Chapitre 8

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Prisonnière. Voilà ce qu'elle était. Les deux seules issues étaient verrouillées en permanence. Étant sous terre, la construction ne contenait aucune fenêtre. En revanche chaque millimètre carré était protégé contre les démons.

Aujourd'hui, pour la première fois, elle avait voulu marcher et n'entendant aucun son, elle avait pu visiter à loisir ce grand complexe. C'est ainsi qu'elle s'était retrouvée face à ces deux portes fermées à clés. Les seules qui conduisaient à l'air libre. Elle avait emprunté la première en arrivant avec les deux chasseurs. La seconde donnait sur le garage où à travers une vitre hublot elle découvrit des dizaines de véhicules anciens et tout au fond, ce qui semblait être une porte de garage basculante qui devait permettre de pénétrer ici en voiture et donc de ressortir en pleine nature.

Elle découvrit aussi une immense cuisine, une bibliothèque encore plus immense et des dizaines de pièces éparses, des bureaux de travail, des chambres, des salles de réunion... Elle n'avait pas encore tout vu quand elle sentit la tête lui tourner. Elle ne savait plus quel jour on était, depuis combien de temps elle était là, si c'était le matin ou la nuit. Elle retrouva par chance sa chambre dans ce labyrinthe et sentit la fièvre prendre le dessus à nouveau. Pour l'heure, elle n'avait pas la force d'imaginer s'échapper. Au moins, seule dans cette pièce, elle avait la paix et elle pouvait espérer retrouver des forces. Elle avait dormi plus de 24h une fois allongée. Ses souvenirs étaient vagues, elle se souvenait juste qu'à chacun de ses réveils Sam avait été là pour l'aider à avaler des médicaments. La fièvre était tombée mais depuis combien de jours ? Elle était seule depuis combien de temps ? Avant de se glisser au chaud sous les couvertures, elle aperçut son reflet pâle dans le miroir et ce pyjama d'homme vert sapin trop grand pour elle, digne des années 50. Elle n'avait pas de pantoufles mais elle sourit en imaginant qu'elle devrait trouver des charentaises pour être raccord avec son nouveau look.

Elle se réveilla en sursaut, en sueur. Elle navait fermé les yeux que quelques minutes mais les mêmes images venaient la hanter, ce regard transcendé par la peur et son nom qu'il avait appelé à l'aide. Le sentiment d'avoir abandonné l'homme de sa vie se faisait de plus en plus oppressant au fond de son cœur. Elle savait que le sommeil l'avait définitivement quitté alors elle partit dans la seule pièce qui pouvait lui être utile : la bibliothèque.

Et quelle bibliothèque ! Il y avait des milliers de livres, certains très anciens rédigés en latin, d'autres plus récents. Ils étaient dans de nombreuses langues, elle trouva même un rayonnage entier consacré à des traités français. Elle se plongea dans « le livre des Esperitz » et fit la connaissance de 46 démons, ainsi que de leurs rangs, leurs traditions, leurs traits principaux. Elle choisit le fauteuil le plus proche et se laissa glisser sur le cuir un peu frais. Elle eut des frissons et chercha du regard une veste ou n'importe quoi pour se réchauffer. Elle réalisa qu'il y avait des plaids sur chaque assise. Elle trouva le sien plié sous l'énorme coussin de velours marron. Elle s'emmitoufla et se sentit plus protégée et apaisée que jamais. Le savoir c'est le pouvoir, cette phrase lui revint en tête. Elle ignorait tellement de choses concernant la réalité du monde. Démons, esprits, sorcières, wendigo, vampire... Les quelques semaines passées avec les deux frères avaient déjà été fort instructives. La frontière entre les légendes et la réalité avait vacillé à jamais. Ce qu'elle avait pris pour vérité était faux, ce qu'elle prenait pour des contes était aussi faux. Elle devait tout réapprendre si elle voulait pouvoir se défendre Voire mieux : passer à l'attaque ! Alors elle tourna les pages aussi vite qu'elle put. Elle mit également la main sur un calepin et un stylo et prit des notes. Elle constitua une longue liste de questions auxquelles il faudrait trouver des réponses.
Le temps fila très vite. C'est son estomac qui l'incita à lever les yeux de son bouquin. Et sans crier gare, elle vit son visage : Fred. Un simple clignement de cils fit disparaître la divine apparition. Elle sentit son ventre se nouer et soudain les larmes coulèrent et rien ne semblait pouvoir les arrêter. Elle avait tout perdu. Il n'y avait aucun retour en arrière possible, aucun fol espoir auquel se raccrocher. Sa vie était finie, son ancienne identité était morte avec l'amour de sa vie. Elle s'endormit les yeux mouillés, gagnée par un désespoir abyssal où aucune lumière ne pouvait pénétrer. Elle n'était plus personne, elle n'était plus rien. Elle ne voulait plus qu'une seule chose: pouvoir mourir. Très lucidement, elle réalisa qu'il lui restait encore une seule chose à accomplir avant.

Supernatural, là où tout recommence...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant