EDWIN
Ma transgression devient rapidement connue de toute la Citadelle. Comment j'avais désobéis. À la loi, à mon père. L'incident du Conseil a été passé sous silence. En particulier maintenant.
Le fils du roi bientôt âgé de dix-sept ans et donc en âge de revendiquer le trône et d'être désigné héritier du royaume du Nord se rebelle contre son roi.
Je m'en suis montré plus que digne. Je ne sais pas me jeter des fleurs mais... Mon courage, mon sens du devoir... Mais ces derniers temps j'ai pris beaucoup trop de libertés. Vis-à-vis de mon père mais aussi de ma hiérarchie. Ma récente désertion du Conseil privé doit affirmer ma nouvelle rébellion contre le trône.
Certains me disent imbu de ma personne, que je fais fi de l'autorité de mon père et de la royauté. Et que je suis pas digne de mon rang de prince. Tout comme ma mère.
En réalité, c'est loin d'être un fait d'opinion publique. Seul un petit nombre de Frontalier me considère comme le petit prince capricieux que décrivent les ouï dires. Bon, certes je ne suis pas la personne la plus sociable de la Citadelle. Mais quand on considère que l'Empire tout entier imagine les Frontaliers aigris, froids, sans le moindre humour et tellement susceptibles qu'ils règlent leurs querelles par le sang à la moindre occasion... Oui bon ça c'est peut-être pas totalement faux, mais bon ! Je ne veux pas que ces rumeurs retombent sur mes proches, en particulier sur ma mère. On lui reproche déjà bien assez de chose comme ça, j'ai pas l'intention d'en rajouter.
« T'as déjà parlé avec lui ? », j'entends dans les couloirs, « il m'a répondu comme à une merde ! Il a été glacial, quel ingrat ! ». « Il n'accorde d'importance à rien ni personne, pas même à son père. » « Tu savais qu'il se laisse sodomiser par le fils du général ? Ce sera avec lui que la famille royale va s'éteindre, une telle honte ! »
Il est la honte de la famille royale.
Une honte pour sa famille !
Sa famille doit avoir tellement honte.
Quelle honte pour son père !
Je peux très bien laisser couler, je pourrais. Mais ça c'est seulement si je n'étais réellement pas ce qu'ils décrivaient.
Donc je ferme les yeux sur les regards qui brûlent mon dos dans les couloirs et les cours, et les salles de classes, et même à table au nez de ma famille. Je me rend tête haute aux écuries. J'essaye.
Il m'arrive de pleurer sous la douche. C'est plus facile. Je peux faire comme si c'était simplement de l'eau sur mon visage.
Le Conseil a décide de faire croire que j'avais agis avec leur accord pour les Frontières mais ça n'a trompé personne. Mais depuis on m'accorde plus de liberté. Quitte à perdre le contrôle une fois sur moi autant pas perdre la face en faisant croire que j'agis sur leur ordre.
Je selle et grimpe souplement sur le dos d'Oromë. Je respire profondément avant de m'effondrer sur l'encolure de ma jument. Pour la première fois de ma vie, je ressens le poids du Prince Héritier sur mes épaules. Et c'est plus lourd que prévu. Mes doigts caressent lentement l'encolure de ma mouture et je plonge mon nez dans ses crins, les yeux étroitement fermés. Jusqu'à maintenant, encore plus récemment, j'ai été libre d'être le petit garçon que je voulais. Je n'étais pas très différent des autres et j'en étais heureux. Maintenant, je suis un homme aux yeux des lois, et le Prince héritier dans moins d'un mois. Fini les libertés, fini les escapades, fini la légèreté de l'enfance.
– Edwin ? s'inquiète Zeke en me regardant avachi sur mon cheval. Ça va ?
Sans répondre, je me redresse et fais avancer ma jument vers la sortie. J'ai besoin d'air, de me rafraîchir l'esprit, même avec les moins cinq degrés dehors et la simple chemise en lin sur mes épaules.
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Sons of Merlin - Dark Shadows
Fantasy(Update Samedi ou Dimanche) À l'aube d'une nouvelle guerre, Katermere est le dernier rempart entre le continent et la menace qui sévit au Nord. Mère des derniers guerriers de la Lumière qui préservent Gwendalavir, les Frontaliers. Edwin, Prince des...