Une âme ne peut pas mentir. C'est comme ça. Lorsque vous êtes dans votre enveloppe corporelle le mensonge est possible. Certains en usent d'ailleurs trop. Mais lors de votre mort, vous n'avez plus cette protection. Votre âme est mise à nue. En tant qu'accompagnateur, nous voyons votre parcourt de vie, nous savons donc qui vous êtes au plus profond de vous.
J'ai eu l'occasion d'accompagner des âmes de personnes peu recommandables. Des êtres de la pire espèce. Lorsqu'ils se rendaient compte que les mots qu'ils voulaient me faire croire n'étaient pas ceux que j'entendais, j'avoue avoir pris plaisir à les voir paniquer. Au début on s'en délecte, après c'est plus sport. Un animal sauvage c'est dangereux, mais ça l'est encore plus quand ils sont acculés. Une personne qui a l'habitude de mentir et de tromper est prise au piège lorsqu'elle est mise à nue.
Je me réjouissais de leur déchéance. Je les regardais partir en vrille, puis quand la panique était trop intense ils s'en prenaient à moi ou ils essayaient de fuir, parfois les deux. Ma faute évidemment. A ne rien leur dire, je ne leur expliquais pas non plus que je n'étais pas le juge de leur existence. Dès qu'ils savaient que je n'étais là que pour les accompagner vers leur nouveau destin, en général, ils se contentaient de fuir. C'est plus facile à gérer et moins fatiguant.
Enfin, moins fatiguant... Tout est relatif. Vous avez déjà tenté de suivre une âme qui veut rester sur terre ? Non, parce que moi si. On peut passer des jours derrière eux à tenter de les approcher. Par la ruse, par le dialogue, par la rapidité. Sachez donc que je ne suis pas rapide, et rappelez-vous que je ne suis pas bavard. Donc oui, il m'est arrivé que ça prenne plus de temps que prévu.
Évidement si les âmes que nous transportons ne peuvent mentir, la réciproque est vraie. A mon grand désarroi parfois. Voilà aussi pourquoi je parle peu. J'ai parfois vexé certains de mes collègues au début de ma carrière. Je préfère donc m'abstenir de communiquer. Treize adore quand je lui raconte mes derniers échanges un peu mouvementés.
— Vingt-cinq !
Ça c'est un membre du Bureau. D'habitude quand j'emmène une âme, ils me regardent à peine. Ils sont tous penchés sur leur dossier a analyser, calculer et vérifier que tout va dans le sens qu'ils veulent. Ils ne s'intéressent pas aux accompagnateurs, seule l'âme mérite leur attention. Pour qu'il y en est une qui veuille s'entretenir avec moi c'est que...
— Mission spéciale, lance t'elle à la cantonnade.
Tiens ! J'aurai pu mettre ma main a couper. C'est mauvais les missions spéciales en général.
— Tu feras équipe.
Elle marque un temps de pause et grimace en relisant le nom qui apparait sur son ordre de mission.
— Avec Quarante.
C'est dommage, je passais une bonne journée jusqu'ici.
— Pour les détails, vois directement avec lui. Il était là il y 10 minutes, on lui a tout dit. Il doit t'attendre maintenant.
Elle me tourne le dos sans attendre de réponse de ma part. Avec les personnes du Bureau, pas besoin de parlementer. Ils décident, ils annoncent, on exécute. Point. Parfois c'est frustrant comme maintenant. Bosser avec Quarante ! Nous ne nous entendons pas vraiment et il est déjà sur place, je vais donc encore pouvoir entendre des reproches. Notre relation n'est pas prête d'aller en s'améliorant.
Pour rejoindre Quarante j'ai simplement à penser à lui et j'apparais à ses côtés. Pratique. Sauf quand on ne veut pas être entouré. Cette façon de nous déplacer m'a valut quelques mauvais tour quand je voulais être seul et que Treize en avait décidé autrement. Les vivants ont tendance à imaginer qu'après la mort, leur existence sera faite de solitude. Pas si vous avez un Treize dans votre entourage, et c'est dans les moments ou l'on a un grand besoin d'isolement que tous le monde vous rejoins sans chercher à vous demander si vous le voulez ou non.
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Il est temps.
FantasyMonotonie, ennui et lassitude. Voilà ce qui rythme sa vie. Bien qu'il ne soit pas vraiment... en vie. Vingt-cinq, un accompagnateur, est l'un des milliers a transporter les âmes après leur trépas. Son travail l'occupe mais il n'en tire ni gloire, ni...