77. Night at the Museum

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Le loft de Miles occupait toute la surface de l'étage et se déclinait en boiseries et métal mélangés. L'atmosphère n'évoquait rien à Hector, ni son temps, ni celui dans lequel il avait débarqué malgré lui. Des baies vitrées révélaient la ville interminable, un salon gigantesque se tournait vers un écran d'une taille inutile et des arbustes malingres s'alignaient sur une terrasse obscure. La salle à manger pouvait accueillir au moins douze personnes et une cuisine chromée luisait dans la pénombre, astiquée mais étrangement vide. S'il y avait des serviteurs, ils étaient invisibles.

Leo marmonna quelque chose dans sa barbe, Nina rit à mi-voix. Hector restait concentré sur Arthur, Arthur sur le Graal, qui cheminait quelques pas devant eux, incertain. L'idée que son saint calice soit en réalité un chevalier aux appellations multiples ne paraissait plus choquer le jeune roi. Hector ignorait s'il l'avait pleinement accepté ou s'il était simplement trop fatigué pour contester.

La cage d'ascenseur principale était beaucoup plus large que celle qui les avait ramenés des thermes. Nina demeura immobile un moment devant le panneau qui permettait de la conjurer. Hector comprenait sa réserve : inviter la cabine mouvante jusqu'à eux, c'était prendre le risque qu'elle leur apporte des visiteurs malvenus.

— Il ne monte pas plus haut, intervint Serena, qui les avait suivis, escortée par son garde du corps fébrile.

— Explique-toi, intervint Hector, avant que la situation ne dégénère en un nouveau palabre.

Elle lui lança un regard aigu, mais obéit.

— L'ascenseur s'arrête à cet étage. Les trois derniers ne sont accessibles que par un escalier qui démarre dans l'espace bureau.

Hector soupira. Un escalier sur trois étages. Leo lui avait sélectionné une pilule pour le renforcer – elle en avait donné deux à Arthur, sans s'étendre sur leur usage – mais il sentait qu'il s'agissait d'une énergie fausse, dont son corps ne disposait pas, et qui ne durerait plus longtemps.

Magnanime, Serena leur désigna la direction à emprunter et ils se carapatèrent sans tergiverser. En tête, Nina et Leo bavardaient à mi-voix. La première ne cessait de jeter des coups d'oeil inquiets vers l'arrière et pinçait les lèvres chaque fois qu'elle croisait le regard d'Hector. Ce souci finit par irriter le Troyen qui décida de ne plus lui prêter attention. Ce que cette angoisse signifiait, il ne voulait pas le savoir.

Le bureau occupait l'espace opposé à la chambre. Rangé et rutilant, il paraissait peu utilisé et Hector devina que Miles devait disposer d'un autre endroit d'où gérer son empire. Leo ne résista pas à l'envie d'ouvrir l'un ou l'autre tiroir, elle parcourut rapidement la tranche des livres alignés dans la bibliothèque, mais sa mine demeura illisible. Dans un angle, une porte couleur bronze, aux boulons apparents et munie de la même fenêtre ronde que le dressing, semblait les guetter.

Elle n'était protégée par aucun code, aucune serrure complexe, aussi s'ouvrit-elle pour les libérer. Les deux femmes grimpèrent les premières, Yann toujours silencieux, toujours incertain, dans leur sillage, puis Hector poussa Arthur devant lui. Avant de franchir le seuil, il échangea un dernier regard avec Serena. Il faillit lui proposer à nouveau de les accompagner, mais il savait ce qu'elle dirait, et se contenta d'un signe de tête, qu'elle lui rendit, paupières rétrécies.

Sur son honneur.

Il suivit les fuyards.

L'escalier était étroit, ce qui permit à Arthur de s'aider des deux mains pour gravir les marches. Hector referma soigneusement la porte derrière eux, mais il n'y avait rien pour la bloquer aussi ne s'attarda-t-il pas plus que nécessaire. Une douzaine de marches plus haut, ils se reposèrent un instant sur un petit palier, avant de reprendre leur ascension. Le Breton tenait encore sur ses jambes. Hector ne voulait pas imaginer ce qu'il ferait lorsque ce ne serait plus le cas.

Les Héros de RienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant