Enseigne moi la patience - Yandere Giorno

Chapitre 18 : La reine de coeur

Je ne me souviens même pas du trajet du retour. Tout ce que je sais, c'est que je n'aurais pas dû partir sans avoir récupéré ma cape.

Grelottante, je passe la porte de la villa et je file dans ma chambre. 

Ignorant le froid qui me transie, j'ôte ma robe et m'en vais m'enterrer dans le lit. En boule sous l'édredon, j'aimerais simplement m'endormir pour oublier. Mais dans l'obscurité étouffante de la couette, l'image de Giorno, non plus le jeune étudiant romantique, mais l'homme, le Don, vient me hanter :

Sa voix plus grave et plus masculine. Sa beauté virile et cruelle. Sa nonchalance arrogante. Son charisme décuplé par les années. Et enfin, son regard, acéré d'indifférence.

J'ai beau essayer de toute mes forces, il m'est impossible de verrouiller mes sentiments, d'échapper à la résurgence de mes émotions. Ma seule issue est encore de détourner l'attirance et la fascination par le prisme de la colère.

Oui, aussi fort que j'ai pu l'aimer, je ne peux désormais que le haïr !

Quatre ans qu'il hante mes fantasmes et mes cauchemars. Quatre ans que je lutte pour l'oublier, et lui, il ne se souvient même pas de moi...

Quelle putain d'ironie !

Ne m'a-t-il pas aimé au point de vouloir m'emprisonner à ses côtés ? Au point de me forcer à choisir entre lui et la liberté ?

Quel sombre connard !

On dit que le pouvoir change les hommes...

Maintenant qu'il a la main mise sur toute l'Italie, je suis persuadée qu'il peut se taper n'importe qui. Ça a du être un jeu d'enfant pour lui, de m'oublier dans les bras des plus belles femmes du pays !

Et dire qu'il a voulu que je lui baise la main... Il se prend pour la reine d'Angleterre maintenant ?!

Sale mafieux arrogant !

Je revois encore sa bouche, sensuelle et perfide, me répondre : « Navré mais non, votre visage ne m'évoque rien »... Qu'est-ce que je regrette de ne pas avoir eu la force de lui coller mon poing entre les dents !

Comment peut-il me faire ça ? Alors qu'il a ébranlé mes certitudes, chamboulé ma vie et détraqué mon corps !

Ce n'est pas juste...

Il faut qu'il se souvienne ! Il faut qu'il sache !

Oui, c'est décidé. Demain soir, je retournerai à son stupide palais. Et qu'il le veille ou non, je me rappellerai à son bon souvenir !

***

J-3

Parée des mêmes atours que la veille, plus remontée que l'horlogerie d'une bombe prête à exploser, je me faufile dans les rues au beau milieu de la nuit.

Tout à la fête, les rires et les murmures des carnavaliers n'amoindrissent en rien mon humeur massacrante. Et c'est le cœur gonflé de rancœur que je monte les marches du palais Giovanna.

Une fois dans la salle de réception, j'ai une subite envie de brandir mon briquet et de cramer les roses qui serpentent le long des colonnes pour que leur parfum entêtant se change en fumée.

Je fais le tour de la pièce, observe les alentours pour repérer Giorno, mais parmi la foule colorée et la profusion de costumes, autant chercher une aiguille dans une botte de foin.

Bredouille, je décide d'aller me désaltérer en attendant que le « Don » daigne se montrer.

Sans véritable surprise, arrimé à la fontaine de vin, j'aperçois la bauta. Je ne suis pas vraiment d'humeur à supporter ses discours de macho séducteur, mais avec un peu de chance, il pourra m'être utile.