Chap 17 (2-2) Apprendre à danser sous la pluie

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Your are not Alone résonna dans la pièce. La playlist aléatoire de spotify avait choisi ce morceau parmi tant d'autres. Était-ce un signe, une réponse à ma lettre : « tu n'es pas seule... ». Je fermais les yeux, espérant entendre sa voix à lui. Je m'inventais des retours en musique, refusant de croire que mon meilleur allié puisse si facilement m'oublier.

Je savourais mes instants de solitude, Jayden ne se manifestait pas encore ; ces derniers jours l'avaient épuisé. Entre nos étreintes nocturnes et un boulot prenant, il dormait peu, très peu. J'étais partagée entre le désir de le voir et le plaisir de me retrouver seule. Comment ne pas aimer la nuit ? Ma vie si bien ficelée me glissait entre les doigts, je perdais le contrôle, me laissant bercer par la magie de l'obscurité. Un temps suspendu entre le mystère de la lune, les étoiles, le retour du silence et une connexion particulière avec mon monde intérieur. Ce monde regorgeait de richesse et d'idées farfelues, mais il était le plus souvent parasité par les stimulis de la journée, me sentant souvent dépassée !

La nuit, je vivais comme un poisson dans l'eau, rêvassant à ma guise. Le jour, j'étais un oiseau en cage, étouffant sous ses propres contraintes.  

Les petits coups sur la porte me tirèrent de mes rêveries. Je bondis, le sourire aux lèvres pour accueillir Jayden.

— Tu finis tard, tu dois être épuisé, murmurai-je en lui ouvrant.

Il me sourit timidement.

– Je suis claqué.

Il semblait éreinté, mais pas seulement, je gardais le silence un moment, mon imagination me jouait peut-être des tours.

— Tu prends un verre sur la terrasse ?

— Je n'ai plus d'énergie, mais je veux bien me détendre sur un transat avec toi dans mes bras.

Je nous servais deux bières, il restait muet, soucieux. Cela me déplaisait... L'air de cette soirée d'été restait étouffant, je retrouvais Jayden. Malheureusement la canicule ne laissait pas passer un souffle d'air. Il écarta ses bras, mon dos se cala contre son torse. Nous regardions dans la même direction.

— Qu'est-ce qu'il a ? Rien de grave ? l'interrogeai-je inquiète.

Jayden parlait rarement si peu, je me rendais compte que je le connaissais à peine finalement, je savais juste que malgré un boulot épuisant, il profitait de nos moments ensemble toujours avec gaieté et envie.

— Je suis désolé Lila. Dure journée.

Je caressais doucement son avant-bras, rassurée de sentir sa peau frémir à mon contact. Il soupira, chercha un instant ses mots.

— Nous avons quelques cas d'asthme et de problèmes respiratoires au dispensaire dus à la chaleur. On a dû hospitaliser un enfant.

Ma main poursuivait ses va-et-vient. Je le laissais continuer, ses explications étaient touchantes, mais pas suffisantes. Mon instinct me trahissait peut-être, j'avais aussi tendance à tout dramatiser.

— Mon père m'a appelé, il est inquiet pour la réserve, avoua-t-il enfin.

J'interrompais tout mouvement à l'évocation du peuple amérindien.Le souffle coupé. 

— Nous souffrons d'un manque de personnel dans les hôpitaux, pour l'instant, c'est gérable, mais pas pour les cliniques de fortune. La chaleur était comme un ennemi invisible qui frappait sans prévenir. Une vague de frissons parcourut mon corps. Heureusement pour moi, il ne pouvait pas voir ma réaction.

— Tu y vas demain ?

— Malheureusement non, mon père ne peut pas, il a été réquisitionné à Seattle, les urgences sont surchargées. Il est obligé de faire des gardes en plus.

Cette vie et celle d'après... Tome 2 (Premier Jet) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant