Kha: L'amour impossible

Chapitre 28: Toi

Cette annonce l'a réjouie ? Je ne sais pas comment interpréter cette phrase même si ma tête a sa petite idée, mon cœur refuse de l'entendre. Il préfère me faire croire que Léto est une passionnée des mariages impériaux, honteuse de ce passe-temps et qui l'a caché jusqu'à présent.

J'en ai conscience, cette réflexion n'est pas logique mais j'ai si peur de me faire de faux espoirs. J'ai besoin de l'entendre d'elle et seulement d'elle pour en être sûr.

— Réjouie ? Pourquoi ?

Avant, dans pareille situation, pour cacher ma gêne j'aurai fait de l'humour mais mon cœur bat trop vite pour faire la moindre blague ou le moindre jeu de mots idiot. À la place j'attends la réponse, la respiration haletante.

Léto aime faire durer le suspense car au lieu de me répondre elle regarde ses pieds qui ne peuvent s'empêcher de gigoter comme si le sol était en feu. Ses joues deviennent rouges, ce que je pourrais interpréter mais je préfère ne pas le faire.

Je dois rester honnête avec moi-même, ce ne sont que de fausses espérances, Léto ne peut pas m'aimer. Non, c'est impossible n'oublie pas à quoi tu ressembles Kha. Elle mérite mieux que toi, elle ne peut pas t'aimer.

Enfin le long silence dans lequel nous sommes plongés depuis plusieurs secondes se termine et Léto me répond d'une voix fluette.

— Je suis une mauvaise personne Kha.

Comment ? Comment peut-elle penser cela ? Elle est tout sauf mauvaise je ne supporte donc pas qu'elle puisse se traiter de la sorte.

— Non, ne dit pas ça, tu es une belle personne. Tu m'entends, une belle personne.

— Si je suis une affreuse personne car j'espère que celle que tu aimes acceptera cette demande en mariage pour que tu sois tout à moi.

Tout à elle ? Je ne pense pas avoir réussi à cacher mon étonnement car Léto qui avait un peu réussi à lever la tête la baisse aussitôt à nouveau. Mais j'ai besoin de savoir.

— Mais je suis déjà tout à toi que veux-tu de plus ?

Léto me répond alors sans avoir le courage, ou l'envie, de me regarder en face.

— Ton cœur Kha, celui qui appartient déjà à ta princesse. J'ai espéré que tu entendes cette nouvelle au marché, que tu sois triste et qu'ainsi tu l'oublies pour me l'offrir à moi. Mais j'ai alors compris que cela impliquait de te faire souffrir, je suis horrible d'avoir eu de telles pensées, je suis désolée. Je ne pouvais plus vivre avec la culpabilité d'avoir voulu ton malheur, c'est pour cela que je m'excuse face à toi, je te prie de me pardonner pour mon égoïsme.

Léto se met alors à genou, les mains au sol et des larmes commencent à perler sur ses joues. Je n'ai jamais connu une personne aussi pure, elle se sent coupable de ses pensées alors qu'elle n'a rien fait de mal. Et dire que les gens du village pensent qu'elle puisse être une affreuse meurtrière.

Je me jette alors sur elle, j'aimerais la prendre dans mes bras mais au dernier moment je me souviens que Léto ne souhaite pas qu'on la touche, je dois donc respecter son choix. Je me tiens donc à ses côtés ne sachant quoi dire, ni quoi faire. Je tente donc du mieux que je peux de la rassurer.

— Tu n'es pas du tout égoïste Léto. Tes pensées t'appartiennent et ton esprit est un endroit où tu es libre. Donc ne t'en veux pas. Et tu sais...

Suis-je capable de terminer cette phrase ? Je ne sais pas mais il le faut.

— Je ne suis pas triste.

Léto lève ses grands yeux remplis de questions en ma direction.

— Tu n'es pas triste ? Mais celle que tu aimes va en épouser un autre pourtant, pourquoi...

— Car je l'aime justement, je lui souhaite le meilleur. Elle ne fait plus partie de ma vie il est donc normal que la sienne continue.

— Cela signifie que tu l'aimeras pour toujours alors ?

— Oui je pense.

Les grands yeux de Léto me quittent et retrouvent le sol.

— Donc peu importe ce qui se passera tu ne l'aimeras qu'elle pour le restant de tes jours ?

— Non.

Léto se lève et je la suis dans ce mouvement par réflexe, je ne me doutais pas que ma réponse aurait une telle réaction.

— Comment ça « non » ? Comment peux-tu le savoir ?

— Car... Car...

J'ai du mal à terminer cette phrase, je ne me suis que rarement autant dévoilé mais je décide de me montrer courageux, comme celui que j'étais avant.

— Car j'en aime déjà une autre.

— Qui ça ?

Je sais que Léto connaît déjà la réponse, elle est la seule personne que je connaisse mais je ressens qu'elle a besoin de l'entendre de ma bouche. Il y a quelques minutes à peine c'était moi qui avais besoin de l'entendre et maintenant c'est à moi d'avouer mes sentiments. Même si je m'étais promis de ne pas le faire, je sens que les mots que je vais prononcer seront en réalité bénéfique pour Léto.

— Toi, c'est toi que j'aime Léto.