Chapitre 3

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     Quand je vois sa tête devant moi je me sens automatiquement rassuré. Mais la réalité revient trop vite. Je me rappelle qu'il a sûrement entendu ces rumeurs sur moi.

     Je recommence à respirer vite et à avoir chaud... non pas encore.
— Eh c'est bon je suis là, calme toi, respire comme moi, dit-il en posant sa main sur la mienne. Voilà c'est ça. Il s'est passé quoi pour que tu sois dans cet état là ?
— Je... euh... J'inspire profondément. Ils t'ont dit ?
— Hein ? Dis quoi ?
— Bah euh à propos de moi... et de mon... père.

     J'essaie de retenir les larmes qui menacent de couler à la simple prononciation de ce mot.
— Ah ouais euh... oui ils m'ont dit deux ou trois trucs, dit-il en se baissant légèrement la tête. 

— Et t'as appris quoi ?

     Quelques larmes traîtresses roulent sur mes joues et je crois qu'Elyas s'en rend compte parce qu'il ressert sa main sur la mienne. Ça me donne des frissons que je ne saurait expliquer.
— Euh bah que ton père est en prison et que toi tu es comme lui, d'après eux... et ils m'ont dit de pas t'approcher. Peut-être que ça j'aurais pas dû te le dire... désolé.
— Ne t'inquiètes pas, j'ai l'habitude. Mais pourquoi tu m'a aidé s'ils t'ont dit ça ?

     Il réfléchit quelques secondes, comme s'il cherchait ses mots.
— Au début je croyais à leur truc bidon, et je suis vraiment désolé, mais quand je t'ai vu comme ça j'ai su que ce n'était pas la vérité. C'est vrai qu'en y repensant, hier tu étais toute la journée seul. Et je t'ai même pas vu à la cantine, tu étais où ?
— Euh je... j'avais pas faim...

     Je regarde sa main toujours posé sur la mienne. Il suit mon regard et en remarquant notre position, il la retire en se grattant l'arrière de la tête. Il fait beaucoup ça d'ailleurs. Je rougis un peu — pourquoi je rougis d'ailleurs ? — et je retire aussi ma main.
— Bon euh ça va sonner. Tu veux venir ou tu veux aller à l'infirmerie ?
— Non c'est bon t'inquiètes je viens.

     J'aurais bien aimé aller à l'infirmerie et rentrer chez moi mais je ne sais pas pourquoi, j'ai dis que j'allais en cours. Je suis vraiment trop bête. Pourquoi en plus ? Pour travailler pendant une heure et demi avec Elyas.

     Elyas. C'est un joli prénom vous trouvez pas ? Pourquoi je pense à ça moi d'ailleurs ? Je suis bizarre.

     On rentre dans la salle et on s'assoit à notre table. Je suis surpris qu'Elyas reste à côté de moi malgré ce qu'il m'a dit tout à l'heure. D'ailleurs, je remarque qu'il se prend plusieurs regards noirs de « la bande ». Je pense que vous voyez de qui je parle.

     Le prof nous distribue la feuille avec le texte et nous dit :
— Bon vous devez me faire un plan détaillé du texte en suivant la problématique écrite au tableau, puis vous devrez faire vos analyses et remplir votre plan. Vous ne rédigerez pas tout de suite mais ça sera à rendre pour lundi prochain rédigé ! Et c'est par deux. Pas besoin de se déplacer vous vous mettez chacun avec votre voisin de table.

     J'en entends plusieurs râler parce qu'il ne peuvent pas se mettre avec qui ils veulent mais moi ça me va d'être avec Elyas. Tu vas regretter de te rapprocher de lui. Il va te briser le cœur comme tous tes amis de l'année dernière.

     Encore ces voix. Malheureusement je les crois un peu. Mon cerveau se divise en deux : une partie qui me dit de devenir ami avec Elyas et l'autre qui me dit le contraire. C'est dur là haut...
— Bon t'as une idée de ce qu'on pourrait mettre ? me demande Elyas ce qui me sort de ma rêverie.
— Pour être honnête, je n'ai pas encore lu le texte...
— Quoi ? Mais tu le fixes depuis tout à l'heure ! Ça fait presque dix minutes, t'abuses !

     J'ai peur qu'il m'en veuille pour ça mais il se met à rire la seconde d'après. Je ne comprends pas trop mais je ris avec lui.
— Elyas et Adam, pouvez-vous faire moins de bruit s'il vous plaît. Contrairement à vous, vos camarades essaient de travailler !
— Désolé monsieur, répond Elyas.

     On se regarde et on se remet à rire. Ça faisait longtemps que je n'avais pas ri dis donc.

                                  ~•~

     À la fin du cours, je m'apprête à aller au gymnase pour le cours de sport quand je sens une main sur mon épaule. Je panique légèrement — juste mon cœur qui bat la chamade c'est rien... — et me retourne. Je vois Elyas qui me dit :
— Putain désolé si je t'ai fait peur, je ne voulais pas...
— Ne t'inquiètes pas, ça va, dis-je en m'efforçant de reprendre une respiration normale. Tu voulais me dire quelque chose ?

     Maintenant qu'on est face à face, je remarque notre différence de taille. Je ne m'en était jamais vraiment rendu compte, en même temps je ne le connais seulement depuis hier, mais il fait presque une tête de plus que moi.

     Je me sens un tout petit peu intimidé par sa taille pour le coup. S'il voudrait m'écraser comme une vulgaire fourmi il pourrait le faire !
— Adam tu m'écoutes ??
— Ah euh oui pardon tu disais ?
— C'est un peu toi qui m'a posé une question et t'écoutes même pas la réponse t'abuses.

     Allez, deux fois qu'il te dit que tu abuses t'es vraiment nul. Il ne voudras jamais de toi.
Ah, ces voix taisez vous pour une fois. Mais peut être qu'elles ont raison... je suis un bon à rien.
— Adam ! Mais t'en fais exprès ou quoi ??
— Désolé vas-y je t'écoute maintenant.
— Donc je disais pour la troisième fois que ça serait bien qu'on s'échange nos numéros pour ce putain de devoir en français !! dit-il en me criant dessus.
— Euh... je euh ok... dis-je sans retenir les tremblements dans ma voix.

     Je déteste quand quelqu'un me crie dessus ça me fait penser à mon père et... bref mieux vaut ne pas y penser.
— Désolé Adam, je ne voulais pas... je suis désolé c'est juste que ça fait trois fois que je te répète la même chose et... bref. Tiens, note ton numéro sur mon téléphone, ajoute-t-il en me le tendant.

     Je le prends d'une main encore tremblante, sous le choc des flashs qui apparaissent dans ma tête a cause du fait qu'Elyas ait haussé la voix.

     Je note mon numéro puis m'enfuis presque de lui. Je met mon casque sur mes oreilles et me dirige vers le gymnase.

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