné une deuxième chance à leur couple. Mais que va-t-il m'annoncer ? Rien de grave j'espère. Pas son cadavre à cacher dans des bois effrayants près de Paris ? Malgré mon teint basané, je me sens pâlir. Et s'il avait commis l'irréparable en étant bien poussé à bout ?

Non, je me fais des films. Je dois me calmer. Reprendre une respiration régulière. Empêcher mes mains de trembler. Contrôler les battements de mon cœur affolé.

— Tu veux en parler ?

Pourquoi j'ai dit ça ? Et si je me retrouvais complice en entendant ses révélations ? Et s'il y avait des preuves accablantes contre moi alors que je ne suis pas intervenu ? Je ne veux pas croupir en prison loin de mes enfants !

— On dirait que tu as vu un fantôme. Ça va, Marqui ?

Avec vivacité, je hoche la tête à plusieurs reprises. Neymar doit me prendre pour un cinglé. Peut-être qu'avec un peu de chance, il m'épargnera pour cette raison.

— Bruna m'a annoncé qu'elle était enceinte peu après le Nouvel An. Je sais qu'elle l'a fait exprès pour mon argent, pour ma notoriété. Je ne suis pas dupe.

— Ce bébé n'est pas le fruit de votre amour ?

— Je viens de prendre conscience que je ne l'ai jamais réellement aimée alors non. Je tolère sa présence, c'est différent. Elle sait que si l'on vient à se séparer, elle bénéficiera d'une pension très correcte. Elle sera à l'abri du besoin à vie. Depuis que l'on s'est mis ensemble, elle a gagné quatre millions d'abonnés sur Instagram. C'est parfait pour elle qui est influenceuse...

— Mais et votre rencontre ? Ce n'était pas réel ?

— C'était un coup monté. Je l'ai cuisinée et elle a fini par avouer. Tout était calculé.

— Comment ça ?

— Elle s'est arrangée pour me croiser à Ibiza pendant mes vacances. Elle a feint la surprise alors que son plan était échafaudé depuis plusieurs années. Je me suis fait avoir comme un bleu. Ester m'avait exprimé ses doutes à l'époque. Je ne l'avais pas crue. Et bien j'aurais dû. Elle sent quand il y a anguille sous roche.

Je dois l'avouer : je suis soulagé. Pas de meurtre à l'horizon. Tout va bien. Je suis innocent.

— Ester est au courant ?

— Surtout pas. J'ai peur de la décevoir et de la perdre. Je me retrouve bloqué. Bruna sait que j'ai une réputation à tenir. Je ne peux pas la mettre à la porte pendant qu'elle porte notre enfant. Elle me regarde donc la bouche en cœur dès qu'elle en a l'occasion. Je lui en veux tellement.

L'air embêté, je le scrute. Il semble vraiment désemparé. Ses épaules voûtées ne sont pas le reflet du Neymar que je connais. Il se tient toujours le dos droit, le menton haut tant il est fier, le torse bombé lorsqu'on le complimente sur sa technique incroyable.

Là, il paraît fragilisé par cette épreuve, menace de s'écrouler à tout moment si je ne choisis pas la phrase impactante qui pourra le remettre sur pied, le rassurer.

— Ce n'est pas non plus au beau fixe avec ma femme. Nous avons fêté l'anniversaire de ma fille il y a peu et c'était tendu entre nous.

— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? s'enquiert-il, sautant sur l'occasion pour changer de sujet.

— Elle est fatiguée de devoir tout gérer. Je lui ai expliqué que je ne décidais pas de mes absences, des déplacements avec l'équipe, des matchs de la saison mais elle n'a rien voulu entendre. Elle en a vraiment sa claque.

— Elle ne comprend pas que c'est ta passion, que tu ramènes de l'argent pour leur offrir un train de vie plus que convenable ?

— Je ne crois pas. Elle estime que je ne suis pas assez présent pour les enfants, que notre vie de famille s'effrite et que je suis le seul responsable.

— Je suis désolé pour toi, Marqui. Je sais à quel point tu l'aimes. Tu penses que tu peux arranger les choses entre vous ?

— Je ne suis pas sûr. Même avec toute la bonne volonté du monde... Prie pour moi.

— Je le ferai. Et tiens moi au courant, d'accord ?

— Toi aussi mec.  

Passion au stade {PSG}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant