Chapitre 41

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Stiles s'éveilla une première fois aux alentours de deux heures du matin, en sueur. Il avait fait un cauchemar, s'était revu, faible, dans sa Jeep, ses bras et son torse fraîchement brûlés par les quelques mégots de cigarette. Se rendormir avait été difficile, mais il avait réussi. Même chose vers trois heures. Le pire, ce fut à cinq heures vingt. Son réveil fut brusque et violent. Stiles tâtonna fébrilement à la recherche de l'interrupteur de la petite lampe de chevet à l'aide de sa main droite. La lumière, une fois enclenchée, éclaira un jeune homme tout tremblant, la main gauche sur sa bouche, étouffant efficacement ce qui aurait dû être un cri, qu'il s'efforçait de retenir. Ne les réveille pas, ne les dérange pas, se répétait-il comme un mantra. Les larmes coulèrent sur ses joues. Il craquait.

Parce que ce rêve qui l'avait réveillé ou plutôt, cet horrible cauchemar, faisait valser les barrières qu'il tentait désespérément de rebâtir. Il l'avait revu lui, cet enfoiré, terminant son acte avorté dans cette petite salle du lycée. Ensuite, il s'était vu, lamentablement étalé sur le sol les jambes écartées, saisir un coupe-papier et mettre un terme à ses souffrances. Et bordel ça lui... Ca lui retournait l'estomac.

Stiles ne sut pas vraiment comment, mais il réussit à se lever puis se traîner jusqu'à la salle de bain. Il s'aspergea le visage d'eau à l'aide de ses mains tremblantes avant de les ramener vers son cœur qui battait la chamade. Ça n'allait pas. Ça n'allait vraiment pas. Stiles ferma les yeux avec force et ses larmes se confondaient avec l'eau qu'il n'avait pas pris le temps d'essuyer. Sa respiration se faisait sifflante, hachée, aléatoire. Son poignet le brûlait, il... Il voulait le mettre au frais. Stiles rouvrit les yeux, retroussa sa manche en tremblant et tenta de défaire son bandage proprement changé la veille. Lorsque les bandes touchèrent le sol, Stiles vit la profonde entaille scellée par des points de suture résorbables. Sa vision se fit floue et sa tête se mit à tourner. Sa main libre s'accrocha au bord du lavabo avec une telle force et une telle crispation que ses phalanges étaient déjà blanches. Au secours... L'eau froide crachée par le robinet rentra en contact avec la blessure et Stiles gémit. Ça faisait mal et pourtant, cela ne le devrait pas. Tout comme sa plaie ne devrait pas le démanger aussi soudainement. Ne te gratte pas, Stiles, n'y touche pas, se répéta-t-il plusieurs fois, les dents serrées. Pourtant, il en avait diablement envie mais savait que s'il avait le malheur de le faire, il irait fort et serait sans doute incapable de s'arrêter. Hors de question de faire sauter ses points. Il avait manqué de mourir une fois, ce n'était pas la peine d'en rajouter une deuxième à la liste. Mais sa douleur, sa démangeaison, ses tremblements, sa respiration... C'était insupportable. De l'air, il commençait sérieusement à avoir besoin d'air.

Et puis ses jambes lâchèrent. Son corps s'effondra, sa tête rentra durement en contact avec le carrelage glacé de la salle de bain. Des frissons désagréables le parcoururent alors qu'il se recroquevilla sur lui-même en gémissant, son crâne lui faisant mal. Puis, son souffle se coupa brusquement. Il chercha l'air, les mains sur sa gorge qui semblait ne plus servir à rien. Il devint rouge, des sueurs froides se mirent à couler sur son front et ses tempes. Ses ongles grattèrent sa peau, il voulait de l'air, il n'arrivait plus à respirer...

Soudain, des bras forts l'encerclèrent et une étonnante chaleur chassa le froid glacial du carrelage. Au bord de l'inconscience, Stiles se sentit quitter le sol mais la chaleur, elle, ne le lâchait pas. Son bras, avec sa plaie à l'air libre au poignet, pendait, comme sans vie tandis qu'un peu d'air bienvenu s'infiltra à l'intérieur de ses poumons en manque. On lui parlait, mais il ne le savait pas. Il était entre le conscient et l'inconscient, dans cette très fine limite, ce croisement entre deux états contraires. Il sentait, mais ne voyait pas, n'entendait rien. Et il tenta tant bien que mal de se raccrocher à cette chaleur qui le poussait à ne rien lâcher.

La vérité dans le mensonge.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant