Ses serres métalliques glaçaient les mains d'Astós.
Souriante, la Dnophos reprit la parole, mais elle ne s'adressait pas à lui.
- Eh toi, le gringalet, va-t'en. Tu ne m'intéresses pas, et si tu ne veux pas que je te fasse la peau, je te conseille de te bouger le derrière.
Endiáthetos se releva tant bien que mal, jeta un dernier regard implorant à son frère et repartit en murmurant.
- Je bâtirai l'empire que tu aurais voulu créer, c'est promis Astós...
Sklerótes soupira démesurément fort et s'écroula sur le sol en un nuage de poussière. Astós toussa. Quand il put enfin rouvrir les yeux, ce n'était plus un monstre gigantesque qui se tenait devant lui, mais une jeune femme qui avait la trentaine. Elle était laide, vraiment laide, sa peau était tachée de noir, semblable à de la suie. Ses yeux, eux étaient restés les mêmes, toujours aussi bleus, toujours aussi luisants, toujours aussi terrifiants. Elle avait toujours ses dents taillées en pointe, et ses ongles devaient mesurer cinq centimètres et étaient recouverts de crasse. Astós en déduisit que malgré cette apparence, Sklerótes était toujours la même.
Elle s'étira et entama ses premiers ordres.
- Bon, écoute, on va aller au repère. Il est situé à Oisticis. Tu vas devoir y aller à pied. Et t'as de la chance que je ne te laisse pas ta sœur sur les bras.
La mâchoire du jeune prince faillit se décrocher sous la surprise. Il s'énerva :
- C'est une blague, j'espère ? Oisticis ? Mais c'est à une semaine de marche !
- Tututututu, on ne discute pas !
- Et comment tu vas y aller t-
- J'ai dit TUTUTUTUTUTU ! Tu la fermes ! dit-elle en claquant des doigts.
Astós voulut riposter, mais sa bouche refusait de s'ouvrir. Il passa ses doigts dessus et comprit qu'il était victime d'un sort. Sklerótes ricana et claqua des doigts en essuyant une larme qui perlait au coin d'œil.
- Ahahaha ! Tu aurais vu ta tête ! Bon, bref, elle se racla la gorge pour reprendre son calme et continua. Tu te débrouilles, mais tu as trois jours et tu prends tes petites jambes. Pas un de plus. Si tu arrives plus tôt, eh bien, tant mieux pour toi ! Sinon, (elle darda sa langue), je pense que tu ne préfères pas savoir ce qu'il se passera si tu arrives plus tard. Je serais toi, je ne prendrai pas ce risque.
Elle claqua de nouveau des doigts. Cette fois-ci, un compteur apparut au-dessus de l'épaule d'Astós. Il commença le décompte à partir de 72 : 00 : 00.
71 : 59 : 59
71 : 59 : 58
71 : 59 : 57
Il lança un regard plein d'incompréhension à la monstresse. Elle lui adressa son plus beau sourire, puis disparut en un nuage de fumée, emportant la douce Kyria endormie.
Astós bougonna. Il s'approcha des murs en évitant soigneusement de marcher sur les cadavres étalés au sol. Il brisa le verre d'un cadre et s'empara de la carte qui y était exposée.
Il examina la carte et en déduisit son itinéraire.
- Bon sang ! Pourquoi fallait-il qu'il soit si loin ? pensa-t-il. Jamais je ne vais réussir !
Il eut une idée. Les chevaux. Les chevaux ! Il se dirigea d'un pas vif vers les écuries. Il passa le seuil de la porte, mais aucun bruit. Aucun cheval. Rien. Juste un petit papier déposé bien en évidence sur une botte de foin. Il le prit entre deux doigts et lut :
Eh non vieux, pas aujourd'hui, je t'ai dit À PIED.
Il fulmina. Tapa des pieds puis regarda la petite horloge qui flottait sur son épaule. Oups. Déjà quinze minutes de passées.
Il se mit à courir, il observa une dernière fois sa carte avant de la rouler pour la coincer dans sa ceinture. Il courut longtemps. Très longtemps, et le temps, c'était long. Il semblait parfois s'étirer, ne jamais avancer quand le paysage était toujours le même, quand les arbres de la forêt étaient tous de la même espèce. Ou au contraire filer comme l'éclair quand il était perdu dans ses pensées. De temps en temps, il s'arrêtait de courir, lorsqu'il arrivait dans un village voisin ou près d'une rivière. Il s'arrêtait pour observer sa carte puis se rappelait que le temps, lui ne prenait pas de pause. Il avait déjà fait la moitié du chemin, mais il ne lui restait plus que trente heures et une montagne à escalader.
Il commença l'ascension du mont Óros Hýpsiston, montagne rocailleuse et hostile. Les bestioles toutes plus dangereuses les unes que les autres faisaient la tanière dans ces coins défavorables aux humains. Peu d'hommes avaient le courage, l'audace, ou bien la bêtise d'escalader les rudes falaises.
De la bêtise, oui, c'était sûrement ça. Mais c'est l'amour qui l'avait poussé là, Astós en était bien conscient. De plus, la nuit tombait.
Les parois rocailleuses avaient laissé place à une dense végétation. La forêt était encore plus épaisse que celle près du palais. Le palais... Il lui manquait, mais y penser lui laissait un gout métallique dans la bouche, le gout du sang.
Il n'avait plus cessé de courir, mais même pour lui, qui était très endurant, et malgré le fait qu'il descende une pente, Astós était épuisé. Sa vigilance était retombée. Si bien qu'il n'entendit pas les branches craquer derrière lui et qu'il n'avait pas remarqué qu'il était suivi. C'est seulement alors qu'il reprenait son souffle, entre deux foulées, qu'il l'entendit.
Crac !
Il était encerclé. Il dégaina son épée si vite qu'il put trancher la tête de son assaillant, mi-puma mi-poule. Celle-ci roula à ses pieds et son corps sans vie s'affala dans la terre. Mais ils étaient plusieurs, une dizaine, ils devaient peser au moins 100 kilos par tête, leurs griffes étaient acérées et tranchantes.
" Mais mon épée aussi " se dit intérieurement Astós. C'est alors qu'il commença à les pourfendre, un par un tentant tant bien que mal d'éviter les griffures et les morsures de ses assaillants. Mais trop c'est trop.
L'un d'eux bondit sur le jeune prince, qui s'écroula au sol. Il levait son épée, mais dans cette position, elle était bien inutile. Il était si faible, si épuisé qu'elle lui tomba des mains au premier coup de pattes. Le "sauteur" qui l'avait envoyé au tapis repris de l'élan et se jeta sur Astós, sans défense, au sol, exténué. C'était peut-être la fin ?, se disait-il. Il l'espérait un peu aussi d'ailleurs. Il protégea son visage de ses mains par simple réflexe, paumes vers le ciel.
Et l'impossible se produisit.
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Les Héritiers de Feu - 1. Liés par le sang [EN RÉÉCRITURE]
FantasyGROSSE RÉÉCRITURE EN COURS ! - Lors d'une somptueuse fête organisée par la noblesse, les Dnophos, des créatures terrifiantes surgies de l'ombre, font irruption et sèment la mort. La princesse Kyria est maudite par l'une d'elles, et son frère Astó...