14.

27 4 0
                                    

Mya n'est pas une grande bavarde. Elle ne m'a jamais assommé de paroles superflues. Les phrases qu'elle construit sont toutes réfléchies et pensées intelligemment. Donc si elle m'annonce qu'une couleur violette entoure ma personne, alors une couleur violette m'entoure. Même si je ne suis pas convaincu par cette information. Surtout que, depuis qu'elle m'a dit cela, Mya me regarde les sourcils froncés, les yeux plissés et les lèvres closes. Quant à moi, je tourne et retourne mes mains dans tous les sens afin de tenter de voir ce qu'elle a pu apercevoir de moi. Mais ma main n'est pas plus différente que la minute précédente.

—    Je ne me souviens pas avoir déjà vu ça avant, finit-elle par me dire. Ou alors je n'y ai tout simplement pas fait attention.

—     Tu penses que c'est quoi ?

Ma question reste sans réponse. Mya continue à m'observer pendant un moment. De haut en bas et de bas en haut. Elle analyse les contours de mon corps, comme fascinée par sa découverte. Puis elle semble se réveiller et part en trombe dans sa chambre. Lorsqu'elle revient, elle tient un ordinateur portable dans sa main.

— Je dois regarder sur internet. Je ne dois pas être la seule dans cette situation, m'explique t'elle en posant l'appareil sur sa table basse. J'aurai du y penser avant.

Elle l'ouvre et l'allume tout en tapotant des doigts sur le plateau de sa table en signe d'impatience. Elle continue tandis que son appareil émet un bruit de soufflement.

—    Internet regorge de toute sorte d'individu. Je dois juste trouver un médium, ou quelque chose comme ça.

—    J'ai croisé un tas de personnes qui se disaient médium, et le jour où ils me rencontraient, ils ne faisaient pas les malins, grommelé-je.

Mya lève les yeux au ciel sans prendre la peine de me répondre. Elle finit par tapoter sur les touches de son ordinateur. Elle tape, lit, tape à nouveau, s'arrête. Son manège dure un trop long moment à mon goût. Je finis par perdre patiente et quand j'ouvre la bouche pour lui dire de laisser tomber, que les médiums et autre personne extralucide n'existe pas, elle me coupe dans un cri :

—    Elle !

Je contourne sa table et me place à côté d'elle. Mya penche un peu plus l'écran pour que je puisse voir pour que je n'ai pas à me pencher. Je vois sur l'écran un site en fond noir et violet foncé avec pleins d'étoiles et de lunes. C'est à mon tour de lever les yeux au ciel tout en marmonnant un « cliché » entre mes dents. Elle fait descendre la page où je peux lire « Vivienne Lacours. Médium, cartomancienne, astrologue. Tout savoir, tout apprendre, tout comprendre. Seulement sur rendez vous. » Un encart laisse deviner que le rendez vous doit se prendre en ligne. Une photographie accompagne ce petit texte. On y voit une femme, d'une cinquantaine d'année, sourire. Elle porte un foulard d'où laisse s'échapper des boucles châtaines courtes. Ses yeux marron sont grossièrement entourés de khôl noir et bleu. Une multitude de lourds colliers ornent son fin cou. Comme le site, l'autrice m'a l'air tout à fait cliché. Je fronce le nez, peu convaincu.

—    Pourquoi elle ?

Mya hausse les épaules.

—    Pourquoi pas ?

Elle clique sur le lien pour prendre un rendez vous.

—    On a de la chance, elle est disponible demain après midi.

—    Quelle chance, grincé-je.

Mya pince les lèvres et lève le regard vers moi. Elle plante ses yeux dans les miens.

—    Fais moi confiance, assène t'elle d'un ton qui ne laisse place à la discussion.

Je hoche la tête comprenant qu'un refus n'est pas admis. Et puis, je ne suis pas en mesure de refuser, quoi qu'il arrive, je lui fais confiance.

Il est temps.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant