Eleanore

1.4K 68 38
                                    

La place à côté de moi dans le lit est glaciale. Il est six heures du matin, et je me réveille une nouvelle fois seule dans cet appartement qui ne me ressemble plus. Cela fait maintenant trois jours qu'Aaron est parti, laissant derrière lui un vide que je peine à comprendre. Chaque nuit, il s'en va, sans explication, sans un mot. J'essaie de ne pas y penser, mais le silence de ce lieu est assourdissant, comme si les murs eux-mêmes étaient complices de son absence.

Nous sommes mercredi, quatre jours après cette soirée maudite, celle où tout a basculé. Je n'ai pas mis les pieds à l'université depuis deux jours, pas à cause d'une quelconque maladie, mais à cause de cette marque de main sur ma joue. Je refuse d'attirer l'attention, surtout celle de mes professeurs, en particulier de ce professeur. Je suis sûre que les rumeurs circulent déjà, que les couloirs résonnent des échos de la trahison. Aaron et cette fille... Comment ai-je pu laisser cela arriver ?

Il semble que je ne manque à personne. Mon téléphone est resté muet, aucun message, aucune nouvelle, pas même de ma meilleure amie, Ilona. C'est comme si j'avais disparu de ce monde, comme si tous ceux que je connaissais avaient décidé de m'effacer de leur mémoire.

Je me lève lentement, mes jambes tremblent sous le poids de mes pensées. Mon corps est faible, vidé de toute énergie. Je n'ai pas mangé depuis lundi soir, non pas parce que je ne ressens pas la faim, mais parce qu'Aaron a décidé de vider les placards et le réfrigérateur avant de partir. Je n'ai même pas un sou en poche pour acheter de la nourriture.

En sortant de la chambre, j'espère trouver Aaron dans la pièce centrale, peut-être en train de préparer un petit déjeuner. Mais la réalité est tout autre : la cuisine est vide, tout est calme, et ses chaussures ainsi que son sac de cours ne sont pas là. Je pousse un soupir, me tenant contre le mur, et je me dirige vers la salle de bain. Pourquoi prendre la peine d'aller dans la cuisine ? J'ai déjà inspecté chaque recoin, espérant trouver un reste de quelque chose à grignoter, mais il n'y a rien.

Je ferme la porte derrière moi et allume la lumière au-dessus du miroir. Mon reflet me regarde, mais il ne m'effraie plus. Ce visage que je vois est devenu une sorte de norme. La marque sur ma joue commence à s'estomper, et je sais que le maquillage réussira à dissimuler le reste. Pourtant, je peux encore sentir la douleur de son coup, le picotement sous ma peau.

Je ferme les yeux, retenant mes larmes. Mon cœur me fait mal. Cette douleur est devenue familière, une compagne silencieuse qui ne me lâche pas. Je sais que je devrais être en colère, que je devrais être prête à partir, mais la flamme qui brûle encore pour lui ne veut pas s'éteindre. Une partie de moi espère toujours que les choses reviendront comme avant, que tout cela n'était qu'une tempête passagère.

Les souvenirs affluent, me submergent. J'aimerais pouvoir les oublier, même pour un instant. Souvenir de ses bras autour de moi, de ces instants de paix. Mais je sais, au fond de moi, que ce changement brutal de comportement ne peut être ignoré. Aaron m'a dit, dans un regard, que je ne lui suffisais plus. Malgré mes tentatives de me convaincre du contraire, une voix intérieure murmure que peut-être, il a raison. Je ne lui apporte pas ce qu'une petite amie est censée apporter.

Je m'observe encore dans le miroir. Ces yeux fatigués, pleins de larmes non versées, ne mentent pas. Je sais que je dois me réveiller, réaliser que ce n'est pas moi qui suis en faute.

***

Les couloirs de l'université ne m'ont pas manqué durant ces deux jours d'absence. En entrant, je scrute mon téléphone, espérant y trouver un message d'Aaron ou d'Ilona. Mon centre de notifications est vide depuis dimanche, et je n'ai même pas eu à le charger. C'est comme si le monde continuait de tourner sans moi.

Tears and memories Où les histoires vivent. Découvrez maintenant