Inodore [minsung]

Minho, ou quand même les phéromones prennent leur liberté

        Je me force à empêcher ma main de trembler alors que j'appuie sur la poignée du haut portail noir. Je suis bien moins confiant que je ne l'étais il y a deux jours. J'ai passé ces dernières 48 heures à réfléchir, passant de nombreuses heures attablé avec Chan pour envisager toutes les possibilités, quantités d'appels avec chacun de nos amis pour m'informer sur la manière dont ils se débrouillent, échouant à paraître complètement serein face à Jisung qui n'a fait qu'exprimer son soutien en permanence.

        Ce moment où je reviens chez mes parents, non pas pour leur donner le nom de ma future épouse mais pour couper les ponts avec eux, cette scène que je n'aurais jamais pensé arriver un jour, je l'ai rejouée nuit et jour dans mon esprit. J'ai imaginé tous les scénarios possibles, simulant chaque détail pour ne pas perdre mes moyens le jour J. Mais rien de tout cela ne m'a réellement préparé à cet instant, celui où j'entends mon cœur pulser dans mes oreilles tant j'angoisse à l'intérieur de moi. Je vais me rebeller contre l'autorité parentale, celle qui m'a étouffée toute ma vie sans que je n'ose rien dire. Je vais quitter tout ce que je connais pour sauter à pieds joints dans le gouffre de la vie indépendante, et bon dieu que cela fait peur.

        Je dirige mes pensées sur les messages d'encouragement que Jisung m'a confiés, son visage apparaissant dans mon esprit ralentissant légèrement mon rythme cardiaque. Ma main est moite lorsque j'abaisse enfin la poignée, poussant enfin le portail pour pénétrer dans le jardin toujours aussi parfaitement tondu et taillé. Je remonte l'allée en respirant lentement, me concentrant sur les paroles que j'ai décidé de prononcer.

        Les deux voitures de mes parents sont visibles devant le garage, parfaitement propres, brillantes sous le soleil d'été. Ils sont donc déjà présents. Je crois que je ne me souviens plus de la dernière fois où je suis venu à la maison en les trouvant tous deux ici. Cela ne fait que refléter un peu plus le sérieux avec lequel ils considèrent cette situation.

        Pour la première fois de ma vie, je sonne à l'entrée, comme un premier symbole que cette maison n'est plus la mienne. J'entends des voix s'énerver à l'intérieur avant que le battant de la porte ne s'ouvre devant moi pour laisser apparaître Mme Nam dont les yeux s'écarquillent de surprise en me voyant en train de patienter dehors. Elle se courbe précipitamment pour me saluer, s'écartant du passage et je pénètre dans le couloir qui n'a pas changé d'un poil depuis ma dernière visite. Tout comme mes parents en somme. Mon regard s'attarde vers les chaussons que vient de me sortir Mme Nam, hésitant longuement à suivre mes réflexes d'éducation et à retirer immédiatement mes chaussures avant de me raisonner.

        — Merci, mais je ne vais pas les utiliser, je repars dans quelques minutes, je m'explique, cherchant tant bien que mal une excuse pour un tel manquement de manières. Désolé pour le ménage supplémentaire.

        — Vos parents m'ont signalé que vous déjeuniez ici, monsieur, m'interroge-t-elle, visiblement perdue sur les événements.

        — Ça ne va pas se faire comme ils le souhaitent. Vous feriez mieux de rester dans la cuisine pour le moment Mme Nam.

        Je vois à ses yeux que mes paroles l'inquiètent. Si une personne sur cette terre connaît le véritable visage de mes parents, c'est bien elle. Elle travaillait déjà pour eux lorsque je suis né et j'ai eu l'occasion d'observer le traitement qu'ils lui réservent à plus d'une reprise.

        C'est en lui adressant un sourire que j'espère rassurant que je me dirige vers la large salle à manger où règne un silence glacial. Je serre mes points sur mon pantalon, essuyant mes paumes moites sur le tissu alors que je passe le pas de l'arche qui sépare les deux pièces. Immédiatement, les deux visages de ceux qui se prétendent mes parents se tournent vers moi, toujours aussi austères.