Chapitre 17

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Clara m'a fait visiter l'aile nord en entier, et j'avoue que c'es bien plus grand que ce que je pensais. Il y a l'espace « nuit », là où sont les chambres, l'immense salle à manger où tous les initiés se retrouvent trois fois par jour, l'espace de détente avec piscine, et soins du corps pour les filles, terrain de sports pour les courageux et une grande bibliothèque. Si un jour, je disparais, ce sera dans cette pièce remplie de livres. Il y a aussi une grande cour avec une écurie pleine de cheveux magnifiques, un jardin très reposant et, bien évidemment, un gigantesque espace d'entrainement comprenant plusieurs salles de tailles différentes. Chaque pièce de l'aile nord est organisée et décorée dans un style bien précis, ayant pour but, comme me l'a expliqué Clara, de conditionner l'esprit des initiés selon les activités prévues. Exemple : on ne va pas mettre un nounours en peluche tout mignon dans la salle d'entrainement au corps à corps, puisqu'on est censés se cogner dessus... ou du moins faire semblant. Après la visite, j'ai regagné ma chambre et me suis effondrée sur mon lit, épuisée d'avoir tant marché. J'ai toujours été nulle pour évaluer les distances mais je pense avoir fait au moins deux kilomètres. Je m'endors comme une souche, sans même prendre le temps de fermer les volets.

La sonnerie d'une cloche me tire de mon sommeil cotonneux. Je jette un œil par la fenêtre et constate que le soleil est en train de se coucher. Je me lève en hâte : Clara m'avais dit que la cloche annonçait que le repas était servi. Au moment de sortir, je m'arrête. Mes cheveux... je ne peux pas me montrer comme ça. Quelqu'un frappe à ma porte et je me décide à ouvrir. Sheril entre dans ma chambre et je distingue l'effervescence derrière elle, causée par tous les initiés qui se rendent à la salle à manger.

— Je t'ai apporté quelque chose, dit-elle en sortant un foulard vert comme ma robe de sa poche, je me suis doutée que tu ne voudrais pas que les autres te voient ainsi.

— Merci Sheril.

Pour un peu, je me mettrais à pleurer mais ce n'est pas le moment. Mon amie noue le foulard autour de mon front et le laisse pendre derrière ma tête. Il est suffisamment long pour cacher mes cheveux manquants et mon bandage disparaît totalement grâce à lui.

— Il te va vraiment bien, commente Sheril, allez maintenant, il faut que tu ailles diner. Ne te force pas à discuter avec les autres si tu n'en as pas envie et ne t'inquiète pas de les vexer : ils sont habitués aux nouveaux peu bavards. Mange, c'est tout ce que je te demande. D'accord ?

— D'accord.

Je sors de ma chambre, anxieuse, et suis la foule des initiés jusqu'à la salle à manger commune. Le garçon de l'infirmerie, Jay, me repère et s'approche de moi. Mon angoisse montre d'un cran mais il ne dit rien et tire une chaise pour que je m'y installe. Il s'assoit à côté de moi et me sourit.

— Désolé pour la dernière fois, dit-il tout bas, j'ai été lourd. Je te promets de ne pas recommencer.

Je hoche la tête et baisse le nez. Je ne me sens pas à ma place parmi tous ces jeunes d'entre quinze et vingt-cinq ans. Il y a trop de bruit, trop de monde que je ne connais pas, trop d'informations, trop de... trop. Je suis à deux doigts de filer à l'anglaise mais tout d'un coup, le silence se fait, progressivement. Je lève le nez et repère l'intendant Hector et deux autres hommes en bout de table, debout face à nous. L'intendant est à la gauche d'un homme grand aux cheveux poivre et sel, vêtu élégamment et imposant le respect par sa seule présence. Il jette un regard circulaire sur la tablée, donnant l'impression que rien ne lui échappe. Ses yeux sont d'un bleu très pâle, sans doute dû à son âge, et son visage est assez ridé. Malgré tout, il n'a rien perdu du charme qu'il doit avoir depuis son plus jeune âge. Nos regards se croisent soudain. Je voudrais baisser les yeux mais impossible. Cet homme me fixe si intensément que je ne peux rien faire d'autre que le regarder en retour.

Ushuara - La chasse a commencé (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant