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Salam aleykoum




















Ce ne sont pas toujours les aveugles qui ne voient pas...

Ce n'est pas toujours le sourd qui n'entend pas...

























Quarante-cinq minutes. QUARANTE-CINQ. J'ai chronométré. J'ai dormi deux fois, fait une sieste, un micro rêve et un coma léger. Ibrahima n'a rien dit. Rien. Pas un « ça va ? », pas un « t'as faim ? », pas un « t'es vivante ? ». Non monsieur a juste garé la voiture devant un vendeur de sandwich, m'a acheté de quoi ne pas mourir, et basta. Silence radio. Il joue à l'homme blessé, mais je le connais : il va craquer avant moi.

On descend enfin. Et là... tchiiip... la scène. Les gens du quartier ont dû activer la notification "ASMA EST DE RETOUR" parce que tout le monde est là. Tous. Même les vieux qui n'ont pas quitté leur chaise depuis 2009. Tous les regards sur moi. Genre j'étais en cavale à Dubaï avec un footballeur. Calmez-vous, j'ai juste fugué, pas braqué une banque.

Je le sens, les potins vont fuser :
– "Elle était chez un homme, wallahi !"
– "Elle a sûrement vendu son corps pour un iPhone 13."
– "Moi je dis elle est sorcière, son teint est devenu clair."

Mais pas un seul n'aura le courage de venir me dire quoi que ce soit en face. Ils me connaissent. Ils savent que je mords. Verbalement.

Et comme de par hasard, Fatima la maléfique débarque.
Oui oui, Fatima la détectrice de drames, la cheffe de la brigade des commérages. Elle s'approche, sourire jusqu'aux oreilles. J'ai cru qu'elle allait me tendre un micro.

Asmaaa, al hamdulillah tu es revenue ! On s'inquiétait tous pour toi.

Ah bon ? C'est bizarre, j'ai pas reçu vos appels, vos messages, vos signaux de fumée. J'suis pas revenue, Fatima, j'existe juste dans vos rêves. Maintenant, pousse-toi, j'ai pas envie que ton haleine s'accroche à mes vêtements.

Mais wallahi on s'est inquiétés ! Où étais-tu ?

Là où les gens vivent sans Fatima. Range tes dents, on dirait les touches d'un vieux piano.

Asma ! crie Ibrahima derrière.

Quoi encore ?! Pourquoi tu cries comme si j'ai volé ton mouton ? Si t'es fâché, reste fâché en mode silencieux. Écris dans ton journal intime. Et toi, Fatima, téléporte-toi.

Je la pousse. Tout doucement. Avec amour. Enfin... presque.

Ibrahima me laisse passer devant. C'est marrant ce gars. Il m'en veut, mais il joue toujours au protecteur. Ce sera toujours lui le portier de mon destin.

Et là, en entrant, je vois Nafi. Ma sœur. Elle me regarde... et elle craque. Elle laisse tout tomber, même ses émotions. Elle court, me saute presque dessus, et là... elle pleure. Genre vraiment. Des vraies larmes. Pas les fausses qu'on utilise pour avoir du chocolat.

Asma, tu vas bien ? Tu étais où ? Wallahi, j'ai eu peur...

Je la regarde. Touchée, mais j'suis Asma hein. Faut garder le swag.

Je suis bien vivante, pas un fantôme. Tu vois pas cette beauté fatiguée mais toujours en place ? Allez, sèche tes larmes, tu vas me donner envie de faire genre je suis sensible.

— Mais Rassoul m'a dit que t'étais chez son ami. Comment ça se fait alors que tu étais avec Kira ?

Les ennuis, mes chers amis, viennent d'envoyer un carton d'invitation. Et comme d'habitude, je suis l'invitée d'honneur.

ASMA AIDARAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant