CHAPITRE 13

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CHAPITRE 13 – Un bleu sur les fesses

— Neera, ta garde ! hurle Izel en tapant dans ses mains.

— Ma quoi ?

Je n'ai pas le temps d'assimiler les instructions de ma coach personnelle que je me retrouve la tête dans la terre et la bouche pleine de cailloux. C'est Khione, qui fait pourtant plus d'une tête de moins que moi, qui vient de me faire passer par-dessus son épaule dans un bras à la volée.

Dans un geste douloureux, je roule sur le dos, le souffle court, le front mouillé de sueur et le corps couvert d'égratignures. Mes yeux voient flou, alors le reliefs d'Aldonoa qui se dessinent dans le tronc creux me paraissent plus tortueux que d'ordinaire.

— On fait une pause ? je demande en me redressant et en essuyant le coin de ma bouche d'un revers de manche.

En regardant mon poing, j'y vois quelques gouttelettes de sang. La pointe de ma langue découvre que je me suis ouvert la lèvre en tombant. Génial.

— Tu feras une pause quand tu seras morte, soupire Izel, poings sur les hanches. Allez, en position !

Je me redresse sur mes deux pieds tant bien que mal, et cette fois-ci, je prends soin de bloquer ma garde au-dessus de mon menton lorsque Khione et Epione fondent sur moi en même temps.

Quand j'ai dit aux chevaliers que j'avais un passif d'escrimeuse, la première chose qu'ils ont faite a été de m'entraîner au combat rapproché, à mains nues. Leur philosophie est que le guerrier qui dépend trop de son épée se retrouvera impuissant si elle venait à lui être arrachée. Heureusement pour moi, ils m'ont promis que quand je serai prête, ils me trouveront une arme.

Voilà déjà cinq jours que nous campons ici, à l'intérieur du tronc creux d'Aldonoa. Les Templariens parlent de cet arbre avec un respect mêlé d'émerveillement. Pour eux, il représente un sanctuaire de paix, un lieu de recueillement où aucune guerre n'est tolérée, un symbole de neutralité sacrée. Même si nous sommes hors des frontières de tous royaumes, cet arbre impose son aura de tranquillité.

C'est l'occasion parfaite pour apprendre à mieux nous connaître et à nous entraîner.

Aujourd'hui et comme les jours précédents, je m'exerce avec les jumeaux, Khione et Epione. Ils sont agiles et leurs mouvements sont synchronisés avec une précision presque surnaturelle. Chaque assaut est une danse, un jeu de miroirs. Je me bats du mieux que je peux, tentant de suivre leur rythme. Leurs conseils sont brefs, mais précieux : « Anticipe », « Sois plus légère », « Bouge comme l'eau ». Mes muscles me font mal, j'ai un bleu énorme sur la fesse droite, mais je sens que je progresse.

Eux qui sont d'habitude tellement silencieux, délient un peu leurs langues quand c'est pour parler de bataille. Je leur en suis très reconnaissante. Peu à peu, j'apprends à interpréter les regards qu'ils s'échangent, leurs signes de tête, la position de leurs mains qu'ils agitent parfois. Une curiosité grandie en moi de découvrir d'où ils viennent et si l'intégralité de leur peuple communique de cette façon aussi.

Izel, quant-à elle, se révélé être une vraie brute de décoffrage. L'autre jour, elle traitait Klaus de sadique, mais elle n'est pas en retrait. Quand je me fais renverser, elle éclate d'un rire fort, faisant briller ses rangées de dents aussi pointues que des aiguilles. Avec Klaus, ils s'amusent à parier leur repas du soir sur le nombre de fois que mon fessier rencontrera le sol. Aujourd'hui, on en est déjà à quatorze. Et je me fiche de savoir lequel d'entre eux a gagné le pari.

Pour la énième fois, je m'écroule, et cette fois-ci, il m'est impossible de me relever. Mes muscles me brûlent comme s'ils étaient en feu et le sang pulse dans mes tempes. La tête des jumeaux, d'Izel et de Klaus, se penche au-dessus de moi d'un air inquisiteur.

Destinées Temporelles | T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant