Get back to where you once belong !

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Get back to where you once belong !

Ce matin je me suis réveillée très en avance... Ca change, car d'habitude je fais tout pour rester toujours cinq minutes de plus ! Mais bon, là, je n'arrivais plus à me rendormir... Au départ, je suis restée allongée, sur le dos, à essayer de discerner mon plafond parmi l'obscurité de la chambre... Puis mon regard déviait, se posait sur les meubles, tentait de deviner les couleurs, ou encore essayait de voir la position des aiguilles sur le cadran de l'horloge... N'arrivant pas à les replacer, je saisis mon iPod et le déverrouille. Dans un premier temps, je referme mes yeux brutalement : la luminosité, que j'avais oubliée de baisser, venait de m'agresser d'une force ! Puis je vois l'heure : 5h42. J'hésite alors à me rendormir : est-ce que ça vaut vraiment le coup ?

Finalement, je me dis que non. Je me lève, pose les pieds sur le sol un peu frais, et commence à marcher doucement, pour ne pas trébucher sur quelque chose. Puis d'un coup, j'oublie de lever le pied, et je m'entrave dans le câble de ma guitare... Quelle conne, mon dieu ! J'avais oublié que je l'avais laissée par terre hier soir, par pure flemme de la raccrocher au mur... Je me rattrape au tiroir de mon bureau, encore ouvert, qui manque de tomber à son tour, puis je fais glisser mes pieds pour arriver à un niveau de courbure où j'arriverai à me relever toute seule. Je replace mon dos correctement, et allume la lumière. Puis je me retourne et me regarde dans le miroir. Je lève un bras : oui, c'est bien moi... La fille que l'on voit dans le miroir fait exactement les mêmes mouvements que moi : elle s'avance, bouge les lèvres, cligne des yeux en même temps que moi, pourtant je ne me reconnais pas en elle... Je me rapproche un peu plus et touche mon visage. Il est beaucoup moins boursoufflé qu'avant, mais toujours violacé. Oh quelle horreur... Je vais vraiment aller au lycée comme ça ?! Les gens s'affoleront autour de moi, me demanderont ce qu'il s'est passé, voudront des détails... Et je n'ai aucunement envie d'exposer au grand public ce qu'il s'est passé hier avec William et Sarah ! Alors je me passe un mouchoir humide sur le visage, et commence à appliquer toute sorte de produits pour essayer de cacher les bleus. Mais c'était en vain, et je le savais : on ne peut pas cacher les bleus, même avec du maquillage... Je camouffle néanmoins les égratignures et pars dans la salle de bain, sans faire de bruit, pour ne pas réveiller mes parents et mon frère.

Je me lave, et m'habille. Je choisis de bien m'habiller aujourd'hui, même si j'aurais préféré aller au lycée au jogging... Je mets donc mon slim noir déchiré aux genoux, mon tee-shirt marin, ma veste en lin noire et mes Dr. Martens métallisées. Puis je saisis ma montre, et regarde l'heure : 6h57. Merde : j'ai mis une heure à essayer de cacher ces bleus merdiques alors que je n'y suis pas arrivée... Je prends ma carte de bus, et une pomme pour le chemin du bus, laisse un mot sur la table pour dire que je rentre vers 17h et pars.

Je me mets à côté d'une vieille dame dans le 705, qui d'ailleurs avait l'air ahuri en voyant mes 'blessures de guerres' au visage. J'avais envie de lui dire 'Quoi, tu veux les mêmes ?', mais je me suis retenue. Mais en même temps elle me foutait mal à l'aise à me dévisager, vraiment, sans interruption pendant les quinze minutes du trajet. Puis le bus nous dépose, comme tous les matins devant les grands escaliers du lycée. Je descends, par la porte du milieu, et fais face à la sympathique foule des gens de mon établissement. Mais heureusement, les regards ne se tournent pas vers moi, les gens ne sont donc pas au courant pour hier ! Je baisse légèrement la tête, pour laisser passer mes cheveux autour afin de cacher un peu mon visage. Puis je monte les escaliers, aujourd'hui un peu humides, et passe le portail du lycée. Voyant qu'il n'y a presque personne, je relève la tête pour chercher Yann et Tom. Ah, ils sont là-bas, devant la salle de musique ! Je me presse pour aller les voir. Lorsque j'arrive, ils étaient en train de parler de la nouvelle guitare de Tom. Chacun son sac sur l'épaule, l'un une housse de guitare à la main, l'autre les baguettes dépassant de la fermeture. Ils s'avancent pour faire la bise, mais Tom se recule et m'examine. Il tourne mon visage à droite, rien. Puis à gauche : ma joue est toujours violacée et j'ai quelques égratignures au-dessus de l'arcade sourcilière et sur la tempe. Puis ils me font tous les deux la bise, et on commence à vouloir ouvrir la salle. Mais on se rend compte qu'aucun de nous n'a ni de carte, ni de ticket. Alors on se dirige tous les trois vers la vie scolaire, pour récupérer un nouveau passe pour la salle. Je marche, moi à gauche, Tom à droite et Yann entre nous. Puis on monte les deux marches qui sont devant le bâtiment de la vie scolaire, et on est en train d'atteindre la porte, lorsque l'on s'arrête, car deviez qui passe ? William et un de ses nouveaux 'potes'... Je crois qu'il ne m'avait pas vue, mais le fait de s'arrêter a attiré son attention. Je le regarde, et il me renvoie un regard mi apeuré, mi en colère.

"T'as peur ? lui lançai-je
-Nan, Anna, c'est bon, fit Tom.
-Ah non non, c'est pas bon, lui répondis-je.
William, qui s'était arrêté lui aussi, s'avance vers moi, d'un pas pas très assuré.
-Non, non... Je – je n'ai pas peur, essaye-t-il de prononcer.
-Ouais, allez c'est ça, ta gueule" lui fis-je.

En faisant demi-tour, il fit un sursaut, comme si j'allais lui bondir dessus. J'ai alors éclaté de rire, car je ne l'imaginais pas comme ça, le petit Chesnel...
Puis on entre dans la vie scolaire, Tom et Yann discutant et rigolant de ce qu'il vient de se passer. Je demande un ticket pour la salle de musique, et on repart.

Je crois que malheureusement, l'entrevue avec William a éveillé la curiosité de certains élèves du lycée, qui me dévisagent lorsque je passe au milieu de la cour. J'ai envie de sourire, car oui, cette situation me fait rire, mais en même temps les gens pourraient prendre ça pour de la prétention et ce n'est pas du tout mon but. Alors j'ouvre la pièce, allume les lumières, et on commence à brancher les instruments. Je me baisse, prends l'alim du synthétiseur, et branche aussi dessus le câble pour le relier à la sono. Puis je me retourne pour mettre les pieds à micro, et aperçois quelqu'un qui me regarde à travers la fenêtre. Je laisse deux secondes les gars terminer d'installer tout, et me dirige vers la porte. C'est Sarah, oh non...

"Ecoute, Anna, je suis désolée, commence-t-elle
-Nan, s'il te plait, tais-toi, j'ai pas envie d'entendre tes conneries, fis-je
-Je te jure que je pensais que tu l'autorisais ! continue-t-elle
-Mais je sais, oh, j'ai lu les messages, mis je comprends comment, même par principe, t'as accepté de sortir avec lui... Ca me dégoute, vraiment !"

Je ne suis plus du genre à cacher mes sentiments, surtout dans ces cas-là... Alors je la laisse, seule, et rentre dans la salle de musique avec les garçons. Ils me regardent, espérant sûrement une explication. J'ai vraiment besoin d'expliquer ?

"Tu vas lui faire vraiment la gueule ? rigole Tom
-Euh, elle a voulu sortir avec mon mec ! me défendé-je
-Vous êtes vraiment compliquées, les filles, avec vos histoires d'honneur et amitié et je sais pas quoi là... avoua-t-il
-Mais je sais pas, Tom, si par exemple Yann sortait avec une meuf qu'il sait que t'aimes, tu lui ferais pas la gueule ?! fis-je
-Franchement ? Je verrais si ça vaut le coup, et là je te le dis, c'est pas vraiment de sa faute, à Sarah... me confia-t-il
Je m'assieds sur une chaise, un peu perdue, et Yann et Tom me rejoignent, laissant leurs affaires de côté.

"Eh, Anna, arrêtes de t'embêter pour une histoire de merde, vraiment, William, c'est un bâtard, okay ? Et il a foutu la merde entre Sarah et toi... Juste, prends bien en compte qu'on est là, et puis Amandine est là aussi, et Sarah est quand même là pour toi..." me fit Yann.

J'avoue que son discours m'avait convaincue. Alors je souris, je reprends mon souffle, et on s'installe : Yann à la batterie, avec son micro, Tom à la guitare lui aussi un pied de micro, et moi au synthé, avec un micro aussi. Et on se met à jouer 'Lived A Lie' de You Me At Six. Tom a commencé à chanter sur le premier couplet, puis tous ensemble sur le refrain, puis moi sur le deuxième couplet, puis ensemble sur le refrain, puis Yann sur le pont, puis à nouveau ensemble sur la fin ! Ca sonnait parfait... J'avais l'impression pour une fois, d'être réellement revenue à ma place.

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