Pour quelques mots qu'ils pensaient si fort

Chapitre 31

LYD

Cela fait une semaine, depuis que le livre a été publié. Des responsables sécurité sont venus me voir, afin de me faire parler. Comment m'étais je retrouvée en possession du livre ? Mais à vrai dire, ils le savaient déjà. Et c'est un peu tard maintenant : tout le monde a connaissance des photographies postées sur internet. Et tout le monde souhaite la Grande Rébellion. Puisque je suis enfermée dans ma chambre, c'est vrai que c'est difficile de savoir ce qu'il se passe à l'extérieur. Cependant, je peux voir régulièrement des manifestations dans la rue. J'ai d'ailleurs entendu dire que certaines personnes ont été libérées de prison par les rebelles. Je ne savais même pas qu'on était si nombreux à penser la même chose. Jamais je n'aurais cru possible que des gens osent hurler leurs idées dans la rue. Je ne sais pas bien où tout ça nous mènera. Est-ce que les rebelles vont prendre le pouvoir ? J'ai beau penser que leurs idées, que leurs valeurs sont identiques aux miennes, ça me paraît absurde. Vouloir un pays juste, respectueux des droits et de la liberté d'expression... en faisant un coup d'état !? Il parait que presque tous les responsables sécurité se sont réunis en zones A et B afin de maitriser les manifestations et d'éviter une prise de pouvoir par les rebelles. J'entends des cris. Qui se rapprochent de plus en plus de ma chambre, ça faisait longtemps. Ils... ils m'appellent ? Je me lève et je sors de ma chambre. Soudain, trois personnes apparaissent dans le couloir. Mes parents sont là, suivis d'une jeune femme aux cheveux roux.

- LYD ! Enfin te voilà, s'exclame ma mère, bouleversée. Je... les rebelles nous ont libérés, il était temps, notre procès aurait dû avoir lieu demain ! Alors... on est venu ici. Pour te sortir de là. La Grande Rébellion a commencé : ça y est, on va enfin connaître un monde meilleur !

Derrière, la jeune femme commence à s'impatienter :

- Bon, je dis ça, je dis rien, hein, mais si on reste là trop longtemps je suis pas sûre qu'on puisse partir sans se faire repérer.

Papa acquiesce et nous nous dirigeons d'un pas pressé vers la sortie de cet horrible bâtiment, dans lequel j'ai passé deux semaines loin de ma famille, ce qui, dit comme ça, n'a pas l'air bien grave. Mais en vérité, l'attente des résultats du procès de mes parents, le fait de ne pas savoir où était JOY, tout ça... J'ai bien cru devoir rester là toute ma vie.

Nous sortons. Dehors, des enfants sont réunis, libérés eux aussi par des rebelles.

- Le rassemblement des rebelles a lieu dans le quartier banni, m'explique maman.
- Où est JOY ?
- Euh... elle s'est enfuie, il y a une semaine. On ne sait pas encore où elle est. Mais, tu sais, je crois qu'elle est heureuse. Elle n'est pas partie toute seule, il y avait aussi Scaldris, le fils d'anciens rebelles avec qui ton père et moi avons fait la rébellion de 2231.
- C'est lui qui a écrit le livre avec JOY ?

Elle sourit. Dans les yeux de mes parents, je vois qu'au fond, même s'ils ont dénoncé les rebelles lors de la première rébellion, ils ont longtemps rêvé de ce jour.

Et moi, je sais que je me souviendrai toujours. JOY, Scaldris, Seldan, et tous ces autres que je n'ai jamais connu.

Disparus pour la vérité.
Disparus pour la liberté.
Disparus pour quelques mots qu'ils pensaient si fort...