Chapitre 27: Le secret

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— Kha je peux te dire un secret ?

— Oui bien sûr je t'écoute, tu peux tout me dire.

Mon cœur bat à tout rompre sans que je ne comprenne pourquoi. Des secrets j'en connais des tas, même des secrets d'État donc pourquoi celui de Léto me fait tant d'effet ?

— Je suis désolée, je suis si égoïste.

— Ce n'est pas un secret ça, dis-je en tentant l'humour pour détendre l'atmosphère et éviter à mon cœur d'imploser.

Léto esquisse un sourire, j'ai réussi à la faire rire mais pas assez pour effacer le stress que je peux lire sur son visage.

— Non ce n'est pas ce que je voulais dire. Je suis égoïste car je sais que je vais mourir et que je ne devrais pas te dévoiler ce que je vais te dire au risque de te faire souffrir.

— Tu peux tout me dire. Tu sais on a déjà essayé de me tuer bien une centaine de fois dont au moins trois fois cette année. On m'a planté plusieurs flèches dans le corps avant de me brûler vif et je suis toujours en vie. Il n'y a pas plus solide que moi donc je devrais survivre à l'annonce de ton secret, ne t'inquiète pas.

Encore un léger sourire, cela le fait tant de bien de les voir, même si je ne pensais pas que les nombreuses tentatives de meurtres que j'ai dû subir soient un jour drôle.

— Pendant que je me cachais de toi, je flânais dans les rues sans objectifs et j'entendais de ce fait tout un tas de rumeurs.

— Si ton secret c'est que Madame Loif a un amant je le sais déjà, je l'ai même déjà vu avec cet autre homme qui n'est pas son mari, désolé de te le dire mais tu es longue à la détente tout le monde en parle depuis des mois.

Des éclats de joie viennent me transpercer en plein cœur et le réchauffé en quelques secondes.

— Arrête de me faire rire, non ce n'est pas ça car oui c'est effectivement marqué sur leurs fronts.

Léto se rappelle alors ce qu'elle voulait m'avouer et retrouve son calme instantanément avant de continuer.

— Non, en fait j'ai entendu une rumeur une fois, puis deux puis trois puis tant de fois qu'elle est devenue une annonce officielle. Et cela concerne ta vie d'avant. Est-ce que tu veux que je te le dise ? Je comprendrais que tu préfères ne rien savoir et dans ce cas je respecterais ton choix et ne dirais rien.

Ma vie d'avant ? C'est étrange, sans l'avoir oublié elle me semble si loin, j'étais plus concerné par les affaires de cœur de Madame Loif que par elle, comme si c'était celle d'un étranger d'une contrée plus éloignée que notre voisine infidèle. Je ne sais pas si j'ai besoin de savoir. J'ai décidé de la laisser dans le passé comme figée. Je ne suis plus cet empereur conquérant et je vis comme si ma disparition n'avait aucune conséquence sur la vie du palais et ses habitants, comme pour oublier que l'ancien moi ait pu exister un jour.

Comme tous les sujets du pays, je sais seulement que le roi Phoebus n'est plus en place que c'est l'empereur Héphaï sur le trône à présent, c'est tout. Je ne suis plus monarque, je suis Kha et je me comporte comme si je ne connaissais pas ceux qui étaient il y a peu mes amis et mes ennemis.

Cependant ma curiosité est trop forte. Et s'il était arrivé quelque chose de grave ? Je ne peux pas renier mon passé indéfiniment et faire l'aveugle.

— Non c'est bon tu peux me dire, dis-je l'air décontracté même si cette réponse m'a demandé une grande réflexion.

— L'empereur Héphaï était ton meilleur ami c'est bien vrai ?

— Oui c'est exact, pourquoi ?

— Et la princesse Diane c'était... Tu étais, ou es, amoureux d'elle ?

Ma pensée s'arrête sur l'utilisation du passé dans la phrase de Léto. Je ne pensais pas un jour, que qui que ce soit pourrait parler de mon amour pour Diane en utilisant ce temps. Pour moi il ne se conjuguait et ne se conjuguerait qu'au futur. Mais maintenant fait-il même partie du présent ? Une part de moi continue de le croire, qu'il n'a pas de futur possible mais un présent éternel.

— Oui tu as raison. Il leur est arrivé quelque chose ? Dis-je le cœur prêt à sortir de la poitrine.

— Non désolée j'aurai dû garder cela pour moi, je te l'ai dit je suis trop égoïste tu n'as pas besoin de savoir, c'est inutile à part te faire souffrir.

— Tu en as trop dit pour te taire maintenant, donc je t'écoute.

— Non vraiment, ça va te faire de la peine et ce n'est pas ce que je veux, je suis désolée j'ai parlé sans réfléchir. Oublie tout ça s'il te plaît.

— Non. Dis-moi maintenant. Puis tu m'as demandé mon autorisation avant donc j'assumerai. Ma voix est ferme, je ne souhaite pas impressionner Léto mais maintenant je veux savoir et je dois savoir.

— L'empereur Héphaï a demandé en mariage la princesse Diane. Ton meilleur ami a demandé celle que tu aimais, ou que tu aimes, en mariage.

Cette vie que je pensais éloignée me revient en pleine face. La jalousie que je ressentais dans mon ancienne vie est de retour dans la nouvelle. Mais de quel droit ? J'aime Léto, j'ai même réfléchi à l'épouser donc pourquoi je devrais leur interdire d'être heureux ? Ils peuvent s'aimer, la vie continue pour eux aussi et cela sans moi.

Donc je ne sais pas si c'est la jalousie ou la curiosité qui pose la question suivante.

— Et tu sais ce qu'elle a répondu ?

— Non je suis désolée. Tout le monde se contredit au village mais...

— Mais ?

— Mais l'opinion publique penche vers le « oui ». Tout le monde dit qu'il est impossible de refuser une telle offre.

Et l'opinion publique a raison. Héphaï est la personne la plus adorable du monde en plus d'être maintenant infiniment riche et puissant. À cause de moi, Diane n'a plus aucun espoir de pouvoir se marier, elle ne recevra plus jamais une telle offre. Cela pourrait laver son honneur et plus personne n'oserait la juger.

Je remarque que Léto se sent mal d'avoir dû être l'oiseau de mauvais augure qui m'annonce cette nouvelle je tente donc de la réconforter.

— Ne t'inquiète pas ce n'est mais un très gros secret, j'aurai bien fini par l'entendre un de ces jours en allant au marché. Je préfère l'entendre de ta bouche, ta voix est plus douce que celle de la poissonnière.

Cette fois-ci pas de sourire, Léto reste sérieuse.

— Ce n'est pas ça le secret dont je voulais te parler.

— Qu'est-ce que c'est alors ?

— C'est que cette annonce m'a réjouie.

Kha: L'amour impossibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant