Chapitre 8 : la guerrière de l'ombre

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Avertissement pour ce chapitre : idéation suicidaire et mentions d'automutilation

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Enid associait les mages noirs à l'odeur de la charogne.

Ils ouvraient la voie à une large voiture bardée de métal. Un corbillard, une livraison d' « atouts de guerre », comme les désignaient les documents pour éviter que les consciences ne se réveillent. Elle s'accroupit, se rendit invisible. Ses alliés devaient déjà être en position. Tout son corps se préparait à tuer.

L'on fit halte, des éclats de voix montèrent en constatant que la route était obstruée de planches et d'autres obstacles. Ils ne s'attendaient clairement pas à une telle situation.

Elle agrippa son épée. Perché dans son arbre, un camarade décocha une flèche. L'un des corbeaux leva la tête, mains auréolées de ténèbres. Enid se déplia, se rua sur sa proie et l'égorgea avec une précision chirurgicale. Elle avait appris à ne jamais laisser un affrontement s'éterniser.

Ses alliés se démenaient à ses côtés, leurs coups résonnaient au milieu de la mélopée funèbre des flèches et des sifflements de la magie. De nouveau prise pour cible par un mage noir, elle ne dût sa survie qu'à sa souplesse. Tout se jouait en l'espace d'un battement de cœur. Le couteau rejoignit sa main et son poignet la libéra avant même que le sorcier n'ait pu préparer sa riposte. Le métal vola vers son torse dans un bref éclat et s'y enfonça.

Une lame s'abattit vers elle, Enid eut à peine le temps d'esquiver, sentit le métal entailler sa peau et la chaleur du sang. Sa riposte fut furieuse, vicieuse. Le garde était fort et leurs armes s'opposèrent en un terrible fracas. Il ne la toucherait plus de nouveau, hors de question de céder à une telle ordure. Un chant de guerre résonnait dans son corps. Bien sûr, l'emblème ne se montrait pas. À croire que cette saloperie n'avait pas d'autre but que de lui rappeler son cauchemar.

Le visage d'Enid était un masque démoniaque, ses yeux étaient ceux d'un reptile : froids et cruels. Insaisissable comme la fumée, elle l'entraîna dans sa toile, lui fit adopter son tempo. Il trébucha, emporté par la vigueur de son offensive. Sa chair céda sous la lame d'Enid, ses yeux se révulsèrent tandis que la colère déformait ses traits. Mais il ne fut très vite plus qu'un cadavre échoué à ses pieds.

Le combat prit fin. Les freux viendraient bientôt, attirés par le festin. Enid parcourut la route du regard. Ils avaient triomphé mais en avaient payé le prix. Certains d'entre eux gisaient désormais aux côtés des laquais de l'empire. Une mort commune à de nombreux héros de l'ombre.

Enid savait que cette lutte serait gagnée sur le long terme, mais fulminait parfois devant leur peu d'avancées. Ces raclures devaient être éliminées et ne plus jamais toucher à qui que ce soit. Elle se tempéra, sa fureur savait aussi se faire animal à sang froid. L'empire était un colosse, mais Enid se promit qu'ils finiraient par lui scier les pieds. Elle avait tout le temps nécessaire devant elle.

La besogne n'était pas terminée. Enid se dirigea vers le véhicule et crocheta la serrure avec maîtrise. Une exhalaison méphitique s'en échappa, mélange d'excréments, de sang séché et de sanie. Elle avait beau la connaître, ses tripes en furent néanmoins retournées. C'était le parfum de la déchéance, d'une horreur sans nom. Comme toujours, elle se crispa, fit violence à son instinct de survie. La rage pulsait en vagues ardentes.

Tous s'éloignèrent. Les monstres étaient toujours enchaînés, mais la prudence s'avérait de mise. Rien ne bougeait à l'intérieur. Les corbeaux avaient trouvé un moyen de s'assurer de la docilité des bêtes pendant le transport. Enid ignorait s'il s'agissait de sorts, d'hypnose, de drogues ou tout cela à la fois, mais le résultat était là. Les créatures étaient inertes, vautrées dans leur cloaque.

Quatre guerrières (Fire Emblem Three Houses)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant