Cum tristitia et ira mix: Quand tristesse et colère se mélangent

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Je suis infiniment triste. Et en même temps, je tiens le coup. Parce que je suis en colère. Plus que je ne l'ai jamais été.

C'est très étrange. Je n'ai jamais été aussi triste et en colère en même temps. C'est une expérience nouvelle pour moi. Bien sûr que je suis triste. Les personnes qui ne le sont pas quand elles se font abandonner n'aimaient pas la personne qui  l'a abandonné. Mais moi je l'aimais. Mon père est tout pour moi. Alors ça me fait un vide. J'ai beau me dire que peu importe mes choix, ça n'aurait rien changé, je suis quand même déprimée. J'essaye de penser à autre chose. J'y arrive assez. Je suis à un moment de transition dans ma vie qui nécessite beaucoup de temps et de concentration. Alors souvent, je laisse ces pensées intrusives de côté.
Mais je ne peux pas m'empêcher d'y penser parfois. Alors je suis en colère. Je lui avais dit que j'avais peur de le perdre. Que j'avais peur de me faire abandonner. Mais il l'a quand même fait. Il m'a abandonné. Moi je croyais en lui. Plus maintenant. Il m'a perdue.
Et ça me met en colère. Car un père n'est pas sensé abandonner sa fille. Un père est sensé aimer sa fille. Mais non. J'ai fait tellement d'efforts. Inutiles.
Le fait d'avoir été impuissante me met en colère.
Beaucoup de choses me mettent en colère.
C'est la première fois que ça m'arrive. D'habitude, quand il m'arrive des trucs pas cool, je suis seulement dévastée. Et après je me reconstruis en conservant les cicatrices de mes blessures passées. Mais là, étrangement, ça ne s'est pas passé comme ça. Peut-être parce que jamais je n'aurais cru cela possible si on me l'avait dit avant. Rien n'est impossible. Même les choses que l'on aimerait qu'elles soient impossibles.

De toute évidence, la colère me permet de tenir. De ne pas m'effondrer. Mais je ne veux pas être en colère. Je n'ai pas l'habitude de gérer cette émotion. J'ai toujours été calme. Même quand c'était la tempête dans ma tête. Je n'aime pas être en colère. Il m'arrive d'être désagréable avec les autres sans même le vouloir. Je ne me reconnais plus. Trop de souffrances font-elles changer comme cela? Je ne veux pas. Je m'étais presque acceptée comme j'étais. Pourquoi je devrais changer maintenant. Je ne veux pas avoir à m'apprendre de nouveau. À m'accepter de nouveau.
Je continue à espérer quelque chose de lui. Et ça m'énerve aussi. Parce que je sais que j'ai de grandes chances d'être encore déçue. Mais je n'arrive pas à ne pas espérer. Ça, c'est bien moi. Trop naïve. Trop gentille. Trop conne.

En fait, je ne suis pas seulement en colère contre lui. Je suis aussi en colère contre moi. Et je crois que ça m'énerve encore plus. Je sais bien que je ne pouvais rien y faire. J'ai trop l'habitude de me détester quand quelque chose ne va pas. Même si ce quelque chose n'est en rien ma faute. Aurais je du me laisser mourir intérieurement ? Ce n'était pas et ce n'est toujours pas une bonne solution. Mais ce qui s'est passé m'a en quelque sorte tuée. C'est comme si je devais faire son deuil alors qu'il est encore vivant. Je dois faire le deuil d'un père. Comme j'ai fait celui d'une mère. Orpheline. Pas parce que mes parents sont morts. Parce qu'ils sont et ont toujours été incapables de bien s'occuper de leurs enfants. À quoi bon avoir des enfants si c'est pour les faire souffrir ?

Que quelqu'un m'explique ! Pourquoi faire 4 enfants, si on n'arrive pas?
Pourquoi s'obstiner? Pourquoi créer des problèmes et de la souffrance? N'y en a-t-il pas assez dans le monde?

Si Dieu existe, expliquez-moi pourquoi je subis ça depuis ma naissance? Qu'ai-je fait? Qu'est-ce qu'un enfant a pu faire pour souffrir ainsi?
Je sais que je ne serais bientôt plus une enfant. Que je serais majeure. Mais ça n'enlève rien. Encore moins le fait d'avoir souffert toute ma vie. Ma vie se résume à cela. La souffrance. Et l'espoir. L'espoir d'une vie meilleure. Le combat pour une vie meilleure. Je n'ai jamais abandonné. Mais pourquoi? À quoi bon? Je veux vivre. Mais parfois je me dis que je déteste cette vie là. Je déteste souffrir. Comme beaucoup de personnes. Mais je n'ai pas eu le choix. C'est comme si on me faisait payer le fait d'être née.
C'est triste. Tout ça. Désolant. Désespérant. Ignoble. La souffrance n'est pas toujours ignoble. Mais quand on ne peut pas se défendre. Elle est ignoble. Comme si mon destin était de souffrir indéfiniment. Je ne veux pas de ça. Je veux être heureuse. Je me bats pour être heureuse. Un jour, peut-être, je serais heureuse.

Pas tout de suite. Je dois encore guérir. Et c'est difficile. Ce n'est jamais facile. Surtout quand les blessures sont profondes et infectées. Et sur infectées. Il y a du pus. Il faut nettoyer. C'est douloureux de prendre soin de la plaie pour la faire cicatriser. C'est un processus long. Et c'est douloureux de triturer une plaie. Mais en réalité, je ne dois pas mettre cela de côté. Ça ne ferait qu'empirer les choses. Mettre cette souffrance dans mon inconscient et créer des traumatismes. Non. Il ne faut pas. Ce n'est pas comme si je n'en avais pas suffisamment. Alors il faut que je regarde la vérité en face. Je laisse jusqu'à ma majorité à mon père pour qu'il revienne sur sa décision de m'abandonner. Après, je ne sais pas si je serais capable de lui pardonner. En tout cas, certainement pas facilement. Je ne veux plus être « trop gentille, trop conne ». Ça ne me dérange pas d'être gentille. J'aime faire plaisir aux gens. Surtout aux personnes que j'aime. J'aime le fait qu'elles soient heureuses. En quelque sorte, ça me rend heureuse. Mais je ne veux plus me faire pigeonner. Je ne veux plus souffrir parce que j'aurais été trop naïve. Si on ne veut plus de moi, je ne courrais pas après les gens. Ils ne me méritent pas. Les personnes qui me méritent sont celles qui m'aiment telle que je suis et qui tiennent vraiment à moi. Ces personnes-là sont incroyables et magnifiques. L'amour n'a pas de prix. Et le partage de cet amour non plus lorsque la relation est saine.

Mais au final. Le principal problème, c'est la communication. Il n'a pas voulu entendre pendant toutes ces années. Il n'a pas voulu comprendre. Tant pis. Pour lui. RAS LE BOL ! J'ai voulu arranger les choses en parlant, ça n'a pas fonctionné. J'ai fait tout ce que j'ai pu. Je ne peux et ne pouvais rien faire de plus. Peut-être que vous me direz que je suis seulement en train de me rassurer. Peut-être. Après tout, je n'ai jamais voulu le perdre. Je l'ai toujours aimé. Et je l'aime toujours. Malgré le fait qu'il n'est pas parfait. C'est normal. C'est simplement dommage qu'il n'ait pas écouté mes ressentis. Au fond, je ne l'accusais pas. Ce n'était pas mon intention. Ne voulais simplement enfin lui dire clairement tout mon ressenti intérieur. Lui dire ce que MOI je ressentais. J'aurais aimé qu'il comprenne cela. Mais on ne peut pas tout faire dans le monde. Ça. C'était peut-être impossible. Qui sait? Avec d'autres variables, ça aurait pu se passer autrement.

On refait des mondes avec des « si ». C'est en partie ce qui m'aide à espérer. J'imagine un monde meilleur. Mais aussi, je peux imaginer un monde pire. Mes cauchemars. Terribles. Si réalistes ! Tellement que c'en est effrayant. Lorsque je suis énervée, c'est un monde de destruction. Je détruis. Quand je suis énervée, le monde va bien, c'est moi qui me détruis et qui suis détruite. Autant dire que ce n'est pas joyeux. Dormir n'est pas très facile. Il suffit d'une seule pensée malencontreuse. Et la place est aux cauchemars.

Ça ne m'empêche pas d'espérer. De vouloir m'en sortir. Ça m'empêche simplement de dormir.

Un jour, peut-être, je serais heureuse...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant