Chapitre 75

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Ce qui était merveilleux avec le sommeil, c'était de le voir s'emparer de Stiles. Détendre son visage, calmer les battements toujours un peu rapides de son cœur. Lisser son odeur, la déposséder d'une partie de son piquant, de toutes ces émotions qui la rendaient amère. Mais il y avait des conditions à respecter pour que le sommeil continue d'avoir de tels effets sur lui. La principale : le contact. Lorsque son humain s'endormait, Derek le prenait systématiquement contre lui. Si cela ne le protégeait pas toujours des cauchemars et autres réminiscences désagréables, cela limitait les dégâts. D'un autre côté, il était plus facile d'agir ainsi en cas de problème. Dans sa position, Derek avait non seulement la possibilité de l'empêcher de se faire mal – Stiles avait déjà essayé de s'arracher les cheveux – mais également de le rassurer. De le câliner, en lui chuchotant des mots doux, en esquissant pour lui les promesses d'une vie plus légère. Il les lui imageait, lui narrait des scènes qu'il imaginait pour leur futur, celui dans lequel Emile n'aurait pas sa place. Il s'agissait en tout cas du seul possible pour que Stiles puisse se relever, se reconstruire... Et peut-être s'épanouir.

Mais il venait toujours un moment durant lequel Derek devait se séparer de son humain. Souvent, c'était l'heure qui le lui imposait. Ses prunelles claires regardèrent au travers de la fenêtre le soleil couchant, dont la descente avait commencé depuis un moment déjà. L'heure de manger approchait et Derek savait qu'il n'y avait au frigo aucun reste digne de ce nom. En tout cas, pas suffisamment pour manger en tant que tel. Grignoter en fin de soirée, peut-être.

Derek déposa un baiser délicat sur le front de l'hyperactif, qu'il sentit agréablement frissonner à son contact et se pelotonner davantage contre lui. Pas de doute, il ne sentait parfaitement protégé dans son étreinte et c'était une chose dont l'ancien alpha aimait avoir régulièrement le rappel. Il n'y avait que de cette façon que la reconstruction de Stiles pourrait se faire : il lui fallait un soutien solide avec lequel il se savait à l'aise tout en ayant conscience du fait qu'il était en sécurité. De son côté, Derek était au courant que les choses pouvaient changer, que Stiles pourrait avoir besoin de plus ou moins de proximité. A cela, il ne voyait aucun problème, simplement... Il surveillait chacune de ses attitudes, chacune de ses actions ou émotions, de sorte à agir et s'adapter sans qu'il ait besoin de lui demander quoi que ce soit. Son idée ? Faciliter la vie de Stiles au maximum et limiter ses sources de préoccupation. Certains pourraient sans doute le juger un peu durement, de juger ce besoin qu'il avait de contrôler tant d'aspects de leur vie. Ce n'était pas là une chose qui plaisait à Derek qui savait pertinemment qu'il arrêterait au premier mot de Stiles à ce sujet. En attendant, il faisait ce qu'il pouvait pour essayer de limiter l'impact de cette chute qui avait commencé à s'amorcer depuis un moment déjà.

Avec une délicatesse infinie, Derek réveilla son compagnon, croisa son regard ensommeillé plein d'une tranquillité non-feinte. Les fois où Stiles ne se réveillait pas en sursaut étaient rares, mais toujours ainsi. L'instant d'ignorance régnait en maître et seuls les sentiments les plus forts et les plus primitifs de l'humain ressortaient, effaçant momentanément les ombres qui lui rappelaient ses cassures. Derek adorait ces quelques secondes, il les chérissait. C'était là qu'il entrevoyait Stiles, le vrai. Celui qui pourrait être là s'il avait été protégé dès le départ. Si l'on avait empêché la main de l'Horreur de se poser sur lui. Mais Derek ne perdait pas espoir : il était persuadé qu'avec le temps, ce Stiles-là finirait par ressortir de façon pérenne. Laisser les ailes de sa personnalité se déployer, illuminer les cieux de son étincelle intérieure. Il ne serait pas Icare, mais le soleil lui-même.

D'un geste empreint de sommeil, Stiles attrapa le col du haut de Derek et l'attira doucement à lui. L'ancien alpha ferma les yeux, laissa sa chaleur l'envahir, accepta de lier ses lèvres à celle de son compagnon avec qui le contact était aussi naturel qu'addictif... Car si Derek le pouvait, il passerait ses journées à l'embrasser, à dormir nu contre lui, à lui faire l'amour encore et encore jusqu'à ce qu'ils s'endorment dans les bras l'un de l'autre, épuisés de s'être tant donnés, comblés de s'être tant aimés. C'était en tout cas ce que sa partie lupine réclamait parce que c'était de cette façon que la vie intime d'un loup-garou fonctionnait, lorsqu'aucune de ses pulsions n'était contenue. C'était d'autant plus vrai concernant les compagnons, les âmes sœurs. Et ils l'étaient, il n'y avait plus de doute à avoir quant à ce fait.

La vérité dans le mensonge.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant