ARCADIA : Ominous (TOME 2) (Premier jet)

Chapitre 41

Maddy

Le sol semble s'écrouler sous mon poids. Je me sens aspiré par le marbre blanc sous mes pieds. Mon corps brûle de chaleur, la honte empourpre mon visage.

Les yeux écarquillés, je ne peux détourner le regard des images qui se jouent sous les yeux de tous. Mon cœur bat à tout rompre, l'air a du mal à effectuer son chemin jusqu'à mes poumons. Non... Ça ne peut pas être réel. Je vais me réveiller. Je dois me réveiller. Viktor ne peut pas réellement avoir fait une chose pareille, pas maintenant. Le silence qui règne dans la salle est pesant. Plus rien ne bouge, rien, excepté le paysage qui me donne le tournis.

Je vacille, Heinly me rattrape. Je sens sa poigne ferme autour de mon bras, je n'ose pas le regarder. J'ai trop honte, trop peur de ce que je pourrais lire dans ses yeux.

Une seule personne peut comprendre ce que je ressens là maintenant, alors je cherche son regard. Lorsque je le trouve dans la foule, près de sa famille, l'inquiétude que je lis dans ses yeux me confirme que tout cela est bien réel. Je déglutis avec difficulté. À moins d'un mètre devant moi, se trouvent mes parents, qui sont toujours sous le choc de ce qu'ils découvrent.

— Cessez immédiatement la projection ! Par tous les Dieux, qu'attendez-vous!! s'agace madame Thornheart.

La foule s'écarte, laissant un vide entre les Waeslen et ma famille. Comme s'ils nous laissaient tous le loisir de nous expliquer. Le temps est long. Les secondes paraissent des heures. Je sens déjà mes yeux s'emplir de larmes lorsque je sens l'attention de mon père sur moi. Je fixe le sol, j'ai à peine le cran de respirer. Les lèvres pincées, je lève lentement les yeux sur mon père. L'effroi et la perplexité que j'y lis sont les mêmes que dans les iris verts de ma mère.

— Sorcière ! Tout cela ne peut être que l'œuvre d'une satanée sorcière ! S'exclame Katherina Waeslen en pointant un doigt accusateur vers moi. Elle a forcément jeté un sort à mon fils.

Elle attrape Dior par le menton et l'examine. Jeter un sort à Dior ? Je n'ai jamais rien fait de tel ! J'ai beau vouloir me défendre, je suis pétrifiée, aucun son ne sort de ma bouche, aucun membre de mon corps ne m'obéit. Je suis figée et totalement spectatrice des événements.

— Qu'allez-vous donc chercher là ! C'est votre graine de voyou qui a dû user de son hypnose contre Maddy ! C'est un prédateur !

Ça ne vient à l'idée de personne que nous ayons pu avoir envie de nous embrasser. Non, dans l'esprit de chacune de nos familles respectives, tout cela résulte de manipulation ou de magie rouge. Alors même que ma mère porte de graves accusations à l'encontre de Dior, je demeure toujours incapable de dire quoi que ce soit. Mais les Dieux savent combien je voudrais prendre sa défense. Lui-même est dans une apathie, le regard perdu dans le vide.

— Votre désespérée de fille n'a rien pu faire d'autre pour attirer l'attention de Dior. Elle est tout aussi pathétique que vous autres, les sorcières Osborne, à user d'enchantements de magie rouge !

— Contrairement à ce que vous croyez, nous n'utilisons pas ce type de magie. Nous, sommes des gens bien, mais qu'en est-il de vous et de votre famille d'assassins, manipulateurs !? Défend ma mère.

Aucun invité ne rate une miette de ce qui se passe, se délectant sans aucune gêne de nos drames familiaux. Je parviens finalement à pivoter la tête en direction de mon frère qui affiche un air grave. Remarquant que je le regarde, il reporte son attention vers moi. Je ne saurais discerner s'il s'agit de déception ou de soutien, peut-être un petit peu des deux. Katherina ricane d'un air suffisant me rappelant Dior.

— Allons Elerinna... Nous savons tous comment vous vous êtes élevée au rang de reine et avez séduit Lorindòl...

Les fenêtres s'ouvrent brutalement, laissant entrer un vent glacial à l'intérieur. Le grand lustre se met à bouger, quelques bougies s'éteignent. À en juger par l'énergie qui se dégage de ma mère, c'est elle qui a provoqué tout ça.