Chap 30: pdv Aaron

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   -Maman, où sont mes affaires ?

-Viens, je vais te montrer, m'avait répondu mon père.

Soulagé par son intervention spontanée, j'avais repris espoir. Au départ, j'avais imaginé qu'ils s'étaient débarrassés de tout ce que je possédais.

Fébrile, je suivis mon père pour atteindre le garage.

Le garage ? Vraiment ? Pourquoi pas le grenier ou la cave tant qu'on y était ?

Il ouvrit la porte. Je reconnus directement notre véhicule familial. Une BMW X6 flamboyante. Juste à côté, je découvris une magnifique Porsche grise. J'hallucinai en observant le véhicule de luxe.

Ils semblaient avoir vécu leur vie sans trop se préoccuper de mon sort. S'acheter une nouvelle voiture de sport avait semblé plus important pour eux que de se préoccuper de me préparer une chambre. Pourtant, ils ne manquaient pas de place.

Froissé, je retins mes larmes tout en traversant le grand garage. La gorge serrée, je ne dis pas un mot. C'était trop douloureux de découvrir leur nouvelle vie.

Je ne me sentais plus le bienvenu à la maison et ils ne faisaient rien pour m'en donner l'impression. Étais-je devenu un étranger pour eux ? M'aimaient-ils encore un peu ? Je réalisai que je n'avais plus de chez-moi.

-Voici tes affaires, déclara enfin mon père.

Des caisses gisaient sur le sol. Des dizaines de boites avec mon nom écrit dessus au feutre noir, comme s'ils allaient oublier à qui appartenaient ces effets. Pourtant, ils n'avaient qu'un fils, moi.

À cet instant, je sentis mon corps se liquéfier sur place. Toute mon énergie et mon envie d'aller mieux s'évaporèrent d'un seul coup.

J'étais immobile devant ces cartons déprimants qui reflétaient toute mon enfance et mon adolescence. Ces caisses étaient le miroir de ma pathétique existence.

Ne restait-il que ça de moi ? Quelques cartons poussiéreux entreposés dans un garage ?

Un néon clignota derrière moi. Je levai les yeux vers la lampe et la fixai. L'espace d'une seconde, j'aurais voulu me brûler les yeux pour ne plus voir ce que j'avais devant moi. Mais à quoi cela servait-il de se voiler la face ? Je détournai le regard, nostalgique.

La lumière parut s'estomper et j'eus l'impression que d'un seul coup, les ténèbres tournoyaient autour de moi, m'emprisonnaient. Je voulais partir d'ici, fuir cet endroit qui me détruisait.

J'avais espéré trouver dans leur regard de l'amour, mais il n'en était rien. J'avais beau chercher, je demeurais face à un mur infranchissable.

-Et mon poster ?

-Ton vieux poster avec le bus ?

-Oui, celui que tu détestais tant. Où est-il ?

Mon père me toisa et je compris sans même attendre sa réponse.

-Vous l'avez jeté ?

-Ce n'était qu'un vulgaire poster.

-Tu savais pourtant à quel point j'y étais attaché.

-Il était temps de s'en débarrasser.

Tu le savais, papa.

Une larme coula sur ma joue sans que je ne puisse la contenir. Je ne voulais pas pleurer devant lui et pourtant, je ne contrôlais plus rien.

Tu savais.

Je voulais qu'il soit fier de moi, qu'il réalise tous les efforts que j'avais fournis pour sortir de ce maudit centre.

-Tu ne vas quand même pas pleurnicher pour un stupide poster ? lâcha-t-il brusquement tout en se dirigeant vers la porte.

Ce n'était pas pour le poster que je pleurais. 

Plus jamais seuls (TOME 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant