Il était de retour dans ce vieil immeuble, celui dans lequel il avait eu cette horrible vision dans le miroir. Allongé sur le petit lit, Stiles avait les bras croisés derrière la tête. Il réfléchissait à sa vie, à ses conneries.
A la plus récente.
A cet acte charnel né d'un mélange de son impulsivité et de son désespoir. A ces étreintes passionnées, désespérées et d'une intensité qui l'avait laissé tremblant pendant des heures. Des heures passées dans les bras de Newt. A se serrer contre lui. A l'embrasser de temps à autres. A le chouchouter, comme s'ils étaient plus qu'amis. Comme s'il y avait quelque chose entre eux.
Il n'y avait rien. Rien de plus que des résidus de vie.
Stiles n'aimait pas Newt et Newt n'aimait pas Stiles.
L'hyperactif n'était pas dans quelque forme de déni que ce soit. Il était extrêmement lucide. Tout ça, c'était parce qu'ils avaient tous deux voulu ressentir un peu de plaisir et se donner un peu d'affection. Ce monde était merdique, et ils y mourraient – Newt avant lui. Car c'était ce qui arriverait, il le savait. Sa blessure guérissait trop lentement, lui prenait trop d'énergie. Un miracle qu'ils aient pu faire l'amour sans qu'il s'évanouisse.
Alors, dès lors qu'il l'aurait laissé, Stiles cèderait sans doute définitivement à la folie, celle contre laquelle il luttait déjà depuis quelques temps. Quoiqu'il n'était pas certain que cela soit une bonne idée. Sans compagnie, mieux valait mourir. Parce qu'il ne supporterait pas une solitude totale. Ici, il ne le pourrait pas. Comment s'y prendrait-il ? Il allait falloir qu'il commence à y réfléchir. Des manières de faire, il y en avait des tas, mais il n'aurait droit qu'à une seule tentative. Sauf s'il échouait – et ce n'était pas le but. En tout cas, la mort était sa seule issue, son seul moyen de quitter cet enfer aux allures de purgatoire.
Stiles n'avait pas honte d'avoir cédé à ce désespoir. Dans ce genre de situations, il valait mieux ne rien regretter, pour ne pas s'ajouter un poids supplémentaire. Pour être tout à fait honnête, il avait aimé ce moment avec Newt, même si ce n'était pas avec lui qu'il aurait aimé consommer sa première fois avec un homme. Il avait su comment s'y prendre par la force des choses, là n'était pas le problème. C'était juste... Que ça s'était passé, parce qu'il le fallait. Parce que Newt, comme lui, avait besoin d'un peu d'affection. Et puisqu'ils étaient parmi les derniers vivants de cet endroit, pourquoi pas ? Pourquoi pas profiter un peu de ce qu'il leur restait ?
Oui mais voilà, il fallait bien sortir. Sortir pour trouver des vivres – s'il en restait. Et Stiles en avait trouvé – un peu, trop peu. Il avait juste eu besoin... D'un peu de temps, avant de rentrer. Un moment pour être seul, pouvoir réfléchir sans avoir à maintenir une certaine attitude, un masque sur son visage. Ici, il n'avait pas à faire semblant. Il n'avait pas à prendre soin de qui que ce soit. Dans une heure, il y retournerait, en essayant de ne pas mourir sur le trajet. Il avait beau faire attention, il savait qu'il était entouré par la mort elle-même. Par des tas d'anciens humains, ces choses qui étaient autrefois des gens comme lui. Avant de mourir pour se réincarner en monstres, certains devaient être heureux, d'autres tristes, certains fous, et une partie... Les deux derniers à la fois, peut-être.
Stiles ferma les yeux. Se remémora des choses agréables. Les baisers, les caresses. Les râles de Newt. La manière dont ils s'étaient abandonnés l'un à l'autre. L'hyperactif aurait aimé faire ça avec Derek plutôt qu'avec un presque inconnu mourant. Mais il se consolait comme il pouvait en se disant qu'au moins, il disparaîtrait avec un dernier bon souvenir. Celui du plaisir de la chair. Sa première fois avec un homme. Un orgasme sur fond de dernière fois, de désespoir.
Stiles n'alla pas se branler sur ces souvenirs qui, bien sûr, le firent frémir. Parce qu'ils étaient bons. Parce qu'avec Newt, ça avait été chaud, passionné. Parce qu'ils s'étaient tout donné, sauf l'amour. Ça, c'était réservé à ceux à qui leur cœur appartenait et qui ne le sauraient sans doute jamais. Était-ce une mauvaise chose ? Peut-être pas. Stiles ne savait pas grand-chose de la relation entre Newt et Thomas. Enfin du moins, il ne connaissait que le point de vue du blond, qui avait résumé ça comme une amitié platonique. Forte et fusionnelle, mais platonique. De son côté à lui, eh bien... Pouvait-on parler d'autre chose que d'une alliance ? Ce qu'il entretenait avec Derek n'avait rien d'amical. Ils s'aidaient quand il le fallait, et ça s'arrêtait là. Stiles embêtait Derek. Derek grognait sur Stiles. Lui disait qu'il allait lui arracher la gorge avec ses dents. Ici, les gens mordaient effectivement souvent au cou en premier, mais c'était bien moins excitant qu'imaginer Derek le faire. L'hyperactif songea de manière étrange que, s'il avait su ce qui lui arriverait, il aurait peut-être titillé suffisamment l'ancien alpha pour mourir de ses mains à lui – ou de ses dents – avant de débarquer dans cet enfer.
Stiles finit par se dire que terminer sa vie ici n'était pas une si mauvaise chose. Aucun de ses proches ne le verrait mourir. Derek ne saurait jamais à quel point il était devenu si misérable... Si misérable en seulement quelques jours, et c'était tant mieux. Autant qu'il garde une image acceptable de lui. Celle d'un hyperactif agaçant mais qui, Stiles l'espérait secrètement, lui manquerait un peu. A cet instant précis, il ne pensa pas à la meute. En fait, il choisit de s'en abstenir. Sa vie actuelle était bien assez triste pour qu'il y rajoute l'aspect le plus déprimant : celui de savoir qu'en plus de ne jamais revoir celui qu'il aimait, il n'aurait pas non plus l'occasion de serrer ses amis dans ses bras. Scott, Lydia, Malia, Liam, Jackson... Même lui. Même revoir cet abruti de kanima égocentrique lui ferait un bien fou.
Alors non, Stiles ne songea pas à la meute, par peur de sauter le pas plus vite que prévu. Il ne savait pas à quel étage il était – il ne comptait jamais lorsqu'il montait – mais c'était suffisamment haut pour le tuer s'il décidait de se défenestrer. Et même si la chute ne le tuait pas sur le coup, il y aurait des morts pour venir l'achever. Terminer le travail qu'il n'aurait peut-être pas su faire.
Il se remémora encore et encore sa connerie... Parce qu'elle lui faisait un peu de bien. C'était égoïste, oui, mais pour une fois, Stiles avait envie de l'être.
Au départ, c'était juste une proposition. Un baiser, rien de plus. Il s'était dit que, puisque son visage torturait Newt... Il pouvait l'aider, juste comme ça. Et puis lorsqu'il s'était rapproché, Stiles avait commencé à comprendre ce que ressentait le blond... Oui, il avait compris ce que c'était, d'avoir près de soi quelqu'un qui partageait certains traits ou attitude avec la personne que l'on aimait. Alors forcément, ça avait dérapé. Ça avait été plus qu'un baiser. Oh oui, c'était une connerie, une belle connerie.
Et le pire, c'est qu'il ne regrettait rien. Ni le début, ni la fin. Il ne se sentait pas coupable. Était-ce le cas de Newt ? Il le saurait sans doute en rentrant. Ce matin-là, Stiles était parti tôt. Sans doute prendraient-ils le temps d'en discuter lorsqu'il rentrerait. S'il comptait réitérer la chose ? Non, ou du moins pas complètement. Dans un sens, il avait abusé. Newt avait été complètement ouvert et avait lui aussi désiré aller plus loin. Le problème se situait plutôt au niveau de sa forme. Stiles était conscient qu'il l'avait fatigué et il avait su, lorsque ça s'était passé, que Newt aurait été au-dessus s'il n'avait pas cette blessure. Il avait eu ce feu particulier dans le regard, et des gestes qui ne laissaient pas de place au doute. Il avait laissé Stiles prendre le dessus, parce qu'il se savait incapable de tenir le choc dans son état.Mais après ça, il ne pouvait pas ne plus rien se passer. Pas d'un coup, en tout cas. Un tel acte ne pouvait rester sans suite. Stiles ne pourrait pas passer près de Newt en faisant comme si de rien n'était. Alors oui, il y aurait sans doute de nouvelles étreintes, de nouveaux baisers. Parce que... Pourquoi pas ? Pourquoi pas s'accorder un peu d'affection pour le temps qu'il leur restait ? Ça ne coûtait rien, ne dérangeait personne – qui restait-il, de toute façon ? Enfin, si Newt lui disait qu'il n'en avait pas envie et que leur union charnelle lui avait suffi, Stiles le respecterait. Il l'appréciait beaucoup, même s'il n'avait pas passé assez de temps avec lui pour le connaître réellement – il savait qu'il n'en aurait pas beaucoup plus. Ils avaient discuté de leur vie respective, de leurs amours et d'un tas de choses, mais ce n'était pas suffisant. En tout cas, il avait bien l'intention de prendre soin de lui jusqu'au bout. Après tout, Newt ne l'avait-il pas pris sous son aile à son arrivée ici alors qu'il était lui-même blessé ? Dans un sens, Stiles lui était dévoué. Il en avait envie, et pas juste parce que ça payait sa dette morale.
Stiles tourna la tête vers la fenêtre, soudainement las. Le soleil était en train de se coucher.
Et son cœur, de lentement se préparer à mourir.
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Les passeurs
FanfictionStiles disparait subitement lors d'une mission de surveillance du Nemeton. Après que la meute ait trouvé un moyen d'accéder à cette balise du surnaturelle, l'on retrouve le jeune homme, inconscient. Lors de son réveil, c'est la confusion : il nie êt...