Chapitre 28

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SCLADRIS

Il fait nuit, désormais. Je traverse quelques rues, où se mêlent le froid et le calme de l'hiver... Arrivé près de la fosse, je l'aperçoit. Je m'approche. La lune laisse apparaître ses mèches blondes, là où la couleur bleu, artificielle, s'est délavée. Elle sourit. Je ne sais plus vraiment  si je suis réellement sorti de la chambre virtuelle ou si tout ce qui m'entoure, si JOY, n'est qu'illusion.

- Comment as-tu su que j'étais là-bas, murmuré je.
- A vrai dire, je savais que tu avais été remplacé par un robot, mais c'est surtout Seldan qui m'a aidé pour te retrouver... D'ailleurs... Tu sais où il est ? Il ne répond plus, s'inquiète-t-elle, en désignant son oreillette.
- On... on avait qu'une seule paire de patins... alors il m'a dit de les prendre et de te rejoindre ici. Mais d'après ce que j'ai compris, il y a des rebelles qui vont aller le délivrer.
- C'est faux... Je... Scaldris... Personne ne va le délivrer.
- Quoi ? Mais on peut le faire, nous !
- Tu sais bien que c'est impossible.
- Alors qu'est-ce qu'on fera ?

Dans son sourire triste, je lis l'envie de partir, loin. Nous allons fuir, vers un monde meilleur, puisque le notre refuse de changer...

- Où ? Où veux-tu qu'on aille ?
- Ça m'est égal... Je... je pensais que, si on y croyait vraiment, on pouvait tout changer, mais peut-être que c'est faux. Peut-être que ce monde plus grand, plus juste, que j'espère, je ne le trouverai pas. En tout cas pas ici. Alors je veux partir. Avec toi. C'est sûrement lâche de ma part, un peu absurde, aussi, je crois. On ne peut pas tout changer juste parce qu'on le veut. Et peut-être que, finalement, tout ce que je veux... c'est être près de toi. Partons, tout de suite, par le quartier banni, comme l'a fait Seldan il y a quelques années. Je veux avoir le droit de choisir, de devenir ce que je veux. De pouvoir rêver, sans en payer le prix. D'aimer, et de pouvoir le dire, sans qu'Ils m'entendent. D'être différente sans être jugée. Je voudrais... non, ce n'est pas un souhait, c'est un besoin. J'ai besoin... de vivre.

Je lui sourit. Je crois que je comprends. Cette envie de bouger, de changer, d'hurler même, je la garde, au fond de moi, depuis l'enfance. La lune se reflète dans son regard. Nos doigts s'emmêlent.

- Alors... on s'en ira ? Cette nuit ?

On s'embrasse. Pour de vrai cette fois, je le sens. L'illusion de l'autre jour, cette fille virtuelle, paraît si différente de JOY, que ni les robot ni les écrans, ne pourront jamais remplacer.

- Cette nuit, dis-je dans un souffle.

Sa main se referme sur le mienne, et nous partons, vers un monde parfaitement inconnu. Un ailleurs incertain. Qui sait ce que nous trouveront, là-bas ? Un monde cent fois meilleur ? Ou au contraire, un monde où règne la terreur ? Mais je ne veux pas y songer. Car où qu'on aille, je sais que nous serons tous les deux. Nous arrivons  enfin à la frontière : juste un vieux mur, délabré par le temps. Nous le franchissons. Et soudain je sens que plus rien ne sera jamais comme avant.

Pour quelques mots qu'ils pensaient si fortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant