PARTIE II : Chapitre 5

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Dix-sept ans étaient passés.

Kate s'approcha de la baie vitrée qui ornait son salon.

Un thé fumant entre les mains, elle regarda la ville à travers la fenêtre, plongée dans la nuit à cette heure.

Dix-sept ans... et pourtant, elle se souvenait de la mort de Jade comme si c'était hier.

Elle se rappela que lorsqu'elle avait été retrouvée avec ses amis, les officiers qui avaient arpenté le lieu minutieusement, car ils avaient appris qu'il y avait encore une victime à l'intérieur, avaient retrouvé le corps de la petite Jade dans la fontaine du patio, au milieu de la maison. Son corps inanimé flottait sur le ventre, comme si elle avait été noyée. Ils n'avaient pas pu la réanimer.

Le petit groupe était passé par la procédure normale de questions dans la salle d'interrogatoire du bureau de la police.

Margot était inconsolable. Ayant perdu sa petite sœur, elle ne cessait de pleurer et de crier en traitant Kate de meurtrière, parce que Jade était morte par sa faute.

Mathias était livide, il avait le regard fixe, perdu dans le vide et refusait de dire un mot. Les enquêteurs avaient beau lui poser des questions, il ne répondait pas.

William était excité et même surexcité, ne cessant de parler à tort et à travers, donnant des explications à peine compréhensibles, en faisant de grands gestes, marchant de long en large, tentant d'expliquer l'inexplicable ; il s'en voulait aussi énormément de ne pas avoir pu sauver Jade. Il leur racontait ce qu'ils venaient de vivre comme il le pouvait.

Kate, quant à elle, était prostrée sur sa chaise, comme si son âme s'était envolée. Elle était noyée de remords et de culpabilité. Elle laissait les larmes couler sur ses joues, elle avait perdu toute notion du temps. Elle racontait tout ce qu'ils avaient vécu pendant la semaine d'une voix monotone, le regard vide, elle aussi.

Les agents s'échangeaient des regards, à la fois choqués et compatissants, même s'ils avaient des difficultés à croire tout ce qu'ils entendaient.

Un des agents leur confirma que la maison n'était plus habitée et en ruine depuis longtemps, le lieu abritant une histoire familiale particulièrement dramatique.

Il y avait bien eu un couple, prénommé Agathe et Patrick Taylor et ils avaient bien eu deux enfants, nommés Dereck et Lucas, sans oublier le chien Seth. Leur père était également commercial et il se déplaçait à l'international pendant des durées plus ou moins longues.

Les deux frères avaient aussi l'habitude d'aller au centre de loisirs Parkciant, la famille Taylor faisant des dons assez importants chaque année. C'était une famille très appréciée par le centre et le voisinage.

Mais un jour, Patrick était rentré plus tôt que prévu et avait surpris sa femme avec un livreur.

Fou de rage, il avait éjecté le livreur à grand renfort de coups de poings et surtout, cela l'avait conduit à préméditer sa vengeance. Alors, après son accès de colère, il avait fait comme si de rien n'était pendant plusieurs jours.

Puis un jour, il avait balancé à sa femme qu'il savait tout de son infidélité et qu'il savait aussi que cela durait depuis longtemps. Celle-ci avait d'abord nié, puis s'était excusée en fondant en larmes. Des cris avaient retenti et Patrick avait frappé sa femme pour la première fois de sa vie. Violemment, sans retenue, ivre de rage et de colère, sans regarder où il frappait ; si bien que la pauvre femme avait levé les bras devant elle pour se protéger, mais la rancœur de son mari était telle qu'elle n'avait pas pu éviter les coups. Bientôt, une arcade sourcilière avait été touchée, puis une pommette, puis la commissure des lèvres. Du sang avait éclaboussé les lattes du parquet.

ENTRE TOI, MOI ET EUX...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant