Chapitre XVIII : Nuit de brume

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Nalira s'endormit, blottit dans les bras de Lyra, un silence sourd enveloppait la pièce. Avec précaution, la jeune femme se leva et déposa l'enfant dans son lit. Elle remonta ensuite la couverture sur ses frêles épaules, puis reprit place sur la petite chaise. Quelques minutes plus tard, des pas résonnèrent dans le couloir. La porte s'ouvrit, laissant entrer le vieux médecin de la famille. Le Comte, qui s'était retiré dans un coin de la chambre, vînt à sa rencontre. Le vieil homme le salua respectueusement et s'empressa de demander :

- Savez-vous ce qui a pu déclencher cette nouvelle crise ?

Il sortit de son gros sac en cuir usé, quelques herbes médicinales ainsi qu'un thermomètre rudimentaire.

Ardenis se tourna vers Lyra.

- Vous étiez auprès d'elle, peut-être pouvez-vous nous éclairer sur la question ? demanda-t-il froidement.

Les deux hommes fixaient la jeune femme, l'un avec curiosité, l'autre avec méfiance.

- Mademoiselle Nalira venait juste de se réveiller, il ne s'est rien passé de particulier.

- Excusez-moi Mademoiselle, intervint le médecin, mais qui êtes-vous ? C'est la première fois que je vous vois au chevet de ma patiente.

- Lyra Artelis Monsieur.

- Artelis ? Ne seriez-vous pas la domestique qui a sorti Mademoiselle Nalira de la rivière ?

- Oui, en effet... affirma Lyra tristement.

Le vieux médecin prit le Comte a parti et lui demanda doucement et avec intérêt :

- Monsieur, avez-vous interrogé cette jeune femme sur les circonstances de l'accident ?

- Oui. Malheureusement, j'ai la ferme conviction que nous ne saurons jamais ce qu'il s'est réellement passé ce jour là.

-  Vraiment ? Pourquoi cela ?

Ardenis jeta un regard froid en direction de Lyra qui baissa les yeux. Le vieil homme s'adressa alors directement à cette dernière :

-  Mademoiselle Artelis ?

Lyra prit une grande inspiration et décida de passer aux aveux. Elle était convaincue que cela anéantissait totalement ses chances de rester un jour de plus au domaine, cependant, perdre son travail lui importait peu ; non, ce qui l'inquiétait réellement était de ne pas pouvoir rester auprès de Nalira.

- Je comprends vos doutes Monsieur le Comte, et votre jugement à mon égard deviendra plus défavorable encore à la fin des aveux que je m'apprête à vous faire. Toutefois, si cela peut véritablement aider Mademoiselle Nalira, je suis prête à assumer toutes les conséquences de mes actes. 

Lyra serra le poing contre sa poitrine, cherchant à se donner le courage nécessaire pour poursuivre :

- Il se trouve, que j'ai totalement outrepassé mon rôle de femme de chambre avec Mademoiselle Nalira. Chaque jour, nous nous retrouvions dans la petite clairière derrière les jardins, juste avant sa leçon de l'après-midi. Notre amitié s'est rapidement renforcée et, lorsque j'ai dû quitter le domaine, Mademoiselle en a été profondément affectée. Le jour de mon départ, je l'ai vue courir en direction de la voiture dans laquelle je me trouvais ; j'ai demandé au cocher de s'arrêter, mais en quelques secondes, elle a glissé et est tombée dans la rivière. J'ai couru aussi vite que possible, mais hélas, hélas, il était trop tard. Elle avait déjà perdu connaissance. 

Lyra marqua une pause, puis ajouta d'un air sincèrement affecté :

- Vous n'imaginez pas à quel point je me sens responsable de tout cela. Si j'étais restée à ma place, rien de cela ne serait arrivé...

Le Chant De La PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant