Minho, ou l'art culinaire des sushis aux câlins

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        La musique encore à fond dans mon casque, je fouille mon sac à la recherche des clés de l'appartement que j'attrape du bout des doigts. Lorsque j'essaie de les insérer dans la serrure, celles-ci ne tournent pas. Chan a dû laisser ouvert pour moi. Pourtant, j'entre dans une pièce plongée dans l'obscurité. Seule la lumière bleue d'un écran allumé sur le canapé ressort et je m'en approche discrètement après avoir verrouillé derrière moi.

        Alors que je m'attends à voir Chan encore penché sur son ordinateur, à se détruire les rétines sur son logiciel de composition, je reconnais la silhouette de Jisung, plus fine que celle de mon colocataire. Il est absorbé par les courbes sonores auxquelles je ne comprends rien et je devine que la musique est reliée à ses écouteurs en voyant sa tête bouger en rythme.

        Un mouvement sur sa gauche me sort de ma contemplation et surprend le châtain qui tourne la tête sur le côté, son regard quittant l'écran pour se poser sur la partie du canapé que je croyais libre. Dans la pénombre, je distingue difficilement un corps allongé et devine aux cheveux bouclés en bataille qu'il s'agit en réalité de Chan. En me concentrant, je perçois le son de sa respiration lente et régulière et je prends alors conscience du miracle sous mes yeux. Chan dort. A 19 heures, il est déjà perdu dans les bras de Morphée comme un petit bébé. La main de Jisung quitte le clavier sur lequel elle travaillait pour se tendre au-dessus du corps à ses côtés. Il attrape doucement le plaid qui a glissé lors du mouvement endormi du plus âgé pour le remonter correctement jusqu'en haut de ses épaules. Son regard s'attarde sur mon colocataire et, malgré la pénombre, je pourrais jurer que ses yeux sont emplis de sollicitude pour celui qui est devenu son ami ces derniers mois.

        Cette scène vient tordre mon ventre et embaumer mon cœur alors qu'un sourire incontrôlé prend place sur mes lèvres. Voir Jisung aussi soucieux du bien-être de Chan, la personne qui compte le plus au monde pour moi, me fait à nouveau tomber un peu plus pour la personnalité du plus jeune. Mon corps frissonne à cette constatation, faisant crisser le sac en papier que tient ma main gauche. A ce faible son brisant le silence profond dans lequel était plongée la pièce, Jisung se retourne dans un sursaut, ses yeux venant trouver les miens. D'un geste lent, il monte son index à ses lèvres pour me faire signe de ne pas faire de bruit et soulève l'ordinateur de ses jambes pour le poser sur la table basse devant lui et s'approcher de moi.

        Sans un mot, sa main accroche la mienne et me tire vers le couloir qu'il ferme doucement avant d'enfin laisser échapper un chuchotement.

        — On peut aller dans ta chambre ?

        Je hoche la tête à sa question, comprenant qu'il souhaite nous isoler pour pouvoir parler normalement en étant sûr de ne pas déranger le sommeil de Chan. Je passe devant lui, mon corps frôlant le sien dans l'espace exiguë menant aux chambres et ouvre la porte de la mienne en l'invitant à me suivre. En attendant qu'il referme derrière lui, je pose mes affaires sur mon bureau mais lorsque je me tourne vers lui pour l'inviter à s'asseoir sur le lit, je le trouve immobile dans l'encadrement de la porte toujours grande ouverte. Ses yeux ronds agrandis de surprise, sa bouche entrouverte, l'ensemble de son corps comme soudainement figé dans son mouvement, il semble complètement perturbé pour une raison que je ne saisis pas.

        — Tout va bien Hannie ?, je demande alors, toujours à voix basse, étonné de le trouver dans cet état à la simple vue de ma chambre qui est tout ce qui existe de plus sobre.

        Son visage vire au rouge alors qu'il secoue légèrement sa tête, comme pour se sortir de son étrange torpeur. Il referme précipitamment derrière lui avant de venir s'effondrer sur le lit alors que je prends place sur la chaise de bureau, face à lui.

Inodore [minsung]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant