Chapitre 19

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 [Aramis]

      La comtesse relisait depuis cinq bonnes minutes déjà la lettre déposée par un domestique inconnu. Elle ne savait trop quoi en dire.

Chère Mademoiselle de Coligny,

Je ne sais point si vous avez ouï, mais ce soir se tiendra une grande soirée d'appartement royale. Je me questionnais alors, si ce n'est pas trop demander, s'il vous siérait de passer cette soirée en ma compagnie ? J'espère, encore une fois, ne pas vous paraître trop impertinent.

Si c'est le cas, je vous prie de m'excuser. Sinon, rejoignez-moi à sept heures du soir précises au salon de Vénus, je m'y trouverais déjà.

Au plaisir de vous retrouver,

Duc François de Biron.

P.S. Non que j'en doute, mais j'ai entendu dire des dames qu'il faudrait se vêtir d'une toilette fastueuse car des personnes plus qu'importantes seront présente.

      Elle posa le billet. Il s'agissait d'une demande plutôt... soudaine, et l'heure de rendez-vous approchait à grands pas. Son cerveau s'activait à peser les pour et les contre. Même si elle ne s'était jamais rendue à un tel événement, on lui en avait décrit en détail le déroulé, si bien qu'elle en tenait une idée plutôt précise. Dorures et plaisanteries, danses et mets raffinés. Cela faisait beaucoup de nouveautés à la fois, et quelqu'un de plus anxieux y aurait vu tout autant de raisons potentielles de se ridiculiser. Mais Aramis avait confiance en son entraînement. Cependant les faux pas devaient être évités le plus possible en présence de la royauté, qu'elle n'aurait point escompté revoir de sitôt d'ailleurs.

      Et puis, le duc parlait de « tenue fastueuse » pour se maintenir au niveau de ces riches sang-bleus, ce qu'elle n'était pas sûre de posséder. Mais malgré ses dernières réticences, elle n'avait pas de réelles raisons l'empêchant de s'y rendre. Cela pourrait l'aider à rencontrer d'autres gens encore et de s'habituer aux coutumes et mode de vie de la Cour. De plus elle y serait en compagnie du duc de Biron - était-ce impoli de l'appeler François si uniquement dans ses pensées ? - qu'elle affectionnait plutôt bien. Au cours des derniers jours, ils s'étaient revus plusieurs fois, développant une belle complicité. Tant d'occasions de passer une bonne soirée. Qui sait, elle risquait même de s'amuser.

       Aramis se leva et ouvrit l'énorme armoire dans laquelle elle se souvenait avoir rangé les plus précieuses de ses robes. Elle les écarta les unes après les autres, ne trouvant pas réellement celle qui lui convenait. C'est alors qu'elle remarqua un objet dans le fond du meuble. Elle l'en extirpa et comprit qu'il s'agissait d'un paquet, renfermant possiblement du tissu de par sa texture. Aramis le soupesa. Beaucoup de tissu. Ce qui l'étonnait, c'était qu'il n'était nullement prévu qu'elle reçoive quoi que ce soit.

« Juliette ?

— Oui Madame ? répondit la jeune fille en surgissant de la pièce voisine.

— Savez-vous qui a déposé cela ?

— Non Madame, je n'en ai aucune idée. Je l'ai trouvé devant la porte quand je suis rentrée ce matin. J'ai supposé qu'il vous appartenait, je l'ai donc rangé.

— Rien ne l'accompagnait ?

— Non rien, il y avait juste ce paquet.

— Bien, merci. »

      Un mystérieux colis donc... La comtesse se tâta à l'ouvrir. Elle était quasiment sûre qu'il n'était pas sien, elle doutait que son réel propriétaire se réjouisse qu'elle en ait inspecté le contenu. Les erreurs de livraison n'étaient pas impossibles. Mais peu de chances subsistaient pour que ce colis atteigne un jour son propriétaire. Elle écarta délicatement l'emballage et une carte vint en premier. Peut-être contenait-elle finalement des informations sur la provenance de ce qu'elle tenait en main. Cependant elle fut déçue sur ce point, déception qui laissa place à une grande surprise.

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