Chapitre 10

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Au nord-est du Pays de Galles, quelques jours plus tôt.

Le crépuscule du soir s'amorçait à l'horizon, déposant lentement le voile de la nuit sur le territoire Gallois.

Alors que les derniers de rayons de lumière passaient à travers les petites fenêtres de la modeste demeure seigneuriale, endeuillée, la salle commune où trônait le fauteuil du seigneur était vide. Prêt du grand foyer au centre de la pièce, le brasier réchauffait Iseult et Osbert.

Les funérailles de son époux et leur unique enfant avaient eu lieu dans l'après-midi, laissant Iseult dans un profond désespoir, mais une once de colère coulait dans les veines de la Galloise de vingt-trois printemps : une brune à la silhouette élancée qui arborait une longue chevelure bouclée cascadant jusqu'au creux de ses reins.

Elle rivait ses yeux marron foncé dans ceux de son beau-frère, Osbert :

— J'ai fait mon choix, clama-t-elle en levant le menton d'assurance. Je préfère rejoindre le couvent.

Osbert, gallois de vingt-huit printemps, soupira tout en rejetant une mèche de cheveux sales et bouclés derrière son oreille.

— Êtes-vous sûre de vous ? s'inquiéta-t-il.

— Oui, affirma-t-elle le ton ferme. Les terres de mon père ont été cédées à l'Église et je ne peux pas rester dans la demeure d'Edmond.

— J'aurais pris soin de vous, Iseult, insista-t-il.

Iseult soutint le regard vert de son beau-frère et repensa à sa proposition : rester et partager sa couche, telle une putain, pour garder une vie confortable sur ses terres, en dépit de la présence de Gwenaël, sa femme.

— C'est la raison qui dicte mon choix, Osbert, répliqua-t-elle, lassée d'être obligée de se justifier. J'ai perdu mon fils et mon époux, déclara-t-elle la voix vibrante d'émotion. Je n'arriverai pas à trouver la paix en restant ici, et j'ai également beaucoup d'affection pour votre épouse, rester pour honorer pareil accord serait une grave offense envers tous ceux qui me sont chers.

— Je sais que vous dites vrai, mais... soupira-t-il en levant la main pour lui caresser la joue. C'est un tel gâchis que d'offrir votre vie à Dieu, et à lui seul !

— Je pars demain dès l'aube, répliqua-t-elle en repoussant sa main avec prudence.

Iseult tourna les talons pour couper court à leur discussion, car elle était pressée de terminer ses bagages.


Dans sa chambre, qu'elle n'avait jamais partagée  avec son époux, hormis les moments où ils avaient tenté de procréer, Iseult s'assit sur le lit et ressassa le passé.

Le paganisme se pratiquait encore majoritairement au Pays de Galles, même si les émissaires religieux venaient en masse depuis plusieurs années pour répandre leur Bible et leurs croyances.

Dès son plus jeune âge, Iseult, considérée par les siens comme une Gwrach (terme respectueux pour sorcière) fut en mesure d'avoir des visions de l'avenir, que seule sa pureté permettait d'obtenir. Mais en grandissant et en devenant une jeune femme, elle renonça à son don, car elle était tombée amoureuse. C'est ainsi qu'elle avait accepté le baptême et embrassa la religion d'Edmond pour leur permettre de se marier.

Auprès d'Edmond, son mari, elle connut le bonheur et grâce à quelques années de persévérance elle accueillit la joie de devenir mère. Cependant, elle pratiquait encore quelques remèdes à base de plantes, à l'abri du regard de l'Église, qui affirmait haut et fort que la guérison venait uniquement par la prière et la force de la foi : ce qui, selon son esprit païen, avait entraîné plus d'une âme au cimetière, alors que quelques herbes, créées par la bonté du Seigneur, auraient suffi à leur apporter la santé.

D'une certaine manière, elle regrettait d'avoir perdu son don, car il lui aurait permis de prédire l'avenir et peut-être d'empêcher de perdre son fils et son époux. Mais sa nouvelle religion lui soufflait que ce fût parce qu'elle avait pratiqué son art païen que Dieu avait rappelé à lui l'être qu'elle aimait le plus au monde, son fils Henri.




Vikings - Le feu sous la glace (1er jet - arrêté ) 🔞Où les histoires vivent. Découvrez maintenant