Chapitre 33: Ces instants

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Je n'arrive pas à croire que ce moment arrive enfin. Il y a peu encore je n'avais pas le droit de la toucher et maintenant je peux l'embrasser. Je n'aurai jamais cru cela possible, il y a quelques minutes à peine je pensais qu'elle allait me quitter. Et maintenant elle est contre moi, je sens sa chaleur, je sens ses lèvres humides contre les miennes. Je ne me suis jamais senti aussi connecté à elle auparavant.

On pourrait penser que cela n'est qu'un baiser mais je n'ai jamais vécu de moment aussi intime de ma vie. J'ai le sentiment de n'avoir jamais été tant à découvert avec quelqu'un, aussi à nu. Léto sait ce que je suis, tout ce que je suis, tout ce que j'ai vécu, tout ce que je vis et elle est là, avec moi, contre moi.

Toutes nos nuits à discuter, tous nos rires, toutes les épreuves que nous avons traversés font qu'aujourd'hui un simple baiser soit si intense. Je sais que cela est un cliché mais je comprends enfin tous ces gens qui exprime être sur un petit nuage, cette sensation de ne plus sentir le sol sous nos pieds, d'être enveloppé d'une chaleur réconfortante, comme du coton, et de s'élever, de quitter petit à petit la terre ferme.

J'aimerai que cet instant dure pour toujours mais ce moment doit s'arrêter. À peine nos lèvres se sont-elles détaché que je meurs d'envie de recommencer. Je me demande si tous les baisers seront ainsi, aussi forts. Mais alors que je regarde Léto pour m'assurer qu'elle souhaite la même chose que moi, je remarque que la pluie a recommencé et est devenu plus forte. Léto est trempée, ses cheveux bouclés sont maintenant devenus complètement lisses. Je passe alors une mèche derrière son oreille et ne peux m'empêcher de sourire face à son si beau visage.

J'aimerai rester ici encore, encore et encore mais je ne dois pas oublier son état de santé. Cette pensée est douloureuse mais je ne peux pas l'ignorer simplement car elle me blesse, je dois prendre soin de Léto et cela impose de considérer qu'elle est malade. Je ne peux donc pas la laisser sous la pluie au risque qu'elle prenne froid et d'aggraver son état. Je ne sais même pas si la pluie est vraiment dangereuse pour la santé, mais la seule chose que je sais c'est que je dois lui offrir c'est tout le confort du monde.

— Viens Léto, rentrons.

— Pourquoi ? Nous sommes bien ici ? Je pourrais rester ici pour toujours.

Le sourire de Léto vient illuminer tout ce qui se trouve autour de nous. Elle est heureuse. Il n'existe pas assez de mots pour décrire ce que cela provoque en moi, le bonheur de Léto est tout ce qui compte pour moi.

— Nous seront tout aussi bien à l'intérieur, au coin du feu, ne t'inquiète pas.

Je lui offre un léger sourire pour tenter de la convaincre et de me convaincre moi-même. Moi aussi j'ai peur que ce moment se brise, que de retour à la lumière Léto de souvienne à quoi je ressemble. Mais je dois penser à elle avant de penser à moi.

— Merci Kha.

— Merci pourquoi ? Ce n'est même pas moi qui ait construit cette maison douce et chaleureuse, c'est toi. Donc tu n'as vraiment pas à me remercier. Dis-je en tentant de rester sérieux.

J'offre mon bras à celle que j'aime et elle s'en saisis pour que nous rentrions ensemble. J'essaye de le protéger de la pluie avec ma main mais cela reste vain. Nous pressons donc le pas et en venons à courir pour être le moins trempés même si nous sommes déjà mouillés jusqu'aux os.

Lorsque nous pénétrons dans notre petite maison je sens que Léto est très essoufflée, je m'inquiète alors et me penche pour être à sa hauteur.

— Tu vas bien ? Dis-je en essayant de cacher ma panique.

Je n'ai alors comme réponse que des éclats de rire entre de grandes inspirations. Je suis alors rassuré et cela ne prend que quelques secondes à Léto pour reprendre mon souffle et me répondre.

— Merci Kha.

— Mais c'est normal, je m'assure que tu ailles bien ce n'est pas grand-chose.

— Non pas pour ça.

— Pas pour ça ?

Léto hoche la tête de gauche à droite, un grand sourire aux lèvres.

— Pour quoi alors ?

— De m'offrir ça.

— Quoi donc ? Je te l'ai déjà dit, je n'ai même pas construit cette maison, la seule chose que j'ai réussi à faire tout seule c'est mettre ces fleurs dans ce vase et cette soupe dans la marmite. Pas de quoi me féliciter. Vraiment.

Des rires emplissent alors la pièce et je suis heureux de rendre Léto si joyeuse. Même si je ne comprends pas pourquoi, cela m'importe peu.

— En effet je n'ai pas de raison de te remercier pour ça. Non ce n'est pas pour ça, je te remercie pour ce que tu m'apportes, le bonheur. Cette joie immense, cette chaleur dans tout mon corps, cette petite boule qui frétille dans mon ventre. Je reçois tant de bonheur que j'ai envie de sauter partout pour montrer ce que je ressens.

— Nous n'avons qu'à le faire alors.

Je me saisis des mains de Léto et nous sautons dans notre petite maison, comme des enfants. J'ai peur qu'elle se fatigue, j'ai peur qu'elle se blesse mais nous continuons car son sourire vaut toutes les peurs du monde. Quand nous nous arrêtons, nous sommes tous les deux essoufflés et Léto me regarde avec ses grands yeux que j'aime tant.

— Je ne sais pas ce que j'ai fait pour mériter tout ce qui m'arrive. Me dit-elle alors.

La situation devient tout de suite plus pesante. Oui ce n'est pas juste ce qui arrive à Léto, elle ne mérite pas ça, elle ne mérite pas d'être veuve, elle ne mérite pas d'être malade, elle ne mérite pas de mourir si jeune.

— Je suis désolée Léto.

— Pourquoi es-tu désolé ?

— Pour ce qu'il t'arrive. C'est injuste.

Léto penche alors la tête et lève les sourcils. Je pense m'être encore une fois trompé.

— Oui c'est injuste. Mais ce n'est pas ce que je voulais dire. Je ne sais pas pourquoi je mérite de t'avoir à mes côtés. J'aurai pu mourir seule, mais les dieux m'ont envoyé vers toi par miracle et tu as survécu par miracle. Je ne suis pas une belle personne donc pourquoi me font-ils ce cadeau ? Je devrais être triste, je vais mourir, mais je suis heureuse. Et cela grâce à toi. Merci.

— Tu es une belle personne Léto.

— Pas au point d'être bénie des dieux.

Je tente de retenir mes larmes, je suis si touché. Je dois avouer que je ressens la même chose qu'elle. J'allais mourir, je voulais mourir et maintenant je suis heureux. La vie est pleine de surprise. Comme à mon habitude, je cache mes sentiments en déviant la conversation.

— Les dieux t'ont aussi bénie avec une bonne soupe, vient donc ici.

Nous allons donc autour de notre petite table et mangeons la meilleure soupe de ma vie entière, si reconnaissant de la partager avec Léto.

— Merci Kha c'était délicieux. Maintenant, au lit.

— Oui, au lit.

Kha: L'amour impossibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant