Tibère était assis sur le banc de la cuisine, à la table des domestiques. D'un geste devenu expert, il brossait les chaussures d'Isidore de Serocourt et fredonnait une chanson en souriant. Le fait d'avoir réussi à trouver le sommeil au milieu des ronflements de ses collègues avait allégé son humeur.
Cependant, un bâillement coupa soudain son refrain, il cacha un instant son visage dans son coude et essuya une larme qui avait perlé au coin de son œil d'un revers de main. Il était debout depuis l'aube et n'avait eu de cesse de travailler. Après une nuit de repos, son lit lui manquait terriblement.
Il avait nettoyé et rempli d'huile toutes les lampes de la maison, transporté le charbon dans l'arrière cuisine, réceptionné les courses commandées au marché pour la semaine. Ensuite, il avait préparé la table du petit déjeuner pour les autres domestiques ainsi que celle des maîtres, réapprovisionné les cuves d'eau... puis avait aidé des ouvriers venus pour les travaux du domaine pour ensuite préparer de nouveaux la table pour le déjeuner. Il avait aidé le cochet à préparer la voiture d'Isaure et s'était occupé par la suite de certains chevaux, il cirait à présent les chaussures de tous les membres de la maisonnée et irait ensuite servir les invités selon leurs bons désirs...
Marie-Rose débarqua dans la cuisine, un panier couvert d'énormes fleurs sous le bras. Elle posa sa charge sur la table en soufflant :
— Voilà de quoi renouveler les vases ! Vous m'aiderez à changer les bouquets que nous allons faire, ce sera pour les chambres et le salon. Également, il faudra ajouter un couvert en plus ce soir à la table des maîtres.
— Oui, j'ai été prévenu.
— Encore un prétendant, vous pensez ?
Tibère haussa des épaules. Il ne pensait rien. Son anniversaire était proche et bientôt, il serait légalement libre.
Marie-Rose éclata soudain de rire :
— Vous avez du cirage, là, sur votre joue !
Il releva la tête, pour voir la servante se pencher sur lui et approcher ses doigts de son visage. Elle avait un petit sourire au coin et son œil eut un regard étincelant.
En la voyant approcher si subitement vers lui, Tibère s'écarta et frotta sa peau avec le torchon.
Marie-Rose fit la moue et lui dit d'un ton boudeur :
— Vous n'avez pas à vous montrer craintif envers moi, Térence. Je puis vous assurer que je n'ai blessé aucun homme.
Elle papillonna des cils et il comprit qu'elle le pensait sans aucun doute novice en matière de femmes.
Il songea un instant à son oncle et à sa cousine Amélie. Même après ses vingt-cinq ans, il ne cesserait de le harceler et de lui nuire. Il devait absolument trouver le moyen de le faire tomber avant qu'il ne puisse se débarrasser de lui... Mais à son grand malheur, il n'avait trouvé aucun plan pouvant tenir la route.
Peut-être devrais-je attendre que tout cela termine de se tasser ? Je ne suis pas si mal, ici. Peut-être que dans une année, les hommes de Ravignant cesseront leurs recherches. Je pourrais m'établir un peu en attendant, continuer de réfléchir à la suite, sans précipitations. La vengeance est un plat qui se mange froid, comme dit le dicton.
Il lui adressa son plus charmant sourire et vit la jeune femme rougir un peu. La cuisinière arriva dans la pièce et contempla les chaussures cirées ainsi que les fleurs.
— M'enfin, nettoyez-moi ce bazar ! J'ai des quiches à préparer, pour ce soir. Térence, allez me couper de la glace, s'il vous plait. Il nous reste tout un pain dans la cave.
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Un valet à mes pieds
RomansaMature content Voici ma romance spicy dans un contexte historique ! Ici, pas de mâle Alpha ni de demoiselle en détresse... Non ! Ici, c'est l'héroïne qui domine ! C'est un roman de 20 chapitres, inspiré des romances à l'eau de rose à l'ancienne... s...