BEHIND - Tome 1. The Wicked Game

31 - Fusion

Cassie

Les doigts de Charly m'abandonnent le temps de déverrouiller la porte de son appartement. Ces quelques secondes me déstabilisent. Son contact m'est devenu essentiel. J'ai besoin qu'il me serre dans ses bras, besoin de lui tout entier...

Et là, je prends pleinement conscience que les cartes viennent d'être redistribuées. Après des semaines passées à réprimer ce désir fou que j'éprouve pour lui, j'ai déposé les armes et cède à ce besoin incoercible. À présent nous sommes dans le même camp, des co-équipiers indispensables l'un à l'autre pour entamer une partie d'un nouveau genre qui s'inscrit dans le registre du plaisir.

Une main sur la poignée, il renoue le lien entre nous en dardant sur moi un regard où se mélange excitation et appréhension. Craint-il que je fasse marche arrière ? C'est impossible, mon seul souhait à l'heure actuelle est d'entrer dans son univers, celui qui compose Charly Jenkins, cet homme complexe, aussi exaspérant qu'attirant, aussi irritant que charismatique, aussi froid et cinglant que doux et touchant. Lui tout entier. Ces deux personnalités tentent de trouver leur place dans son esprit quelque peu torturé. Elles se confrontent, se dissocient, peinent à se conjuguer, mais elles y parviendront, j'en suis certaine.

Le sourire que je lui adresse balaye ses craintes. D'instinct, il couvre mes reins d'une paume ferme et possessive pour m'inviter à pénétrer chez lui. Mes lèvres crépitent d'impatience de retrouver les siennes, mon corps s'enfièvre dans l'attente de se connecter à lui, pourtant ma curiosité me pousse à observer son environnement.

Mes baskets atterrissent sur un parquet en chêne massif dont la qualité se devine au premier coup d'œil. Un sol qui au bas mot doit coûter dans les deux cents dollars le mètre carré, soit plus de dix fois le prix que celui que ma mère s'est déchirée à payer pour notre petit appartement en banlieue parisienne... Le mur à ma droite, d'un blanc immaculé, contre lequel repose une fine console de créateur en acier sur laquelle Charly dépose ses clés, est surplombé de quelques cadres aux bordures noires, parfaitement alignés. Le pan à ma gauche est dévoré par d'immenses portes de placard sur mesures en ébène. L'entrée à elle seule me rappelle que nous venons de mondes très différents, toutefois, je ravale ce constat et avance jusqu'au bout du couloir, bien décidée à découvrir celui de cet homme si énigmatique.

Les spots qu'il allume diffusent une lumière vive dans le salon, au bout duquel j'aperçois une cuisine sophistiquée et ultra moderne dans des teintes de blanc et de noir. L'appartement tout entier semble imprégné de cette couleur si sombre qui le caractérise tant. Un autre exemple avec un fauteuil massif en cuir, dont je ne peux me retenir de toucher le dossier capitonné.

Les bras de Charly m'encerclent, son souffle chatouille mon cou, m'irradie de sa chaleur. Mon dos ainsi plaqué contre son buste fait naître en moi un sentiment que je n'ose même pas m'avouer tellement sa puissance m'effraie.

— Tu aimes ? chuchote-t-il au creux de mon oreille.

— Beaucoup.

Ma réponse est un simple murmure, mes cordes vocales sont trop tendues pour proposer autre chose. Je bascule ma tête en arrière, la niche délicatement contre son épaule, offrant un accès illimité à sa bouche sur ma peau, qu'il s'empresse de venir goûter. La douceur de ses gestes est en totale contradiction avec la vivacité de sa respiration et le tremblement de ses mains quand celles-ci s'égarent sur mon ventre. Sa force retenue n'est qu'un puissant écho à celle qui me dévore. Le tissu de mon vêtement me brûle.

D'un mouvement brusque, il me retourne. Dans la proximité de ce face-à-face, l'intensité de son regard me percute. Hypnotisée par cette lueur qui brille au fond de ses yeux, je chavire, me perds dans le brun profond de ses pupilles dans lesquelles dansent des filaments d'or. J'en oublie qui je suis, où je suis, qui nous sommes... La seule pensée qui m'obsède est de combler ce vide qu'il crée à l'intérieur de moi à chacune des secondes qui s'égrènent.