79. His Dark Materials

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Hector sentait qu'il aurait dû ouvrir la marche, affronter le premier ce qui se cachait à l'étage supérieur, mais lorsque Leo et Nina s'engagèrent dans l'escalier, peu perturbées par l'atmosphère délétère qui s'en dégageait, il repoussa ses pensées funestes – superstition, sûrement – et les laissa filer.

Mais lorsque des cris d'horreur résonnèrent dans les hauteurs, il ne fut guère surpris et s'immobilisa. Un parfum de mort régnait, plus prégnant que jamais, comme une brume suffocante qui lui voilait la vue.

— Ne montez pas ! s'exclama Nina, bouleversée, en dégringolant dans leur direction.

— Qu'est-ce que c'est, qu'est-ce qui se passe ? demanda Yann, la voix fêlée par la panique.

— C'est... commença Nina.

Un cimetière, devinait Hector.

— Nous devons traverser, intervint-il.

— Vous ne voulez pas voir ça, murmura-t-elle.

Elle s'assit brusquement sur une marche et se mit à frissonner.


Sous un plafond bas, le niveau semblait à nouveau s'étendre sans subdivisions, ou presque. Ses fenêtres avaient été occultées, plongeant les lieux dans une pénombre que n'éclairaient que des lampes bleutées expertement positionnées pour en révéler les trésors. Une trentaine d'entre eux occupaient la salle d'exposition macabre que s'était construite Miles. Des cadavres préservés, auxquels on avait donné des poses ordinaires, comme s'ils étaient encore vivants. Hector y déboucha seul, marcha lentement en direction de Leo, qui terminait de rendre son repas contre un mur.

Lorsqu'elle perçut sa présence, elle se releva, s'essuya la bouche d'une manche et le dévisagea, les yeux brûlants. Pendant une seconde, ils ne dirent rien, ni lui, ni elle.

— Ce type est un malade, voilà, admit-elle finalement. On le savait, non ?

Hector jeta un oeil autour d'eux, vers les carcasses auxquelles on avait refusé le dernier repos. Une dizaine d'entre elles s'alignaient en une haie d'honneur, les unes après les autres, mais d'autres se heurtaient dans des combats figés ou réalisaient des activités banales, manger, bavarder, danser. Dans un coin, sous une lumière plus rouge, Hector crut apercevoir l'une ou l'autre silhouette s'adonnant à des ébats d'une nature plus intime. Il se détourna.

— C'est une forme d'embaumement, je suppose, murmura-t-il.

— C'est juste répugnant, répondit Leo.

Mais logique. Les humains préservaient leurs trophées depuis toujours. Miles disposait simplement de méthodes modernes qui lui permettaient de maintenir les corps dans un état presque parfait.

— Nous devons traverser.

— Je vais chercher un interrupteur. Plonger toute cette merde dans le noir, c'est encore le mieux.

— Cela rendra notre progression plus compliquée. Nous pouvons bander les yeux des autres, si tu as l'estomac pour faire face.

— J'ai disséqué un certain nombre d'EBA pendant ma thèse, si tu veux tout savoir. Alors oui, je vais faire face.

— Bien.


Convaincre Yann de se laisser aveugler s'avéra moins difficile qu'anticipé. Il accepta sans discuter, contaminé par le chagrin de Nina, et désireux de se l'épargner. Nina refusa, le Troyen n'insista pas. Il prit le bras de Yann et ils rejoignirent l'étage supérieur. Leo s'était déplacée dans le musée de Miles, les traits figés mais le regard dur. Elle leur fit signe, Nina ravala un sanglot et fixa ses pieds, avant de progresser vaille que vaille dans sa direction.

Les Héros de RienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant