Chap 26 : pdv Aaron

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   Avais-je l'air de fuir ? Peut-être.

Avais-je l'air de ne plus vouloir la revoir ? Sans doute.

Pourtant, c'était tout le contraire. Je rêvais de lui parler, de lui confier ce qui me hantait, mais surtout de lui dire que j'allais mieux, enfin.

Mais je n'étais pas prêt. Je devais d'abord faire un travail sur moi-même pour ne plus jamais retomber dans mes anciens travers.

Je m'étais habitué à mes médications. Chaque dosage avait été étudié et adapté à mes besoins pour limiter les effets secondaires. J'arrivais presque à me sentir moi-même tout en les prenant. Plus important encore, j'avais accepté que j'étais malade et que je devais me soigner. C'était un bond vers l'avant.

J'avais la certitude que j'avançais, mais j'avais toujours honte de moi. Je n'étais pas fier de mon parcours. Les garçons de mon âge étudiaient pour décrocher un diplôme ou cherchaient déjà un emploi. Moi, je n'avais rien, aucune qualification. Juste un long séjour dans un centre et ça, fallait mieux pas le confier à un futur employeur.

Lorsque j'avais vu Auréa dans le parc du centre, cela avait été un électrochoc pour moi. Je devais réagir, prendre ma vie en main et évoluer. Tout comme elle avait été capable de le faire, je devais quitter ce centre. C'était en elle que j'avais trouvé le courage de me bouger.

J'avais déjà fait des progrès, mais pas suffisamment. Ce n'était pas assez pour arriver à la cheville d'Auréa. Cette fille épatante qui se battait depuis qu'elle était toute petite. Son handicap ne l'avait jamais rendue aigrie ou instable. Je voulais devenir comme elle.

Pour cela, je devais reprendre confiance en moi. Je devais évoluer.

J'avais alors pris la décision de quitter le centre. J'en avais le droit. J'avais appelé mes parents pour leur expliquer mon projet.

Déstabilisés, ils m'avaient écouté en silence sans m'interrompre. Certes, ils n'aimaient pas mes nouvelles idées, mais n'était-ce pas mieux que d'avoir un fils dans un hôpital psychiatrique ?

Mon père avait maudit le fameux poster avec le bus 142. Pourtant, ce n'était pas le poster qu'il fallait détester.

L'image avait juste été le reflet d'un rêve de liberté, un rêve que j'avais toujours nourri afin de faire le point sur moi-même. Je voulais me retrouver seul pour réfléchir, je voulais tout quitter pour enfin comprendre qui j'étais.

Mon but était de reprendre confiance en moi, d'aimer de nouveau la personne que j'étais devenue. J'avais fourni tant d'efforts pour en arriver là. J'avais envie de laisser la honte et les regrets derrière moi.

J'avais alors décidé de téléphoner à mes parents avant de quitter les lieux :

-Et s'il t'arrive quelque chose ?

-Je serai prudent.

-Mais tu n'as aucune expérience.

-J'apprendrai. Je veux vraiment y arriver par moi-même. J'en suis capable.

Papa prit la parole :

-Je suppose que ta décision est déjà prise.

-Oui, je ne changerai pas d'avis.

-Pourquoi partir tout seul dans cet endroit hostile ?

-Quand j'allais mal, ce poster m'a toujours donné l'énergie de tenir. C'était comme une bouée de sauvetage mental. Je ne sais pas trop expliquer pourquoi.

-Et ici, rien ne te retient ?

-Il y a vous deux bien sûr, Son Goku et ... Auréa.

-Pourquoi tu ne vas pas la voir ? Cela te ferait du bien, non ?

-Je l'ai fait souffrir. Si je revois Auréa, je ne veux plus jamais lui faire du mal. Je veux être certain que je ne retomberai plus dans cette violence.

-Ça me rend malade de t'imaginer partir là-bas tout seul.

-Je suis désolé maman, mais je dois partir. C'est vital pour moi.

-On verra d'abord si tu es capable de quitter le centre.

-Mais oui, tu parles d'Alaska alors que tu es cloîtré dans cet hôpital depuis des mois.

-Papa, maman, ma décision est prise.

Lorsque je raccrochai, je retournai dans ma chambre et levai les yeux vers le ciel.

Je n'en revenais pas. J'allais enfin partir pour l'Alaska et personne ne me retiendrait. Mes parents n'y croyaient pas, mais peu importait.

Je devais partir sans vraiment savoir si un jour je reviendrais.

Il faisait déjà nuit. Je fixai les étoiles dans ma mémoire. Les mêmes étoiles allaient me suivre jusque là-bas.

Je ne serais jamais totalement seul dans cette aventure, Auréa serait auprès de moi, dans mon cœur et dans mes souvenirs les plus précieux.

Plus jamais seuls (TOME 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant