RPG, en route pour Grenzadiel ! (MM, queer)

Chapitre 13.2

C'est pour cette raison que je n'ai rien dit quand Tatialine s'est tournée vers moi, tout sourire, en me lançant un « Ash, tu es d'accord pour monter la garde sur les toits ? »

Impossible d'avouer la vérité. De reconnaître ma faiblesse.

J'ai plaqué un rictus sur mon visage en espérant qu'il passerait pour un sourire, puis j'ai hoché la tête en refoulant ma subite nausée à l'idée de me retrouver en hauteur.

—  Tu es forcément très agile, en tant que Chat-Garou, pas vrai ? a ajouté Tatialine d'une voix enjouée. Et les chats n'ont pas le vertige !

Le vertige.

Non. Ce n'est pas le vertige. C'est pire.

La certitude de mourir, la terreur de pourrir là-haut... non, ce n'est pas le vertige.

— Moi je l'ai, le vertige, est alors intervenu Waane en exagérant un long frisson d'épouvante. Sinon, j'y serai allé avec toi.

Il a souri benoîtement face à mon coup d'œil dubitatif, avant de filer vers les chambrées. Ainsi abandonné dans le coin cuisine du dormoir, j'ai donc endossé mon masque le plus usité : celui qui laisse penser aux autres que tout va bien, que je ne suis touché par rien, que rien ne m'effraie, et que quoi qu'il arrive, je suis sûr de moi. Celui qui pousse autrui à me croire froid, sans émotion, arrogant et inquiétant.

Celui que je porte depuis si longtemps que parfois, je ne sais plus exactement qui je suis quand je le retire.

— Aelya est déjà d'accord pour monter la garde, a indiqué Tatialine. Je me suis dit que vous étiez les deux membres de la Team les plus à même, pour cette mission. Toi, le Chat, elle la Vampire...

La gorge trop nouée pour parler, je me suis borné à hocher la tête en plongeant les mains dans mes poches pour masquer leur tremblement.

—  Je suis sûre que Zyniarold va essayer un coup de roublard, a ensuite gloussé Tatialine.

Cette certitude m'a agacée, là où elle amusait Tatialine. Pire : l'idée que Maubolfy tente de s'enfuir a semblé plaire à la TerreMondienne. L'étincelle joyeuse et presque affectueuse dans son regard m'a fait comprendre qu'elle s'est déjà attachée à lui.

Je me demande bien pourquoi.

Il n'a rien d'attachant.

—  Ash ? Ça va ?

Je tressaille, crispe de plus belle les doigts sur les tuiles puis tourne prudemment la tête vers Aelya. Toujours nonchalamment alanguie sur le toit près de moi, elle me fixe avec une acuité dérangeante. Je tente d'avaler la boule encastrée dans ma gorge avant de grimacer un sourire que j'espère convaincant.

—  Oui, il fait juste un peu frais.

Je grimace mentalement en m'entendant répondre cette stupidité. Il fait au contraire exceptionnellement doux pour la saison. Pourtant Aelya ne me contredit pas. J'espère qu'elle ne me questionnera pas plus, qu'elle acceptera cette excuse pour expliquer mes tremblements incoercibles. Ou le chevrotement incontrôlé de ma voix. Ou mon regard fuyant.

Bonne sève de Groschk, je regrette presque que Maubolkfy ait décidé d'être sage !

S'il avait persévéré, au moins aurais-je eu une excuse pour quitter ce toit... au moins aurais-je toujours une distraction sur laquelle me concentrer et lutter contre ma terreur.

Pourvu que cet idiot de demi-kobold tente encore une échappée !

—  Je ne savais pas que tu étais frileux ; Tu veux que je volette jusqu'au dormoir pour te ramener un manteau plus épais ?