Chapitre 20 : Nous mènera vers la Haute Cité.

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(Booooon. Alors. 
Ce chapitre a été douloureux. 
Pour énormément de raisons. Déjà... Parce qu'on arrive à la fin de quelque chose. Et ensuite... Je vous laisse lire. 
Avec cette chanson qui m'a accompagnée énormément dans l'écriture de tout le livre. ) 

 Alcestia s'élance vers sa mère, vers l'autel, là où tous sont rassemblés afin de faire ployer ce serpent, ce dragon qui de ses griffes étrangle Hillmoore depuis des décennies.
Mais Helen... Helen ne peut la laisser approcher.
Faisant fi de sa blessure, la contrebandière glisse sur le marbre, bloque son ancienne élève du tranchant de son épée.
"Laisse-moi!" Lance la Maréchale, toutes les nuances de la colère et de l'inquiétude se disputant le masque de sa froideur militaire.
"Navré," Helen la repousse plus loin dans l'allée, l'écartant de son but. "Nous avons encore une affaire en suspens."

Leur duel reprend, sans qu'aucune ne fasse de concession, ne cède un pouce de terrain. Mais, et Enora le constate non sans soulagement, Alcestia ne semble plus autant dominer la partie, trop occupée à vouloir rejoindre sa mère, trop fatiguée sans doute de sa longue échauffourée avec deux des plus habiles bretteurs de Sulver.
Tant mieux... Car sur l'autel, ils ont fort à faire.
Tally, même encerclée, ses Gardes désarmés un à un par les sabreurs, refuse de plier. Malgré la menace de l'explosion imminente, malgré le danger...
Enora... ne dit rien. Se fond dans l'ombre, disparaît... contourne le marbre au centre de la nef...

"Vas-y, garde du corps..." tance la Lady, ses yeux exorbités, maniaques... "Vas-y! Qu'est-ce que tu attends! Appuis sur ce bouton! Tues-nous! Tous! Fais-le!"
"Vous allez nous faire exécuter!" Les gens de la Haute sont affolés, sortent de leurs cachettes. "S'il vous plaît, non! Pitié non!" Ils se mettent à genoux. Implorent, les mains tendues, les lèvres tremblantes.
"Ils n'oseront pas," s'esclaffe la Lady, "Ils n'ont pas ce qu'il faut! Aucun courage!"

 Emyl ne semble pas impressionné par cette démonstration de folie.
Toujours stoïque, il tourne son regard vers Nightingale, semble lui demander la permission d'agir. Si l'un d'entre eux peut décider de leur destin... C'est bien celui par qui la paix doit arriver.
Le Ménestrel caresse du bout du doigt le morceau de tissu noué à son poignet. Et baisse doucement la tête.
Emyl hoche la sienne. Approche son pouce du bouton sous les vagissements désespérés des paons en velours se roulant sur le sol...

Enora jaillit de derrière l'autel, en un seul bond qui détend tous ses muscles, saisit la Lady par les cheveux, tirant en arrière sa noble gorge, sous laquelle elle applique prestement la lame de son couteau, encore tachée du sang d'Hexel.
"Prends les papiers! Vite!" Ordonne-t-elle à Nightingale, prompt à lui obéir, son bras droit montrant quelques signes de vie à nouveau.
La Lady se débat. Sans pitié, Enora enfonce ses ongles dans son scalp, tire avec violence, sa lame appuyant sur la jugulaire de son ennemie.
"Tu penses que j'hésiterais..." souffle-t-elle dans l'oreille de ce démon. "Tu as tué mon oncle. Tu as tué ma sœur. Bouge un cil... Et ton corps servira d'engrais aux roses que je ferais pousser sur leurs tombes."

Night a fini de fouiller Tally, ressortant enfin le précieux sésame du fond de ses poches.
"Ose, ma fille..." Siffle la Lady. "Ose. Tu ne m'arrêteras pas. Pas au moment de mon triomphe."
"Tu as perdu!" Crache Enora. "Tu as perdu, admet-le!"
"Jamais!"

"Rends toi! Maman!"
C'est Alcestia, toujours aux prises avec Helen, qui l'empêche d'approcher en quelques passes précises.
"Maman!" Appelle encore la soldate, d'une voix où l'inquiétude se mêle à la peur de tout perdre une nouvelle fois. "Fais ce qu'ils te disent! S'il te plaît! Ça ne vaut pas ta vie!"
Enora tourne la Lady vers ce combat sous le couvert des sabreurs, l'oblige à avancer à bas de l'autel, au début de l'allée, à contempler le combat que mène sa progéniture.
"Fais ce qu'elle te dit, ma Lady..." Déclare Nightingale. "Écoute ton enfant. Ne la prive pas d'une mère en plus de lui avoir volé sa vie." Il lui tend les feuillets. "Abdique. En faveur d'Enora."

"Quoi?"
La PrésiDuchesse manque d'en lâcher sa prise.
"C'est la meilleure solution," reprend le Ménestrel, approchant les précieux papiers de Tally, ses yeux plantés dans ceux de son amie. "Elle s'est rendue maîtresse de Sulver grâce aux jeux des alliances. Mais elle n'en reste pas moins membre de ta famille. Hexel, ton oncle et Lucia hors du tableau... Si elle renonce à ses droits.... Enora, tu seras l'égal d'une Reine aux yeux de Sulver."
"Bon sang... Night c'est du génie!" S'écrie Emyl, sans toutefois éloigner son doigt du détonateur.
"Non!" Crache Tally, dardant sur Nightingale des yeux assassins. "Cette petite dinde ne me prendra pas ma couronne! Ni cette de ma fille!"

"Et pourtant..." Le Ménestrel désigne les membres de la Haute agenouillés. "Ceux-là ne désireraient-ils pas la voir à ta place? Nobles gens de High City... Vers qui va votre faveur?"
"Lady Langley!" s'empressent-ils de répondre. "Enora Langley!" "Oui! Enora..."
La PrésiDuchesse est... abasourdie, pour dire le moins. Jamais elle n'aurait songé... Elle n'entretient aucun désir de se retrouver avec un tel pouvoir mais...
"Songe à ce que tu pourrais en faire," lui parvient la voix de son ami, l'or de ses yeux brillant d'une éclatante sincérité. "À ce que tu pourrais accomplir. Réaliser notre rêve de Basse-Fosse. Rendre Sulver au peuple, au..."
"Non! Non!" se débat la Lady. "Jamais je ne signerais ceci! Jamais! Alcestia! Tues-les! Tues-les tous!!"

"Maman non!" S'écrie la Maréchale. "Obéis! Je t'en conjure!"
"Pour ta fille!" réclame Helen. "Julia! Sois raisonnable!"
"Tu aurais dû crever Samson!" La haine vibrant du corps de la Lady est palpable, Enora a l'impression d'avoir plongé les mains au cœur d'une fournaise. "Tu aurais dû crever sur le champ de bataille comme prévu! Tous ces efforts! Tous ces efforts pour t'envoyer-là bas, et tu t'es même pas foutu de savoir quand t'allonger pour mourir comme la chienne pustuleuse que tu as toujours été. Tu aurais dû mourir à Atelagne Samson! Ça m'aurait enfin débarassé de toi! Et de tes vues sur ma fille!"

Nightingale et Enora se figent, échangent un regard médusé.
Helen en rate une passe, mais Alcestia n'en profite pas... Elle se tient debout, interdite... Son épée s'abaissant comme de son propre chef. Sonnée par cette révélation.
"Dites-moi que je rêve..." Murmure Emyl, depuis l'autel. "Oh non... J'aurais dû m'en douter... C'était si prévisible..."

La Ballade du Pont des Anges - Tome 3 : EnoraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant